b. La Vie de Galilée, testament politique d’Antoine Vitez.

L’orthodoxie brechtienne va se trouver fortement mise en question à la fin des années 1980, et Vitez s’inscrit dans cette « volonté iconoclaste à l’égard de Brecht, [dans ce] désir de polémique contre la scolastique pseudo-brechtienne. » 1389 Le théâtre français s’éloigne de Brecht, du fait du climat culturel national mais aussi du fait de Brecht lui-même, selon Vitez :

‘« Extrêmement préoccupé par le maintien rigoureux de l’esthétique attachée au Berliner Ensemble, il a écrit un livre-modèle auquel on doit se conformer, qui lui semblait exprimer exactement sa pensée. Il est responsable de ce qui est arrivé à sa mémoire, de la sclérose du Berliner Ensemble. Il a bloqué l’imagination. » 1390

Contre ce qu’il considère être un dogmatisme de l’œuvre, Vitez prône une interprétation totalement décomplexée de tout souci de fidélité, voire une mise en scène qui ne recule pas devant l’interprétation psychanalytique, et entend faire jaillir l’inconscient idéologique de Brecht : « Brecht voulait qu’on ne puisse qu’exécuter son œuvre ; il pensait qu’elle était suffisamment explicite pour qu’on n’ait qu’à l’interpréter. Et pourtant, l’inconscient se glisse bien à quelques endroits, et Brecht dit bien d’autres choses que celles qu’il croyait dire. »  1391

Notes
1389.

Antoine Vitez, « L’Héritage brechtien », entretien, Théâtre / Public n°10, 1976, p. 19.

1390.

Antoine Vitez, in Colette Godard, « Ce communisme blessé. Entretien avec Antoine Vitez », Le Monde, 1er mars 1990.

1391.

Antoine Vitez, in Jacques Kraemer et A. Petitjean, « Lecture des classiques. Entretien avec Antoine Vitez », Pratiques, n°15/16, juillet 1977, p. 46.