4.2.1. Evidence de multiplicité des équilibres

Ce résultat fournit alors une évidence empirique de la présence d’une situation d’équilibres multiples avec des attaques spéculatives auto-réalisatrices. En fait, nous identifions empiriquement la présence de deux équilibres caractérisant la crise de change auto-réalisatrice dans la Corée durant la dernière décennie. D’après nos résultats, nous pouvons penser également que le saut de l’équilibre de stabilité vers l’équilibre de crise est véhiculé par une variable tache solaire non observable.

Cependant, la significativité statistique de la plupart des variables macroéconomiques dans cette deuxième spécification, vérifie aussi la contribution de la bifurcation des fondamentaux dans l’explication du saut entre les équilibres dans le contexte d’une crise de change auto-réalisatrice. En effet, les coefficients de la balance courante et du taux de change réel, ont des signes attendus et statistiquement significatifs au seuil de 5% (les t de Student sont respectivement égaux à -2.237 et 9.103 et supérieurs en valeur absolue à la valeur critique 1.96). Par ailleurs, le coefficient associé au taux de chômage, a un mauvais signe qui n’est pas conforme à l’intuition économique, mais qui n’est pas également statistiquement significatif. Ces résultats confirment ceux de Ratti et Seo (2003) qui ont estimé un modèle non linéaire (selon l’approche de Jeanne 1997) dans lequel ils expliquent la probabilité de dévaluation par les mêmes fondamentaux que ceux utilisés dans notre travail. Afin d’expliquer la non significativité du taux de chômage dans le cas de la Corée, ces auteurs pensent que l’influence de cette variable est indirecte à travers son effet sur la balance courante. Ils trouvent aussi que l’évolution des fondamentaux vers la zone des spéculations auto-réalisatrices est déterminée seulement par le déficit de la balance courante et du taux de change réel. En fait, depuis juillet 1997, les apports de capitaux ont ralenti puis se sont inversés. Le déficit de la balance de paiement était alors financé par les fonds des réserves de la banque centrale. D’après Park et Song (1999), la banque centrale coréenne a perdu ainsi 15 milliards de dollars américains de réserves dans le mois de novembre 1997. Cet épuisement a provoqué une attaque spéculative contre le won coréen. Les banques coréennes eurent des difficultés à emprunter des devises à court terme et la prime du risque associée au taux de change won/dollar a augmenté en valeur absolue à partir du mois d’août 1997. Les fondamentaux de la Corée sont entrés dans la zone des équilibres multiples durant cette période jusqu’au mois d’avril 1998.

La colonne 2 fournit aussi les estimateurs des probabilités de transition entre les états. La probabilité de transition d’un état de stabilité vers un état de crise est très faible (P10 = 0.0124). La probabilité de transition d’un état de crise vers un état de stabilité est également faible (P01= 0.0498). Ces faibles probabilités vérifient une relative stabilité dans les états; Chaque état demeure dominant dans une longue sous période de la période d’estimation. Le passage entre les deux états n’est pas très fréquent au cours du temps. En effet, le changement de régime est réalisé une seule fois. Ceci peut être expliqué par l’utilisation d’une longue période d’estimation caractérisée par une seule sous période de crise qui figure durant la période 1997-1998.