Chapitre 1. Elaboration d’une représentation mentale cohérente en mémoire

1. Niveaux de représentation et compréhension

La compréhension textuelle est un phénomène psychologique complexe et diffère considérablement en fonction de la situation et des individus concernés. L’étude du phénomène de compréhension suppose de s’intéresser à la représentation élaborée et aux différents systèmes que l’individu est amené à développer lorsqu’il s’engage dans cette activité particulière de compréhension. Elle suppose la mise en place de plusieurs processus qui interviennent à des degrés différents de traitement du texte et qui vont de l’accès au lexique à la construction plus généraliste de la situation décrite. Les premiers travaux qui se sont intéressés à la représentation mentale textuelle émergente d’un texte ont débuté dans les années 1980 avec Kintsch et van Dijk (1978). Ces auteurs ont proposé un modèle pour représenter la signification des textes à partir de la mise en place d’une hiérarchie de petites unités linguistiques appelées propositions. L’objectif de ces études était de savoir principalement comment à partir de ces unités textuelles fondamentales, l’individu devenait capable de mettre en place une représentation mentale cohérente du texte lu. En 1983, van Dijk et Kintsch proposent une nouvelle théorie de la compréhension et déclinent une distinction théorique qui suppose que le processus de compréhension, certes, passerait par la mise en place d’une représentation mentale cohérente du texte mais que cette représentation construite s’organiserait autour de plusieurs niveaux textuels. La représentation mentale du texte est alors qualifiée de multi-niveaux. Les différents niveaux classiquement admis sont le niveau de surface, le niveau sémantique et le niveau modèle de situation (van Dijk & Kintsch, 1983; Johnson-Laird, 1983). La structure de surface est une représentation de la forme des mots, de la syntaxe. Ce niveau est généralement celui qui devient faiblement accessible pour le lecteur. Le niveau sémantique de la représentation, quant à lui, plus communément appelé « base de texte », permet d’obtenir une signification locale et globale du texte à partir de deux types de traitement que sont le microtraitement et le macrotraitement. Ces deux traitements reposent sur le concept clé de proposition. Chaque texte serait en effet décomposable en unités textuelles appelées propositions. Le mode d’organisation locale et globale de ces propositions serait fonction du degré de cohérence du texte (Kintsch & van Dijk, 1978) et permettrait de distinguer la microstructure et la macrostructure du texte. Enfin, le modèle de situation réfère à la situation évoquée par le texte. Ce niveau de représentation résulte de l'interaction entre les informations explicites du texte et les connaissances du lecteur. Il constitue le niveau le plus élaboré de la représentation mentale.