L’état des lieux des rapports entre Etat et médias en temps de crise conduit à envisager ceux-ci sous l’angle non plus forcément d’une censure ouverte, sauf cas d’urgence extrême comme ce fut le cas aux Etats-Unis à la suite des attentats du 11 septembre 2001, mais sous celui d’une coopération induite au nom de l’ordre public.
Un article du Monde (24/06/2002) montre que cette thèse est loin d’être impertinente : « Les Israéliens sont en colère contre CNN et la BBC qui, selon eux, véhiculent des propos anti-israéliens et encouragent le terrorisme. Le ministre des Télécommunications, Ruben Rivlin, s’était même déclaré prêt, hier, à accepter que ces deux chaînes de télévision soient, en raison de reportages jugés biaisés, privés de leur créneau […]. Saisissant la balle au bond, le chef du parti Shinui (laïque de droite), Tommy Lapid, a déclaré hier que ‘des journaux comme The Independent and The Guardian travaillent au service des extrémistes du Hamas.’ Interrogé sur des exemples de ‘fautes’, le chef du service de presse du gouvernement, Daniel Seaman a déclaré : ‘Toutes nos tentatives pour convaincre CNN d’arrêter de qualifier la Judée et Samarie [Cisjordanie, ndlr] de ‘territoires occupés’ ont échoué 136 .»
Cet extrait pointe la validité des thèses avancées par P. Schlesinger ; en l’absence d’un consensus induit entre Etat et médias au nom de la défense de l’ordre démocratique contre le terrorisme, le Consensus orthodoxe deviendrait le seul moyen pour rétablir la paix civile. Néanmoins, et c’est le deuxième point soulevé par l’article, ces schémas sont plus difficilement réalisables lorsque les médias n’appartiennent pas à l’espace public touché par les violences.
Nous venons d’envisager les rapports entre médias et Etat en période de crise ; dans le chapitre suivant, nous nous intéressons aux relations entre les médias et les acteurs d’un conflit.
« Colère contre CNN et BBC en Israël », Le Monde, 24/06/2002, p. 10.