Introduction générale

1.1 Contexte

Nos travaux de thèse ont été réalisés dans le cadre d’une Convention Industrielle de Formation par la REcherche (CIFRE). L’objectif d’une convention CIFRE est d’associer, autour d’un projet de recherche, trois partenaires : une entreprise, un laboratoire et un(e) doctorant(e). L’Association Nationale de la Recherche Technique (ANRT) a accepte les partenaires suivants pour la convention portant l’identifiant 735/2003 : l’établissement bancaire LCL-Le Crédit Lyonnais (note LCL par la suite), le laboratoire ERIC (Equipe de Recherche en Ingénierie des Connaissances) et moi- même dans le rôle de doctorante. Le projet de recherche a été défini en collaboration avec les différents partenaires et avait pour but de pouvoir apporter des solutions, issues d’un travail de recherche, a des besoins réels. Ces besoins, pour LCL, se situe dans le contexte du marketing local. LCL, qui constitue la première banque nationale de proximité en France, dispose d’une double politique marketing. Sur un plan national, des actions multi-canaux (courrier, téléphone, courriel) sur des produits identifies sont menées auprès des clients. En complément de ces actions nationales, des actions au niveau local peuvent être menées pour répondre a des besoins spécifiques émergeant au niveau local (rattrapage de retard sur des objectifs commerciaux, création d’une nouvelle agence, etc.). Ces actions sont proposées par les responsables commerciaux eux-mêmes, à différents niveaux hiérarchiques. En effet, l’organisation commerciale de LCL correspond a une structure hiérarchique pyramidale. Au début du projet, cette hiérarchie se présentait sous la forme de la pyramide de la Figure 1.1 qui inclut également a sa base un niveau client. Ce niveau ne fait pas partie a proprement parler de la structure organisationnelle hiérarchique, mais il permet de situer les clients, qui ont bien évidemment un rôle prépondérant pour l’établissement.

Au sommet de cette pyramide, on trouvait la banque des particuliers et des professionnels (BPP), elle était composée d’un ensemble de huit directions d’exploitation (DE) qui correspondaient a un découpage géographique (Figure 1.2) : le Nord Ouest (DENO), Paris (DEP), le Bassin Parisien Sud (DEBPS), l’Ouest (DEO), l’Est (DEE), le Sud-Ouest (DESO), la Méditerranée (DEM) et Rhône-Alpes Auvergne (DERAA). Dans le cadre de cette thèse, nous avons travaille au niveau d’une DE, en l’occurrence, celle de la région Rhône-Alpes Auvergne, au service à la fois de cette direction, mais également de toutes les unîtes des niveaux hiérarchiques qui dépendent de son périmètre géographique. En effet, chaque DE est ensuite organisée selon des niveaux hiérarchiques successifs, découpés selon des périmètres géographiques diriges par des responsables commerciaux. Ainsi, chaque DE était composée d’un ensemble de di- rections particuliers-professionnels (DPP), chaque DPP était composée d’un ensemble d’unîtes commerciales (UC), chaque UC comprenait un ensemble d’agences. Chaque agence dispose d’un ensemble de conseillers qui sont en contact direct avec les clients. La DERAA, avec laquelle nous avons collabore, comprenait une dizaine de DPP (citons par exemple la DPP DRÔME ARDÈCHE HAUTES-ALPES), une soixantaine d’UC (une des UC de la DPP citée en exemple est l’UC ANNONAY) et environ 300 agences bancaires telles que nous les connaissons.

