III.3.2. Polysémie et « double sens »

Le publicitaire utilise la polysémie pour transmettre une double information. Avec cette expression implicite et discrète, l’objectif du publicitaire est de stimuler l’imagination des lecteurs. Comme le dit Catherine Kerbrat-Orecchioni, « on a donc plusieurs signifiés pour un seul et même signifiant, mais la formule est ambiguë: un seul signifiant, cela peut vouloir dire : deux ou plus occurrences d’un même signifiant, un seul mot-type, plusieurs mots-occurrences 54 Voyons quelques exemples :

爱打才会赢 (publicité pour la filiale du Guangdong de Telecom Chine)
[ai da cai hui ying]
(Qui aime téléphoner peut gagner)

Telecom Chine se développe rapidement. Une grande variété de promotion de services de Telecom est fréquemment lancée à l’échelle nationale. Ici, le slogan est proposé par la filiale du Guangdong de Telecom Chine, son objectif étant d’encourager ses clients à profiter de cette promotion de services.

En chinois, le verbe 打« Da » (frapper) s’emploie dans beaucoup d’expressions. Par exemple, 打牌 « Da pai » (jouer aux cartes), 打扰 « Da rao » (déranger), 打听 « Da ting » (se renseigner), 打字« Da zi » (dactylographier), 打电话 « Da dian hua » (téléphoner), Da bi sai « 打比赛» (faire un match), etc.

Dans la publicité étudiée ici, le rédactionnel a bien fait un jeu de mots en profitant du double sens du verbe « Da » (jouer, téléphoner). En chinois, le caractère « Da » est polysémique. En d’autres termes, le premier sens de ce slogan signifie que plus on joue au football, plus on a de chances de gagner. Le second sens est plus on téléphone, plus on économise.

Hmm, la Noblesse a du goût ! (Publicité pour Hippopotamus)
Un bon morceau de beefsteak grillé estampillé Charolais.

Premier sens :

Le charolais est une race de bœufs élevés dans les prés de la région du Charolais (au centre de la France) et un symbole de tradition, de naturel et d’excellence de qualité.

Second sens :

Le second sens joue sur le bon goût réputé de la noblesse, c'est-à-dire l’art de vivre avec élégance et raffinement et donc de savoir « de naissance » ce qui est bon.

La chaîne de restaurants Hippopotamus, comme on le sait, est spécialisée dans les viandes de bœuf. Sa publicité joue sur un double sens :

La Noblesse: 1) la viande est noble, c'est-à-dire d’origine garantie. Ce qui est exprimé par l’estampillage d’une couronne. 2) Elle a un goût excellent, c’est une viande pour les gens de qualité. Surtout, le restaurant Hippopotamus est pour les gens de qualité.

Le goût : 1) la viande est goûteuse, 2) ceux qui en consomment se sentent nobles et ainsi se distinguent des gens du peuple.

Le terme « Charolais » surmonté d’une couronne à laquelle fait écho le terme « noblesse » atteste la place prestigieuse de la chaîne de restaurants veut occuper dans son domaine. La couronne fait ici une référence à la noblesse. Dans la lecture de cette publicité, le premier regard est pour la viande, le second pour « noblesse ». En deux coups d’œil, la liaison est faite. Mais l’élément iconographique le plus important est le petit hippopotame qui tient une fourchette et porte un bonnet phrygien : l’image classique du révolutionnaire, du sans-culotte, de 1789.

Le message est donc clair: l’homme du commun, le sans-culotte, vaut bien le noble puisqu’il peut manger la même viande que lui : c’est une idée révolutionnaire qui se réalise. Par ailleurs, le terme « noble » dans le domaine de la boucherie a un sens supplémentaire : « les morceaux nobles » par opposition aux « bas morceaux » désignent les parties de l’animal qui ont le plus de valeur gustative.

Notes
54.

Kerbrat-Orecchioni. Catherine, La connotation, Presses Universitaires de Lyon, 1997, p. 140.