Chapitre 4 – Médias et Etat en temps de crise

Ce chapitre envisage les rapports, souvent « tendus », qui lient les médias et l’Etat en temps de crise. Avant cela, nous souhaitons revenir sur les notions d’espace public et d’opinion publique, pour rappeler quelques enjeux propres à la société contemporaine.

Ensuite, nous nous interrogerons sur la manière dont logiques étatiques et médiatiques se répondent, tant en Israël qu’en Irlande du Nord. Nous avons spécifié, dans le chapitre précédent, la particularité des conflits étudiés ; par le terme d’Etat, nous qualifierons le gouvernement israélien et le gouvernement britannique (jusqu’en 1999) ; ensuite, il convient de rappeler que l’Ulster a désormais un gouvernement semi-autonome : l’expression Etat pour les événements mentionnés au-delà de 1999 désignera donc les deux entités. Nous écrirons donc le gouvernement britannique et le gouvernement d’Ulster, lorsque nous voudrons les distinguer. Cette précision nous semble essentielle, car il ne faut pas oublier que, même si le gouvernement nord-irlandais, détient les pouvoirs exécutif et législatif, Londres conserve ses attributions en matière de budget, de sécurité publique et de monnaie. Cela ne laisse donc pas les mains libres à l’institution nord-irlandaise en matière de répression de la violence terroriste. Notons également que cette autonomie gouvernementale est susceptible d’être levée en cas de crise aiguë, comme ce fut le cas en août 2000 et en octobre 2002 (jusqu’en 2007).

Enfin, nous envisagerons, ponctuellement, sous la dénomination de « gouvernement » l’Autorité palestinienne afin de la distinguer des factions paramilitaires auteurs des attentats et ne pas faire d’amalgame.

Ces éléments précisés, nous voulons à présent envisager les différentes attitudes de l’Etat face aux médias dans la crise en gardant à l’esprit la nouveauté de l’un d’eux dans ces relations : internet. Trois points, complémentaires à certains égards, seront ici développés : la thèse de la diffusion du discours dominant par les médias et de leur auto-responsabilisation, la thèse d’un balancement constant des médias entre dépendance et autonomie discursive, et enfin une « troisième voie » qui est celle de la pensée orthodoxe. Nous verrons de quelles manières ces théories s’appliquent ou se sont appliquées aux conflits nord-irlandais et israélo-palestinien et, surtout, quels enjeux stratégiques en matière de représentations symboliques et de lien social elles sous-tendent dans une société démocratique.