Discussion

Comparaison des performances des participants normo-lecteurs et des participants dyslexiques

Performances de reconstruction

Nous avons comparé les performances de reconstruction des participants dyslexiques (expériences 2a et 2b) à celles des participants normo-lecteurs (expériences 1a et 1b). Nous avons introduit un nouveau facteur, à savoir le Type de participant, dans nos analyses. En moyenne, les normo-lecteurs obtenaient de meilleures performances que les dyslexiques (F1(1, 98) = 33.98 ; p < .0001). Les différences de pourcentages de reconstruction variaient entre 0 % et 5.4 % selon le type d’inversion considéré. Pour des inversions croissantes les normo-lecteurs obtenaient des scores de 97.29 %, 79.65 %, 50.81 %, 2.88 % et 1.81 % de reconstruction correcte et les dyslexiques des scores de 94.67 %, 75.06 %, 45.4 %, 2.81 % et 1.92 % (Figure 18).

Figure 18 : Effet du type d’inversion sur le pourcentage de reconstruction correcte de mots et de pseudomots chez les dyslexiques et les normo-lecteurs

Nous avons observé une interaction significative entre le Type de participant et l’Inversion (F1(4, 392) = 12.57 ; p < .0001). Des comparaisons spécifiques ont montré que les performances étaient significativement différentes entre dyslexiques et normo-lecteurs pour les inversions I0 (F1(1, 98) = 18.48 ; p < .0001), I0.5 (F1(1, 98) = 13.27 ; p < .001) et I1 (F1(1, 98) = 39.27 ; p < .0001), mais pas pour les inversions I1.5 (F1(1, 98) < 1 ; n.s.) et I2 (F1(1, 98) < 1 ; n.s.).

Globalement, les scores de reconstruction des normo-lecteurs étaient supérieurs à ceux des dyslexiques quel que soit le type d’item (pour les conditions I0, I0.5 et I1). Pour la condition I0.5 par exemple, les normo-lecteurs reconstruisaient les items à 79.65 % contre 75.06 % pour les dyslexiques. Cela montre qu’à distorsion égale, les dyslexiques étaient plus perturbés que les normo-lecteurs pour effectuer la tâche. Pour la condition I1, les scores de reconstruction se situaient au dessus de 50 % pour les normo-lecteurs, ce qui signifie qu’ils parvenaient parfois à reconstruire cette première syllabe même si elle était entièrement distordue. Pour cette même condition, les dyslexiques ont obtenu un score de 45.4 % ce qui signifie que la première syllabe en moyenne n’était pratiquement jamais reconstruite, de plus il arrivait que la deuxième syllabe ne soit pas non plus rapportée, bien qu’elle ne fut pas dégradée. Au-delà d’une syllabe dégradée, les scores de restitution ne variaient pas significativement entre dyslexiques et normo-lecteurs, les performances s’effondraient (en dessous de 3 % pour les deux catégories de participants) ce qui montre qu’au-delà d’une syllabe dégradée, il n’était pas possible de reconstruire l’item, ni même la deuxième syllabe qui n’était pourtant que partiellement dégradée. Cet effet montre le rôle important de la syllabe pour les processus de compréhension de la parole en français à la fois pour les systèmes cognitifs normo-lecteurs et dyslexiques.