4.2.2. Les potentiels de surface

Enregistrement de l’activité neurale

On sait depuis les travaux de Jewett (1970), qu’il est possible de détecter au niveau du scalp l’activité électrique de populations de neurones situés à une distance considérable du point d’enregistrement (potentiels de champs lointains). Les mesures effectuées en électroencéphalographie (EEG) permettent de répondre de manière non invasive à la question « quand et où » se déroulent les étapes de traitement de l’information dans le cerveau (Wood, 1993), grâce à leur excellente résolution temporelle. Une stimulation sonore provoque l’activation successive et/ou simultanée des différentes structures anatomiques du système sensoriel auditif. Le champ électrique ainsi créé se transmet par conduction passive jusqu’au scalp, à travers les volumes de conduction représentés par le tissu cérébral, le liquide céphalo-rachidien, l’os et le scalp. Il est alors possible de recueillir cette réponse sur le scalp sous la forme d’une différence de potentiel à l’aide d’électrodes Ag-AgCl plus ou moins nombreuses.Le potentiel est mesuré en montage monopolaire par rapport à celui d’une électrode de référence (peu ou pas contaminée par le champ de potentiel créé par les sources intra-cérébrales), l’acquisition du signal étant synchronisée avec le début de la stimulation. Les potentiels reflètent l’activité des voies auditives localisées entre les électrodes et la référence.

Les potentiels recueillis sur le scalp correspondent à la superposition de champs électriques générés essentiellement par les courants synaptiques des neurones actifs. Si les synapses sont excitatrices, la perméabilité membranaire aux cations extracellulaires est augmentée. L’entrée de ces ions à l’intérieur de la cellule modifie le potentiel transmembranaire créant un puits de courant au niveau de la membrane post-synaptique et une source locale lorsqu’il ressort plus loin formant ainsi une boucle. Dans le cas où les synapses sont inhibitrices, le phénomène inverse se produit. Ce mécanisme est illustré par la Figure 47. L’EEG correspond à des potentiels électriques macroscopiques qui résultent de la sommation des effets sur les milieux conducteurs des puits et des sources de courant émanant de quelques millions à dizaines de milliards de neurones recouvrant une surface de l’ordre du cm². L’amplitude et la latence du potentiel sont fonction de la distance entre les électrodes de recueil et le dipôle crée par l’influx nerveux : plus le dipôle sera éloigné, plus l’amplitude sera faible et la latence tardive. L’amplitude de la réponse dépend également de l’angle formé par le dipôle avec la surface du scalp : si l’angle est de 90°, le potentiel sera nul.

Figure 47. A. Schéma d’une synapse excitatrice. L’ouverture des canaux ioniques provoque le passage des ions Na
Figure 47. A. Schéma d’une synapse excitatrice. L’ouverture des canaux ioniques provoque le passage des ions Na+ et l’apparition des lignes de courant. Vu du milieu extracellulaire, la membrane se comporte alors comme un puits de courant. B. Schéma d’une synapse inhibitrice. Les canaux H+ et Cl- s’ouvrent. Le courant passe en sens inverse par rapport à la synapse excitatrice. La membrane se comporte comme une source de courant.

Au moment de l’acquisition, le signal électrophysiologique passe par une chaîne d’amplification qui comporte des filtres analogiques passe-haut (élimine les variations lentes, telles que les mouvements du sujet, la polarisation des électrodes) et passe-bas (réduit les phénomènes électriques de haute fréquence comme le bruit de fond des amplificateurs, les artéfacts musculaires). La réponse évoquée est par la suite extraite du bruit de fond et des artéfacts d’origines diverses (muscles, mouvements oculaires, 50 Hz du secteur, etc.) par la technique du moyennage. Un filtrage numérique plus étroit que le filtrage analogique permettra de réduire le bruit résiduel (de haute fréquence), le choix des fréquences de coupure se faisant en fonction du signal que l’on veut conserver.