1. Notre point de vue sur l’erreur

Tout d’abord, il faut noter que l’intérêt porté aux erreurs des élèves n’est certes pas un phénomène nouveau. Durant les années 1980, un vaste travail a été réalisé sur la notion d’erreur en mathématiques. Les erreurs ont été étudiées non seulement du point de vue de leur fréquence, mais aussi du point de vue de leur nature.

Pour spécifier notre position de l’erreur, nous rejoignons DeBlois et al., 2005 qui indiquent que l’erreur émerge des réflexions et des expériences des élèves :

‘"L’erreur n’est pas le fruit de hasard ; elle peut être l’indice d’une connaissance qui s’est révélée efficace dans certains cas, mais qui, mise en œuvre dans un nouveau problème, s’avère inappropriée ou inadaptée." (pp. 135-136)’

Sackur et al., 1997 sont en accord avec l’idée précédente et voient que les erreurs des élèves, notamment en mathématiques, ne sont pas le résultat d’incohérences, de conceptions erronées, mais de connaissances qui ont une "forme particulière".

Nous adoptons également le point de vue de Ravestein et al., 1994, qui se placent du point de vue de l’enseignant pour spécifier l’erreur. Ainsi, ils indiquent une autre dimension de l’erreur comme un écart entre ce qui est attendu par le maître et ce qui est produit par l’élève:

‘"L’erreur dans la relation didactique, relevée, parfois archivée, renvoie aussitôt à un système de référence : celui du savoir enseigné. Institutionnellement reconnu et jouissant d’une relative stabilité à l’échelle d’une classe, incarné dans la parole du maître, ce savoir disponible permet de circonscrire ce qui aurait dû être fait et qui ne l’a pas été. En présence de l’erreur on est donc ici invité à mesurer un écart, évaluer une différence, entre le produit attendu et la production de l’élève." (pp. 83)’

De plus, de nombreuses études tendant à considérer le statut de l’erreur comme un support possible pour les apprentissages des élèves en classe (Cange et al., 2003, Brousseau, 1983). Dans ce cas, Brousseau, 1983, parle des obstacles, des conceptions anciennes qui résistent face à une nouvelle conception. Ainsi, elles provoquent des erreurs dans des nouvelles situations :

‘« Un obstacle est un ensemble de difficultés d’un actant (sujet ou institution), liées à « sa » conception d’une notion. Cette conception a été établie par une activité et par une adaptation correctes, mais dans des conditions particulières, qui l’ont déformée ou qui en ont limité la portée. Les difficultés créées par cette conception sont liées par des « raisonnements » mais aussi par les nombreuses circonstances où cette conception intervient. Ainsi la conception résiste au simple apprentissage d’une connaissance plus correcte. Les difficultés semblent disparaître, mais elles réapparaissent de façon inattendues et causent des erreurs par des relations insoupçonnées. L’identification et l’inclusion explicite du rejet d’un obstacle dans la nouvelle connaissance sont généralement des conditions nécessaires à son usage correct. »’

Ensuite, en se référant à Bachelard, Brousseau identifie l’obstacle épistémologique :

‘« une connaissance qui donne des résultats corrects dans certain domaine mais se révèle fausse ou tout à fait inadaptée dans un domaine nouveau ou plus vaste, (…) ces connaissances ne sont pas des constructions personnelles variables. Elles sont des réponses universelles à des domaines précis. Elles apparaissent donc presque nécessairement dans la genèse d’un savoir. » (Brousseau, 1983)’