2. Modifications liées au positionnement du faisceau dans la cochlée

2.1. Introduction

Le raccourcissement des latences des ondes IIIe et Ve observé pour une stimulation plus apicale de la cochlée pourrait être dû au fait que le faisceau est généralement plus proche du modiolus à l’apex, où la cochlée a un diamètre plus étroit. On ne sait pas si la position du faisceau d’électrodes dans la cochlée peut avoir un effet sur les latences des PEEPs. Si tel était le cas, le gradient baso-apical des latences ne reflèterait pas seulement une anatomie différente le long de la cochlée comme nous l’avons montré dans la partie précédente. Il pourrait également être dû au fait que la partie basale de la cochlée est activée un peu plus tardivement que la partie qui se trouve en regard des électrodes plus apicales qui sont plus proches du modiolus. On se propose donc d’étudier l’effet de la position du faisceau d’électrodes sur les latences des potentiels du tronc cérébral en comparant les latences de sujets porteurs d’un positionneur avec celles de sujets qui n’en ont pas. Le positionneur (Electrode Positionning System, EPS ; Kusma & Balkany, 1999 ; Fayad et coll., 2000) est une partie de l’implant en silicone effilée vers l’apex et qui se place derrière le faisceau d’électrodes. Il est conçu de façon à ce que sa surface latérale convexe épouse la forme de la paroi latérale de la cochlée et que sa surface médiale qui est concave, épouse la forme du faisceau de l’implant. Son rôle est de positionner le faisceau plus proche du modiolus de la cochlée et ainsi des dendrites afférentes primaires des cellules du ganglion spiral (Yang et coll., 2000).

Des recherches ont été menées sur l’influence de la position du faisceau d’électrode par rapport au modiolus sur les données psychophysiques. Certaines études montrent que lorsque le faisceau est proche du modiolus, les seuils psychophysiques sont réduits chez l’enfant (Young & Grohne, 2001; Donaldson et coll., 2001) et chez l’adulte (Kawano et coll., 1998 ; Eisen & Franck, 2004 ; Franck et coll., 2001 ; Kreft et coll., 2004 ; Parkinson et coll., 2002), alors que d’autres ne trouvent pas d’effet de la distance du faisceau par rapport au modiolus sur les seuils (Boëx et coll., 2003 ; Hughes & Abbas, 2006). Des seuils psychophysiques bas auraient pu refléter le fait qu’un plus grand nombre de neurones réponde, un facteur qui contribue à raccourcir les latences des PEEs (Rattay, 1987), lorsque le faisceau est proche du modiolus. Cependant, les résultats concernant le comportement des seuils psychophysiques en fonction de la position du faisceau sont contradictoires et ne permettent pas de supposer un effet de la distance du faisceau par rapport au modiolus sur les latences des PEEs. Par contre, il a été montré que les seuils des PEEs baissent lorsque le faisceau est plus proche du modiolus (Shepherd et coll., 1993 ; Firszt et coll., 2003), ce qui est compatible avec les modèles cochléaires de Frijns et coll. (2001) et Hanekom (2001). De plus, l’amplitude de l’onde Ve augmente lorsque l’on insère un positionneur en per-opératoire chez l’enfant (Wackym et coll., 2004) et chez l’adulte (Firszt et coll., 2003). Il est par conséquent fort probable que la distance entre le faisceau et le modiolus a également un effet sur la latence des PEEPs.