En observant cette pyramide, nous pouvons constater le rôle primordial des conseillers commerciaux qui sont au contact des clients et, par conséquent, réalisent les ventes. Il s’agit alors, pour l’ensemble de la hiérarchie, de tout mettre en œuvre pour aider et optimiser leur travail. Ainsi, pour compléter la politique marketing nationale et réaliser ainsi des ventes additionnelles, les responsables commerciaux en région Rhône-Alpes sont amènes à faire des demandes de marketing local afin de mener des actions. Une demande de marketing local est la formulation d’une demande de ciblage de clients pour une action marketing ponctuelle, qui n’est autre qu’une opération spécifique a un produit ou a un événement particulier. Elle se traduit par l’extraction d’une liste de clients répondant a certains critères, autrement dit elle cible certains profils de clients. Cette liste permet aux conseillers commerciaux de contacter leurs clients pour un motif précis, en l’occurrence celui lie a l’action marketing en question. Par exemple, un responsable peut faire une demande de marketing afin de mener une action pour vendre des plans d’épargne logement dans l’agence Annonay suite à un retard sur les objectifs à atteindre pour ce produit. Auparavant, la gestion des demandes de marketing local se faisait de façon manuelle, via des fiches de liaison papier, transmises par fax pour la validation de niveau hiérarchique en niveau hiérarchique. Une fois les accords successifs des différents niveaux hiérarchiques d’un point de vue commercial, un accord de faisabilité devait être donne par le Pole Outils et Méthodes de la direction d’exploitation, qui réalisait le ciblage si c’était possible. Ce fonctionnement posait un certain nombre de problèmes, au-delà du fait qu’il n’était pas pratique. Tout d’abord, il y avait parfois un problème au niveau des informations données pour la demande. En effet, le modèle de fiche de liaison «officielle» avait évolue, mais il subsistait différentes versions utilisées dans le réseau commercial, versions non conformes aux attentes pour la réalisation du ciblage. De plus, comme ces demandes étaient formulées sur un support papier, la recherche d’informations était trop couteuse en temps et en ressources humaines donc inefficace. En outre, il n’y avait pas de suivi des résultats commerciaux lies à cette demande. Ainsi, si la demande n’était pas relayée au niveau des conseillers, on ne pouvait que constater après la fin de l’action que celle-ci n’avait pas donne de bons résultats commerciaux. Enfin, ne disposant pas d’un système informatise, il était très difficile, voire impossible, d’analyser les demandes elles-mêmes et donc de capitaliser les connaissances acquises lors des précédentes demandes. Cette collaboration industrielle et les problèmes concrets que nous avons été amenés à résoudre ont fait émerger deux types d’objectifs : des objectifs lies à un travail d’ingénierie et d’autres relevant d’un travail de recherche. En effet, il était nécessaire d’apporter une solution pour la gestion des demandes marketing en disposant d’un système informatise qui permette de gérer l’ensemble du processus lie a celles-ci : de l’acquisition de la demande, a l’analyse des résultats, en passant par la validation hiérarchique. Préalablement, nous avons réalisé une étude conséquente de l’existant et des besoins utilisateurs en exploitant différents moyens (observation, interview et enquête), afin de déterminer le cahier des charges a satisfaire. En faisant émerger les besoins réels et en fournissant une réponse a ces besoins, nous nous assurions de l’adhésion future des utilisateurs au système qui serait développe. L’objectif en termes d’ingénierie a été atteint dans la mesure où LCL dispose aujourd’hui d’une plateforme dédiée, que nous avons développée, nommée MARKLOC. Cette plateforme est supportée par une base des demandes marketing que nous avons conçue et créée, ainsi qu’un processus de flux de travail que nous avons implémente pour assurer le suivi de la chaine de validation et de réalisation. Cette plateforme fait partie intégrante de l’intranet de la DE Rhône-Alpes Auvergne et est utilisée quotidiennement par les responsables commerciaux des différents ni- veaux hiérarchiques pour différentes raisons : émission de demandes, validation de demandes, suivi de résultats commerciaux lies a une demande, etc. Nous reviendrons plus en détails sur les différents aspects techniques de cette plateforme dans le chapitre 8. Par la suite, notre objectif était de proposer un système décisionnel qui aide LCL à analyser efficacement ces demandes de marketing local, pour permettre une capitalisation des connaissances. Pour atteindre cet objectif, différentes sources de données hétérogènes et autonomes potentiellement intéressantes étaient a notre dis- position, dont la base des demandes marketing que nous avons conçue. Il était donc nécessaire d’avoir recours a un processus d’intégration de données dédie a l’analyse. Nous avons donc conçu un entrepôt de données en fonction des sources dont nous disposions et des besoins d’analyse que nous avions identifies. Une des caractéristiques phares de la modélisation des entrepôts est l’historisation des données. Les schémas multidimensionnels classiques permettent de garder effectivement trace de l’historique des faits, de leur évolution, grâce a une dimension Temps. Paradoxalement, ils s’apprêtent mal a prendre en compte les changements pouvant être opérés sur les dimensions, aussi bien du point de vue de leurs données, que de leur structure. Ceci est du a l’hypothèse d’orthogonalité des dimensions qui est généralement faite [EK01]. Ainsi faire l’hypothèse que chacune des dimensions est orthogonale a la dimension Temps signifie faire l’hypothèse que chacune des dimensions est temporellement invariante. Néanmoins, cette hypothèse n’est pas vérifiée dans la pratique puisque l’évolution de la structure et des données des dimensions est bien réelle. En effet, des produits apparaissent ou disparaissent, les structures organisationnelles se modifient, de nouveaux clients arrivent, certains partent et pour d’autres clients, leurs caractéristiques peuvent être modifiées (statut familial, pouvoir d’achat, etc.). Cette évolution des dimensions est due a l’évolution des sources de données d’une part et a celle des besoins d’analyse d’autre part, comme c’est le cas chez LCL. En premier lieu, les sources de LCL évoluent. En effet, LCL est un établissement au sein duquel se produisent de nombreux changements, parmi lesquels des changements organisationnels. Par exemple, en juin 2003 s’opérait le rachat par le groupe Crédit Agricole SA. S’en suivait quelques années plus tard une réorganisation complète de la structure commerciale que l’on retrouvait dans les sources de données de LCL. En second lieu, les besoins d’analyse peuvent eux-mêmes évoluer. De nouveaux besoins peuvent émerger, en réaction a l’évolution des données par exemple, ou tout simple- ment parce que les utilisateurs ont des besoins qui n’avaient pas été recenses lors de la conception de l’entrepôt de données et parce qu’il est difficile de prédire les besoins a venir. LCL est un établissement regroupant des employés exerçant divers métiers et ayant donc des besoins d’analyses varient. Ainsi, de nouveaux besoins individuels peuvent émerger.

Les sources de données, tout comme les besoins d’analyse ne sont pas figes dans le temps. Etant donne que le schéma de l’entrepôt est conçu en fonction des sources de données disponibles et des besoins d’analyse, qu’advient-il de ce schéma lors de leur évolution ? C’est dans ce contexte que nous nous sommes intéressés a la problématique de l’évolution de schémas dans les entrepôts de données.