1. Kumulus, ou la violente douceur de la refondation d’une communauté sensible dans le théâtre de rue.

Parce qu’il se situe dans l’espace public, le théâtre de rue permet à la fois de conquérir un autre public que celui sclérosé et minoritaire du théâtre de salle, et de redonner sens à l’espace urbain, dans une société de plus en plus marquée par la privatisation de l’espace public et par la désagrégation des liens sociaux, ces deux phénomènes contribuant à la disparition du bien commun, de ce qui rassemble et fonde la communauté politique. Nous avons également pu mesurer dans notre premier chapitre combien cet enjeu actuel du théâtre de rue se trouve, sinon en contradiction, du moins en tension avec un autre, hérité de sa jeunesse soixantuitarde. Les frottements entre la mission de rassemblement de la communauté théâtrale et politique et l’ancienne et renouvelée vocation contestataire du théâtre de rue se manifestent nous l’avons vu au niveau des subventions et des commanditaires. Reste à voir à présent leurs manifestations esthétiques, c’est pourquoi nous souhaitons à présent reprendre et creuser l’exemple précédemment évoqué de la compagnie Kumulus, l’une des premières grandes compagnies de théâtre de rue, dont la date de création, 1986, coïncide peu ou prou avec le début de la période qui nous occupe.