1. Effet de la surdité totale sur l’organisation tonotopique corticale à J0

1.1. Objectif

Moxon a montré en 1971 que les neurones de type I perdent leur spécificité fréquentielle lorsqu’il n’y a pas de biomécanique cochléaire. Par ailleurs, une stimulation séquentielle des électrodes depuis la base de la cochlée jusqu’à l’apex ne résulte pas toujours en une diminution monotone de la fréquence perçue et il peut y avoir des inversions (par exemple : Busby et coll., 1994 ; Collins et coll., 1997 ; Shannon, 1983a ; Townshend et coll., 1987). Il est donc très probable que cet effet de la surdité à la périphérie se répercute au niveau central et que les neurones du cortex auditif perdent également leur spécificité fréquentielle. Cependant, s’il a été montré qu’une surdité sensorielle partielle et une surdité de transmission entraînent une modification des cartes tonotopiques corticales chez l’animal (par ex., Robertson & Irvine, 1989) et chez l’humain (Dietrich et coll., 2001; Tecchio et coll., 2000; de Campora et coll., 2003), on sait très peu de chose sur les effets d’une surdité totale sur l’organisation corticale. Les résultats sont en effet contradictoires chez l’animal. Alors qu’Hartmann et coll. (1997) montrent qu’il reste une organisation tonotopique rudimentaire dans le cortex de chats adultes sourds congénitaux, Raggio & Schreiner (1999) ont trouvé que les chats adultes sourds depuis peu ont une tonotopie altérée et que les chats rendus sourds à la naissance ont peu voire pas de tonotopie corticale. L’objectif de cette étude est donc de voir si le cortex auditif de personnes ayant une surdité totale possède une organisation tonotopique dans les premiers jours où l’implant est utilisé. L’organisation de la composante N1 des potentiels évoqués auditifs corticaux a été étudiée selon le même protocole que Verkindt et coll. (1995) avaient utilisé chez le normo-entendant.