Section 2. L’interdiction des discriminations

Partout dans le monde, les gens ont besoin de travailler pour se nourrir ainsi que leur famille. Le droit, tant international que national, a pour mission d’assurer une protection de ces travailleurs, non seulement de leur santé et de leur liberté, mais aussi de leurs conditions de travail pour qu’ils ne soient pas écartés ou exclus du marché de travail ou traités de manières moins favorables que les autres travailleurs soumis au même employeur. Cette protection relève du principe d’égalité de traitement des travailleurs selon lequel un employeur ne peut pas pratiquer une discrimination en recourant à certains motifs illicites à l’encontre d’un travailleur.

Dans le cadre du droit international, plusieurs textes juridiques ont été adoptés par l’OIT et par l’ONU pour lutter contre les pratiques discriminatoires qui peuvent détruire ou dégrader la santé physique et mentale des travailleurs. Parmi ceux-ci, on peut trouver des textes à forte valeur normative comme la partie VIII du Traité de Versailles ou la Déclaration de Philadelphie, qui ont été incorporés dans le préambule de la Constitution de l’OIT relative à la non discrimination dans le traitement entre les travailleurs. La Charte des Nations Unies ainsi que la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme interdisant strictement à un employeur de prendre certains motifs comme le sexe, la race, la couleur de peau (…) pour arrêter ses décisions concernant les conditions de travail. Quant aux textes conventionnels, on trouve également les Conventions adoptées par l’OIT ainsi que les Pactes adoptés par l’ONU. Parmi ces Conventions, une attention particulière doit être portée sur celles relatives à l’abolition du travail forcé 212 ainsi que la convention sur la discrimination en matière d’emploi et de profession parce qu’elles permettent à tous les êtres humains de retrouver une liberté totale dans le choix de leur métier sans aucune discrimination.

Au niveau national, rappelons que l’article 45, alinéa 3 de la Constitution de 1993 confère aux femmes des droits égaux à ceux des hommes dans tous les domaines. La portée de cet article est large car il interdit, en matière de travail, non seulement à l’employeur de pratiquer une discrimination dans le domaine de la rémunération envers les femmes, mais également dans l’accès à l’emploi ainsi que dans le déroulement de leur vie professionnelle comme l’affectation et la formation professionnelle. Autant dire que cet article s’applique à l’ensemble des conditions de travail. L’article 12 du Code du travail cambodgien prohibe expressément à l’employeur de prendre en considération certains critères lors de l’embauche ou de l’octroi d’avantages sociaux, il ne peut pas pratiquer la discrimination. Il exerce ses pouvoirs de direction et de sanction sous réserve qu’il ne viole pas les règles de non-discrimination fixées par la loi.

En somme, la prohibition de la discrimination dans ce domaine peut comporter deux aspects essentiels à savoir, d’une part, l’interdiction faite à l’employeur de discriminer lors du recrutement des travailleurs (§1) et d’autre part, lors de l’exécution du contrat (§2) .

Notes
212.

Sur ce point, il existe deux conventions fondamentales de l’OIT dont l’une est entrée en vigueur en 1932 alors que l’autre l’a été en 1959. Ces deux conventions enjoignent aux États membres d’abolir le travail forcé. Mais, consciente que pour certains États, cette abolition reste utopique précisément du fait du poids culturel, la Convention n° 29 est surtout consacrée à l’aménagement des conditions de recours au travail forcé, imposant que celui-ci soit rémunéré comme du travail volontaire et que les travailleurs soient soumis aux mêmes conditions de travail que les salariés. La Convention n° 105 est beaucoup plus exigeante sur l’abolition absolue du travail forcé. La Constitution du Royaume du Cambodge dans différents articles montre son attachement à la liberté du travail : l’article 36 reconnaît le droit de choisir un métier, l’article 38 proclame que la loi protège la vie, l’honneur et la dignité des citoyens, il interdit la contrainte, la punition corporelle ou tout traitement aggravant la peine d’un détenu ou du prisonnier, de même que la violation corporelle d’un individu. L’article 46 interdit le commerce des êtres humains. Quant au Code du travail, il interdit le travail forcé ou obligatoire de façon absolue en se référant expressément à la Convention n° 29 de l’OIT, il étend cette interdiction du travail forcé aux domestiques ou gens de maison qui ne sont pas concernés en principe par l’application du Code du travail. La violation de cette interdiction est punie pénalement par l’article 369. Par la ratification en 1999 de la Convention n° 105, le Cambodge renforce sa volonté d’abolir le travail forcé, dont ont été victimes de nombreux Cambodgiens dans le régime des Khmers Rouges pour des motifs d’ordre politique. In, Marie-Cécile ESCANDE-VARNIOL, Les droits sociaux fondamentaux et le droit du travail cambodgien, art.préc., p. 123.