2.2.3. Les conditions d’existence des équilibres multiples

L’équilibre dans Jeanne (1997) est la solution de l’équation (21) en π t . Pour le déterminer, une discussion sur les fondamentaux Φt est indispensable. Ainsi, plusieurs conditions sont envisagées. Nous pouvons résumer les solutions de l’équilibre à l’aide du Graphique (4) :

Chapitre 1 - Graphique 4 : Résolution Graphique de l’équation ( 8 )
Chapitre 1 - Graphique 4 : Résolution Graphique de l’équation ( 8 )

Ce graphique (4) montre bien que la solution de l’équation (21) est donnée par l’intersection de la courbe CΦ qui représente la courbe de la fonction F (α π t Φ t  ), et la première bissectrice qui représente le plan (π t , π t ) ( c’est à dire π t = π t ).

Condition 1 :la pente de la courbe CΦ est inférieure à l’unité et coupe la première bissectrice au plus en un seul point (Cf. le graphique 5 en annexe). Nous pouvons formaliser mathématiquement cette condition par α f ( 0 ) < 1. Dans ce cas, la probabilité de dévaluation π t est déterminée uniquement par la faiblesse des fondamentaux Φt. Ce cas n’envisage pas la multiplicité des équilibres.

Condition 2 : la pente de la courbe CΦ est supérieure, au moins en un point, à celle de la première bissectrice. C’est à travers cette condition qui concerne les paramètres structurels du modèle 30 , qu’il est possible d’envisager plusieurs équilibres. Elle est ainsi formalisée comme suit : α f ( 0 ) > 1

Cette condition est considérée par Jeanne (1997) comme nécessaire mais non suffisante pour la génération de la multiplicité des équilibres. Une condition temporelle supplémentaire, sur l’état des fondamentaux, est ainsi discutée. En effet, il existe deux valeurs extrêmes des fondamentaux : Φmin lorsque les fondamentaux sont mauvais et Φmax lorsque les fondamentaux sont bons.

  • Si Φt > Φmax ou Φt < Φmin, alors la probabilité de dévaluation π t est déterminée uniquement par les fondamentaux. Dans ce cas, il est évident que la courbe CΦ coupe la première bissectrice en un seul point, bien qu’elle possède une pente supérieure à l’unité.
  • Si Φmin < Φt < Φmax, alors la probabilité de dévaluation π t peut prendre trois valeurs π 1 ( Φ ) < π 2 ( Φ ) < π 3 ( Φ ).

Dés lors, nous pouvons conclure que seulement pour une frange de fondamentaux, ni trop bons, ni trop mauvais, la crise sera auto-réalisatrice vu la présence de la multiplicité des équilibres. Dans ce cas, les courbes CΦ min et CΦ max sont des tangentes à la première bissectrice respectivement en π min et π max . Alors, les deux conditions de tangentes qui déterminent Φ min et Φ max sont :

En résumé, nous pouvons dire que deux conditions sont mises pour la multiplicité des équilibres. Une première condition nécessaire (α f (0) > 1 ) est liée aux paramètres structurels du modèle. Une deuxième condition suffisante (Φ min < Φt < Φ max ) est liée à la variation dans le temps des fondamentaux. Toutefois, quand les fondamentaux sont soutenus (Φt > Φ max ), la probabilité de dévaluation admet une seule valeur qui tend vers zéro (mais pas égale à zéro puisque l’hypothèse d’un régime parfait n’est pas réaliste). Symétriquement, quand les fondamentaux sont faibles (Φt < Φmin), la probabilité de dévaluation admet aussi une seule valeur qui tend vers 1. Ainsi, le gouvernement va sans doute dévaluer dans la période suivante sauf si la réalisation d’un choc positif se réalise sur les fondamentaux.

Cependant, quand les deux conditions nécessaires et suffisantes sont satisfaites, à savoir l’existence d’une une zone intermédiaire critique, la probabilité de dévaluation prend trois différentes valeurs (π 1 (Φ), π 2 (Φ), π 3 (Φ)). La parité fixe devient ainsi vulnérable à une attaque spéculative auto-réalisatrice dans la mesure où elle résulte non pas d’une modification des fondamentaux, mais d’un changement de comportement des opérateurs sur le marché des changes. L’attaque spéculative, même si elle est difficilement prévisible, n’est pourtant pas totalement aléatoire puisqu’elle résulte d’une fragilité antérieure de l’économie, c’est-à-dire de son entrée dans la zone à risque, induite par une dégradation antérieure de ses fondamentaux.

Notes
30.

Les paramètres structurels sont α et σ (écart-typede la fonction de densité de la loi normale centrée).