A. La mise à distance du ministère de l’Équipement

Nous avons montré, dans le premier chapitre, combien le ministère de l’Équipement et son principal corps d’encadrement étaient fragilisés par les évolutions de l’action publique. Le diagnostic du déclin est partagé, nous l’avons vu, par les ingénieurs des Ponts et Chaussées interrogés, dont les récits déplorent la situation actuelle, notamment au regard d’un « âge d’or » antérieur aux lois de décentralisation. Si le diagnostic semble faire consensus, l’analyse de la situation et les solutions avancées pour y remédier présentent des nuances lourdes de sens quant à la vision des rapports que le corps des Ponts et Chaussées serait censé entretenir avec le ministère de l’Équipement. Source de légitimité, le lien privilégié entre ce Ministère et les ingénieurs des Ponts et Chaussées est rarement remis en cause de manière radicale par les hauts fonctionnaires du corps. Les évolutions subies par le ministère de l’Équipement constituent néanmoins une ressource argumentative pour son association professionnelle, dont les responsables et les membres actifs défendent l’autonomisation des ingénieurs des Ponts et Chaussées. Arguant du contexte de déstabilisation de « la tutelle », ils encouragent une prise de distance du corps par rapport à l’État et prônent la multiplication de ses points d’ancrage professionnel, notamment dans le secteur privé.