2-L’émotion énoncée : des chiffres et des mots qui accusent

Le statut de la victime dans le traitement médiatique de la violence est un point essentiel de la représentation d’un conflit. A la notion de victime est accolée celle de la mémoire de l’événement dramatique. La commémoration des victimes du 11 septembre 2001 est en cela éloquente, car elle indique la nécessaire mise en abyme temporelle d’un événement pour que celui-ci puisse exister dans la mémoire collective nationale et, dans le cas du 11 septembre 2001, internationale.

Dans un autre registre, chaque année en Israël, le même jour 38 , à la même heure, toute activité cesse en mémoire de la Shoah. Nous ne pouvons mettre sur une même échelle symbolique, humaine et historique les deux événements, mais nous soulignons ainsi l’importance de la célébration de la mémoire des victimes dans l’espace public. Ainsi, à date anniversaire (en septembre) se remémore-t-on dans le camp palestinien, la tuerie du Tombeau des patriarches ou en Irlande du Nord, au mois d’août, l’attentat d’Omagh survenu en plein processus de paix. Ces commémorations sont généralement relayées par la presse. C’est le cas notamment au moment du désarmement de l’IRA en 2005 lorsque les journaux, plus que les sites internet qui ne fonctionnent pas sur les mêmes temporalités discursives, abordent le thème de la mémoire d’un conflit à travers l’évocation des victimes : « Après trente-cinq ans de conflit, les jeunes ont “toujours vécu avec l’IRA. Tout le monde connait quelqu’un en prison, ou mort sous les balles. Je n’aimerai pas que la mémoire meure ”, explique l’étudiant [….]» (Le Monde, «  A Belfast, les Catholiques rêvent d’un nouveau départ », 02/08/2005).

Notes
38.

Le 27 Nissan est le jour où Israël commémore la Shoah. Il ne correspond pas à un jour fixe, mais au 27ème jour du premier mois (Nissan) du calendrier juif. Par exemple, en 2007 ce jour était le 15 avril ; en 2008, le jour de commémoration de la Shoah sera le 2 mai.