2–1 Le leader politique pour lui-même et par lui-même

Notre corpus est très hétéroclite dans la mesure où il comprend des sites très élaborés, à la réticularité complexe, et d’autres qui ressemblent davantage à de simples tracts politiques, à la tabularité presque nulle. Les représentations du leader politique sont donc logiquement très hétérogènes dans leur forme et leur contenu. Nous avons sélectionné les portraits électroniques des leaders des quatre principaux partis pour chacun des conflits, le Sinn Féin et le DUP pour l’Irlande du Nord, le Likud et Kadima pour Israël. Notre choix s’est fait selon deux critères. Un critère électoral : nous avons sélectionné les deux partis ayant le plus grand nombre de sièges à la Knesset et au Parlement de Stormont. Un critère de validité ensuite : les « figures électroniques » des leaders du SDLP et de l’UUP sont minimalistes dans la mesure où elles sont réduites à l’état civil et à un curriculum vitae très concis. Le site israélien du parti travailliste ne possède aucune rubrique réservée à la présentation de son dirigeant ; le site du Fatah possède quant à lui un lien hypertextuel renvoyant à un site présentant Mahmoud Abbas, mais celui-ci est inaccessible. Ces absences discursives sont la preuve d’un traitement différenciédu leader politique, représenté selon les conflits et selon les partis. Il ne faut pas nécessairement y trouver une raison rhétorique puisque, dans le cas du Fatah, il y a une impossibilité technique qui empêche la figure de l’ethos virtuel de s’exprimer. Cependant, le faible volume rhétorique déployé par les sites nord-irlandais du SDLP et de l’UUP est révélateur de stratégies discursives centrées sur le collectif et l’action et non sur la personne unique du leader. Nous formulons l’hypothèse que ces ethos « atténués » sont dus au fait que Mark Durkan et Sir Reg Empey sont moins médiatisés et populaires que leurs adversaires Gerry Adams et Ian Paisley, et que, de fait, le leadership est collégial. Cette hypothèse peut être lue dans le sens inverse, c'est-à-dire que du fait d’un leadership collectif, les chefs des partis sont moins mis sur le devant de la scène médiatique. A contrario, la forte personnalité politique et médiatique des leaders du Sinn Féin et du DUP favorise une stratégie discursive centrée sur leur personne. Leur notoriété est un des points extra-discursif de l’ethos de chacun de ces partis, fondé sur l’argument d’autorité.