1.2. Mise en évidence de l’existence de cartes tonotopiques corticales

Résumé

“Evidence of a tonotopic organization of the auditory cortex in cochlear implant users”

Jeanne Guiraud, Julien Besle, Laure Arnold, Patrick Boyle, Marie-Hélène Giard, Olivier Bertrand, Arnaud Norena, Eric Truy, Lionel Collet

On a vu (Chapitre 2) que la surdité totale entraîne une réorganisation des cartes tonotopiques du cortex auditif humain. On ne sait pas cependant si ces cartes redeviennent semblables à celles des normo-entendants une fois l’audition réhabilitée par l’utilisation d’un implant cochléaire. Nous avons donc cherché à mettre en évidence l’existence éventuelle de cartes tonotopiques en utilisant le même protocole que Bertrand et coll. (1991) et Verkindt et coll. (1995) chez les normo-entendants. Treize sujets avec au moins trois mois d’expérience de l’implant cochléaire ont participé à l’étude. Les potentiels évoqués tardifs ont été enregistrés en réponse à des impulsions de courant délivrées sur les électrodes 3, 7, 11, et 15. Aucun effet de l’électrode de stimulation n’a été trouvé sur les latences des ondes N1, ce qui confirme les résultats de l’étude précédente (partie 1.1.). L’analyse topographique de la composante auditive N1 (environ 85 ms de latence) a montré que la position sur le scalp et les amplitudes en fronto-central et en mastoïde diffèrent selon l’électrode stimulée. Cela suggère que différents ensembles de neurones sont activés par différentes fréquences de stimulation. La modélisation des dipôles a permis de confirmer une orientation fréquence-dépendante de ces sources dans les aires temporales. Cela pourrait montrer que la stimulation de différentes électrodes génère l’activation de zones proches mais distinctes dans le cortex auditif. Une comparaison avec les données des normo-entendants utilisées par Chantal Verkindt (Verkindt et coll., 1995) montre que l’organisation corticale des implantés cochléaires est similaire à la tonotopie trouvée chez les normo-entendants. Il existe cependant quelques différences liées au fait que la stimulation électrique diffère de la stimulation acoustique. Une corrélation a été trouvée entre l’amplitude maximale du pic N1 en fronto-central, qui varie en fonction de la fréquence de stimulation, et les valeurs données par les sujets à un test d’échelonnage de fréquence. La perception qu’ont les implantés cochléaires de la tonie dépend ainsi probablement de la façon dont les fréquences sont codées dans le cortex auditif.