1.2. Modèles dits de « deuxième génération »

Malgré la vérification des crises antérieures des années 80 par le scénario déterministe, discuté dans la section précédente, l’observation des crises de change au cours de la dernière décennie (voir Eichengreen et alii, 1995) a remis en cause l’hypothèse selon laquelle les politiques économiques erronées 18 sont les causes déterminantes des attaques spéculatives. Pendant les deux crises du SME de 1992 et plus encore en 1993, les attaques spéculatives subies par le franc français n’étaient pas explicables par une incohérence entre la politique domestique et l’engagement français de maintien de la parité. En 1993, la France connaissait en effet un excédent de sa balance des transactions courantes, un taux d’inflation inférieur à celui de l’Allemagne et était le seul pays avec le Luxembourg à respecter les critères de convergence du traité de Maastricht. Une autre explication était donc nécessaire. Avec la contribution de M. Obstfeld (1986), les modèles dits de deuxième génération apportent un éclairage alternatif. Ces modèles prennent en effet explicitement en compte les coûts et les avantages d’une politique de change fixe, les autorités arbitrant alors entre plusieurs objectifs. Du coup, les opérateurs peuvent douter de la détermination des autorités à défendre la parité. Des attaques spéculatives peuvent alors rationnellement apparaître, déclenchées par un changement soudain dans la perception qu’ont les investisseurs de la crédibilité de la banque centrale et, partant, quant à la viabilité du régime de fixité. L’attaque, en imposant une hausse des taux d’intérêt accroît le coût du maintien de la parité et amène – plus ou moins rapidement – les autorités à arbitrer en faveur de l’abandon de la fixité, validant ainsi les anticipations du marché et donnant à la crise l’apparence d’une prophétie auto-réalisatrice. Artus (1994) qualifie ces attaques d’offensives.

Notes
18.

C'est-à-dire des politiques économiques qui sont incompatibles avec le maintien du régime de change avec même un niveau de réserve qui permet de soutenir un déficit non excessif de la balance des paiements.