4–La démarche méthodologique

4–1 L’intérêt d’une étude comparée des conflits proche-oriental et nord-irlandais

Nous avons choisi de procéder à une étude comparative. Nous nous sommes intéressés plus précisément à cette région où l’importance stratégique de la couverture médiatique est perceptible. Même si le conflit israélo-palestinien peut constituer à lui seul un objet d’étude suffisant, il nous a semblé pertinent d’utiliser le principe de la comparaison. Ainsi, en partant du cas israélo-palestinien, nous souhaitons, en le comparant à un autre conflit, non pas faire une généralité en terme de représentations médiatiques, mais dessiner une tendance dans les relations déjà existantes – mais sans cesse fluctuantes – entre médias / opinion publique / acteurs d’un conflit.

Une fois ce premier élément de notre comparaison déterminé, il nous fallait en sélectionner un second. Le conflit nord-irlandais nous a semblé pleinement correspondre à notre intention de recherche pour les raisons évoquées au début de notre introduction. Les points de similitude entre les deux conflits sont donc partie intégrante de ce choix mais si l’Ulster a eu définitivement notre préférence sur la Yougoslavie, c’est parce que durant les années quatre-vingt la seule « image » que nous ayons eu du conflit nord-irlandais fut celle d’une vision profondément manichéenne de la société nord-irlandaise : celle d’une société dite « civilisée », représentée par l’Angleterre et les Protestants de l’Ulster, opposée à une société réactionnaire composée de la population catholique de l’Ulster et des « terroristes », raccourci médiatique pour désigner les soldats de l’IRA. Ce choix n’est aucunement motivé par le désir de réparer une « injustice » médiatique, il ne nous appartient pas d’ailleurs de juger ici si tel fut le cas ; il participe plutôt du souhait de mieux comprendre un conflit qui nous est proche et lointain en même temps. Proche, car c’est une démocratie européenne et lointain, car le conflit nord-irlandais semble s’ancrer dans un affrontement archaïque (représenté médiatiquement par l’opposition entre Catholiques et Protestants), en marge du processus européen moderne.

Pour le conflit israélo-palestinien, la Palestine, au début du siècle dernier, constituait un enjeu majeur pour les Anglais et les Français, les accords Skyes Picot en 1916 ayant partagé la Palestine entre les deux pays. L’affaire de l’Exodus 28 en 1947 lie la France de l’après-guerre à Israël et mobilise l’opinion française en faveur des émigrés juifs. Côté palestinien, la France se doit stratégiquement, au sortir de la guerre d’Algérie, d’asseoir sa position au Proche-Orient et au Moyen-Orient, et choisit notamment avec François Mitterrand de tendre la main à Yasser Arafat. Ces raccourcis historiques que nous faisons ici montrent la forte résonance du conflit israélo-palestinien ; résonance qui justifie le choix de l’analyse de ce conflit.

Notes
28.

Voir en annexe 1 le résumé de l’affaire Exodus, p. 475.