2 - Joseph Duplain de Sainte-Albine ou le marchand d’argent
Nous avons reconstitué cette période à l’aide des articles écrits par Joseph-Benoît de Sainte-Albine dans ses journaux, les Lettres au Comte de B*** puis le Courrier extraordinaire ou le premier arrivé. Parallèlement, il a publié des textes d’humeur portant sur des sujets qu’il désirait fait connaître au grand public ou bien pour dénoncer les injustices dont il a été victime : Lettre de M. de Sainte-Albine à M. le Comte de V*** (1789) ; Anecdote sur M. Le Noir, qui donnera une idée de la manière dont les anecdotes sont traitées dans les Lettres à M. le Comte de B*** (1787) ; Lettre de M. de Sainte-Albine, ancien maître-d’hôtel du roi, à messieurs ses concitoyens (1789) ; Projet d’une banque nationale à établir en France, par M. de Sainte-Albine (1789) ; A nos augustes représentans (sd) ; Mémoire de Joseph Duplain à l’Assemblée nationale : transport des assignats (1791). Enfin, nous avons étudié les cinquante pages du procès-verbal de l’inventaire des pièces qui ont été saisies chez Joseph Duplain au moment de son arrestation en 1792 1057 (voir un extrait du document pages suivantes).
En arrivant à Paris en 1784, Joseph use, dans un premier temps, de l’hospitalité de son cousin Pierre-Jacques, cour du Commerce 1058 . Sa famille semble demeurer à Lyon dans l’appartement de la rue Royale, c’est là que naît son premier fils, Benoît-Alexandre-Genest, le 27 juin 1784 1059 . Plus tard, il s’installe rue de Vaugirard dans le quartier de Saint-Sulpice 1060 . L’arrivée de sa jeune femme à Paris, sa charge de Maître d’hôtel du roi, attirent dans leur maison de nombreux « amis ». Comme à Lyon, semble-t-il, le couple mène grand train de vie. L’abbé Duret signale dans ses Cahiers en 1781, que « M. Duplain a acheté 10 000 ânées de vin 1061 de Languedoc à 1 livre, ce qui [fait] 100 000 livres » 1062 (ou mieux près de vingt mille litres), une telle quantité ne relève pas de la seule consommation familiale ! Joseph déclare en 1789, « Vous me demandez, M. Le Comte, à quoi je m’occupe à Paris… J’ai conservé sur la foule d’amis qui assiégieoit ma maison… » 1063 , ce qui laisse supposer un train de vie très aisé les années précédents la Révolution. Il reconstitue un réseau de lyonnais, devenus parisiens comme lui, dont l’activité principale se fait autour de l’agiotage. Une partie de sa fortune se trouvant en portefeuille, il se lance dans la « Carrière des fonds publics » 1064 avec autant de fougue et d’énergie qu’il a su en produire lors de ses activités précédentes.
Comme beaucoup d’hommes d’affaires, il se trouve mêlé, de près pour ce qui le concerne, aux transactions des « Actions de la compagnie des Indes ». Et comme il a son mot à dire « sur tout », il suggère des théories économiques. Nous avons reconstitué les quelques années qui séparent Joseph de son départ de Lyon, des débuts de la Révolution. Elles ne vont être que rebondissements financiers, entre victoires et défaites, entre optimisme et dépression.
