Introduction

« Il est plus facile de proclamer l’égalité que de la réaliser »
Edouard Herriot, « Aux sources de la liberté », Paris, Gallimard, 1939.

Encore aujourd’hui, nombreux sont les jeunes étrangers occidentaux qui ont une vision du Cambodge qui date des années quatre-vingt, limitée aux informations recueillies dans la presse au sujet du génocide du régime de Pol Pot. Peu d’entre eux connaissent ce pays et ils ne tiennent pas à le découvrir davantage par crainte pour leur sécurité. De fait, c’est l’un des pays les plus pauvres du monde 4 qui a subi une tragédie connu beaucoup de régimes politiques et économiques, parfois qualifiés d’« impensables » 5 . Contrairement à cette époque, le Cambodge, « pays du sourire » 6 , attire, à l’heure actuelle, des touristes venus du monde entier, plus d’un million chaque année qui viennent découvrir les splendides temples d’Angkor classés au patrimoine de l’humanité par l’UNESCO 7 .

Le Cambodge est l’un des pays traversés par le Mékong, Il est le plus petit des États de l’Asie du Sud-Est. Sa superficie est de 181 035 kilomètres carrés. Il était l’un des trois pays d’Indochine, laquelle comprenait le Vietnam, le Laos et le Cambodge. Il est frontalier du Vietnam, de la Thaïlande, et du Laos. Il s’étend entre le 10ème et le 15ème degré de latitude Nord et entre le 102ème et le 108ème degré de longitude Est. Le Cambodge a la forme d’un polygone presque régulier dont le centre se trouve dans la province de Kompong Thom. Il a 2.600 kilomètres de frontières dont les cinq sixièmes sont terrestres 8 . La population actuelle du Cambodge s’élève environ à 13 millions d’habitants, soit une densité de 66 habitants par km², 85% de la population est issue du milieu rural, et 43% a moins de 15 ans. Le taux annuel de croissance démographique ressort à 2,5%. La part de la population active du pays est passée de 55,5% en 1999 à 65,5% en 2004. Cette population active est en grande partie (45,7%) constituée de personnes travaillant dans un cadre familial et non rémunérées, d’ailleurs, le taux de chômage est passé de 5,3 à 7,1% en 2004 9 . La croissance économique annuelle a été estimée à 6 à 7% en moyenne, grâce à une politique budgétaire prudente, une gestion monétaire saine et des réformes structurelles appropriées 10 .

Affecté par deux décennies de conflits (1970 à 1990), le taux d’alphabétisation, nettement plus élevé chez les hommes que chez les femmes, atteint 63%, mais le niveau d’instruction est faible, 83% des Cambodgiens scolarisés n’ont pas dépassé le niveau des études primaires.

Dominante, l’ethnie khmère représenterait entre 90% et 95% de la population, les autres communautés importantes étant celles des Vietnamiens, des Chams de religion musulmane et des Chinois, très actifs dans le commerce et relativement bien intégrés à la population d’origine. La religion principale, malgré les tentatives d’élimination des Khmers Rouges, est le Bouddhisme théravada, qui pratique le Petit Véhicule 11 . L’Empire khmer débordait autrefois largement des limites du Cambodge actuel vers le Vietnam et la Thaïlande. Il reste de cette période de nombreux vestiges, dont les célèbres temples d’Angkor.

Bien que le Cambodge dispose à l’heure actuelle de sources de droit du travail importantes, l’étude du droit khmer aujourd’hui ne peut être faite sans connaître véritablement l’histoire du pays (I) ainsi que l’ancien droit dont le droit actuel est l’héritier (II). En effet, le droit, comme l’affirme Norbert ROULAND 12 , est un fait de culture lié fortement à la société dans laquelle il a été créé. Ainsi, avant d’aborder la question du droit, en particulier des règles relatives à l’égalité telle qu’elle est reconnue en droit positif et s’applique dans le domaine du droit privé cambodgien (IV) , il paraît intéressant de dresser un bref historique de la notion dans la société cambodgienne depuis la période Angkorienne (III) .

Notes
4.

Le Cambodge a été classé au 129ème rang mondial à l’échelle de l’indicateur du développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), in, Catherine GOUËSET, Royaume du Cambodge, quelques données de base, journal L’Express, éd., du 16 novembre 2006.

5.

Sous le régime des Khmers Rouges (1975-1979), il n’existait ni marché, ni monnaie, ni échange. Les Khmers Rouges ont supprimé tout : la culture, le commerce, l’éducation, le système juridique et d’autres activités. Sur ce point, voir : PRAK Vath, La communauté khmère dans l’ombre, thèse Lyon 2, sous la direction de Henri LE MASNE, éd. Maisonneuve, 1988-1989, p. 38-44 ; Fraçois PONCHAUD, Cambodge année zéro, éd., Kailash, 2001, p. 7 et s.

6.

François PONCHAUD, Cambodge année zéro, op.cit., p. 7. Cet auteur qualifie le Cambodge de pays de « l’énigmatique sourire ».

7.

Le temple d’Angkor a été classé au patrimoine mondial en décembre 1992 par la seizième session du Comité du Patrimoine Mondial qui s’est réuni à Santa Fé, Nouveau Mexique, États-Unis d’Amérique, www.angkor.wat.online.fr/conservation-inscription-patrimoine.htm

8.

HANG Chuon Naron, L’économie du Cambodge : La lutte pour le développement, Phnom Penh, 2005, p. 33 ; Armand ROUSSEAU, Le protectorat français du Cambodge, organisation politique, administrative et financière, thèse, Poitiers 1904, p. 9.

9.

HANG Chuon Naron, L’économie du Cambodge : La lutte pour le développement, op.cit., p. 71 et s.

10.

Id., p. 5.

11.

Jean DELVERT, Le Cambodge, la ferveur bouddhique, éd., Presses Universitaires de France (PUF), 3ème éd., coll. Que sais-je ? 1998, p. 92 et s.

12.

Norbert ROULAND, Anthropologie juridique, P.U.F., coll., Que sais-je ? 1990, p. 89.