1.1. Différents canaux de la contagion fondamentale

Cette perspective alternative à celle des fondamentaux attribue la responsabilité principale des désordres financiers récents à l’interconnexion – commerciale ou financière – des économies affectées avec le pays originaire de la crise (‘ground zero contry’). Suite au déclanchement d’une crise dans un premier pays, cette interconnexion engendre souvent une forte volatilité des mouvements internationaux de capitaux, elle-même issue du changement de comportement des investisseurs internationaux, ainsi que des créditeurs communs face aux problèmes du risque et de liquidité.

Un trait commun aux crises financières des pays émergents dans les années 90 est en effet une hausse importante des entrées de capitaux à court terme pendant la période qui précède la crise, suivie par une inversion brutale de ces flux qui a quasiment toujours été l’élément déclencheur de la crise. Ainsi, par exemple, les apports de capitaux privés aux pays émergents qui avaient atteint 140 milliards de dollars en 1996 sont tombés à 40 milliards de dollars en 1997 et se sont totalement taris l’année suivante (BRI, 1999). Les prêts bancaires consentis aux pays d’Asie les plus durement touchés par la crise (Corée, Indonésie, Malaisie, Philippine et Thaïlande) se sont violemment contractés, passant de 49 milliards de dollars au cours du premier semestre de 1997 à -39 milliards pendant le 3e trimestre 1997 et -96 milliards pendant le 4e trimestre. Les prêts bancaires à ces pays qui avaient augmenté en 1996 de l’équivalent de 5,5 % de leur PIB ont diminué en 1997 de l’équivalent de 10 % du PIB (Ayadi et alii, 2006).

Le scénario considéré ici (crise causée par la propagation), implique que la situation d’un pays contaminé par la crise ne soit pas la cause déterminante. La transmission de la crise d’un pays à un autre tendrait à s’opérer par l’effet d’interdépendance, c’est-à-dire selon des mécanismes qui ne dépendent pas des caractéristiques fondamentales des économies affectées. En somme, dans les pays affectés par ce type de contagion, ce n’est pas la vulnérabilité de l’économie qui provoquerait la crise mais c’est la transmission de la crise qui dégraderait les fondamentaux des pays contaminés.

Dès lors, les mécanismes d’interdépendance ou de contagion fondamentale, traitent des chocs macroéconomiques communs dont leurs répercussions (spillovers) se situent – potentiellement – à l’échelle globale et des chocs locaux d’un pays à un autre pays « voisin » (de la même région), transmis à travers les liens commerciaux, le marché tiers et les liens financiers.