iii. Peuple et foule, Peuple et populisme, nation et nationalisme, origine d’un rejet d’une formule jugée xénophobe.

Au tournant du XXe siècle , les travaux de Le Bon sur la psychologie des foules marquent fortement les esprits. Trois dimensions sont prises en compte : la force des réactions spontanées de la populace, mais aussi leur dangerosité, et enfin la possibilité que ces réactions violentes soient manipulées. De fait, les régimes totalitaires recourront sans surprise aux spectacles de foule, genre redoutablement efficace parce que festif et abolissant la frontière entre spectateurs et acteurs, et susceptible donc d’imprégner fortement les esprits d’une idéologie. Le théâtre national populaire saura lui aussi puiser dans cette ressource pour fédérer la nation française en un spectacle de communion, de Gémier à Chancerel. Ce qui en retour, incite à s’interroger sur les liens entre l’idéologie véhiculée par les chantres du théâtre populaire à certaines époques, et une certaine dérive du populaire en populisme nationaliste. Le « peuple » peut en effet en dernier lieu renvoyer à la nation considérée dans sa dimension non pas inclusive (l’ensemble de la communauté des citoyens) mais exclusive (les Français et non les étrangers, les catholiques et non les juifs). L’histoire du XXe siècle, et particulièrement celle de l’antisémitisme, va rejaillir en effet sur celle du théâtre populaire, et c’est ce qui explique nous allons le voir les attaques que subissent régulièrement depuis les années 1970, et aujourd’hui encore, ceux qui se réclament du « théâtre populaire national de service public », la référence au cadre de la nation évoquant à jamais pour beaucoup le spectre du nationalisme xénophobe et antisémite.