2.3.3.2. Influences de la familiarité

Etant donnée la précocité de la participation des connaissances sémantiques au traitement visuel des objets, il est possible d’imaginer qu’elles puissent moduler un effet comme l’avantage du niveau global dans l’analyse d’un stimulus complexe. Quelques travaux portent sur cette question et manipulent la familiarité des dessins en tant que variable sémantique. Shull, Hupp et Haaf (2003) ont ainsi montré que la familiarité du stimulus situé à l’un ou l’autre niveau d’un stimulus hiérarchisé influence leurs traitements. Par exemple, lorsque la cible située au niveau local est plus familière que celle du niveau global, un avantage du niveau local peut se produire.

Tout récemment, Poirel et Mellet (2006) ont aussi apporté des arguments en faveur d’une différence de traitement des deux niveaux selon la familiarité des informations situées à chaque niveau. Ils opposent pour cela des dessins d’objets familiers à des dessins de non-objets. Devant un couple de stimuli hiérarchisés constitués de tels dessins, le participant doit décider si les stimuli sont complètement identiques ou non. Dans le cas des couples réclamant une réponse négative, la différence peut porter sur le niveau global ou le niveau local. De plus, les images peuvent être familières ou non familières, soit au niveau global, soit au niveau local. Dans les conditions où les images diffèrent, le niveau ‘pertinent’ est celui où cette différence est présente et le niveau ‘non pertinent’ est celui où les images sont identiques. Les auteurs observent tout d’abord un avantage du niveau global : une différence présente au niveau global est détectée plus vite qu’au niveau local. Toutefois, cet effet disparaît si le niveau ‘non pertinent’ contient des objets familiers. Tout se passe comme si la présence d’objets familiers au niveau local attirait l’attention, retardant alors la détection des différences au niveau global. Cela montre que l’identification des objets familiers se produit rapidement, automatiquement et attire l’attention au point de supprimer l’avantage du niveau global. Encore une fois, la conclusion est que l’avantage du niveau global n’est un phénomène ni absolu, ni strictement dépendant de composantes sensorielles ; il peut disparaître si l’attention est biaisée vers un autre niveau d’analyse. Ces résultats confortent donc ceux de travaux antérieurs sur la précocité de l’intervention de processus de haut niveau dans les traitements visuels (Boucart & Humphreys, 1992, 1994, 1997 ; Pins, Meyer, Foucher, Humphreys, & Boucart, 2004).