A. Procédure de contrôle en matière de droit de la liberté syndicale

La liberté syndicale et la négociation collective font partie des principes fondateurs de l'OIT. Immédiatement après l'adoption de la Convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et de la Convention n° 98 sur le droit d'organisation de la négociation collective, l'OIT est arrivée à la conclusion que ces principes devaient être soumis à une autre procédure de contrôle pour garantir qu'ils seront aussi respectés dans les pays qui n'ont pas ratifié les conventions pertinentes 316 . Cette particularité vient de la qualité de membre de l’Organisation et du fait que la Constitution de l’OIT, complétée par la Déclaration de Philadelphie de 1944, consacre le principe de la liberté syndicale. C’est en 1950 que l’OIT a donc établi, après avoir conclu un accord avec les Nations Unies, une procédure spéciale qui vient compléter les mécanismes du contrôle régulier 317 . C'est pourquoi en 1951, le Comité de la liberté syndicale a été institué et chargé d'examiner les plaintes faisant état de violations des principes de la liberté syndicale, même si l'État en cause n'a pas ratifié les conventions s'y rapportant. Il est à noter que, pour être recevables, les plaintes doivent être déposées par des organisations de travailleurs ou d'employeurs contre un État Membre. Par ailleurs, elles peuvent également émaner d’une fédération syndicale ou patronale internationale si le problème affecte un de ses affiliés ou d’une des grandes confédérations professionnelles dont l’intérêt est présumé du fait qu’elles jouissent d’un statut consultatif auprès de l’OIT 318 . Le Comité de la liberté syndicale est institué au sein du Conseil d'administration. Il est composé d'un président indépendant, de trois représentants des gouvernements, trois représentants des employeurs et trois représentants des travailleurs. S'il estime que la plainte est recevable, il établit les faits en instaurant un dialogue avec le pays concerné. S'il conclut qu'il y a eu violation des normes ou des principes relatifs à la liberté syndicale, il prépare un rapport qu'il soumet au Conseil d'administration et formule ses recommandations sur la façon de remédier à la situation. Le gouvernement est ensuite invité à rendre compte de la mise en œuvre de ces recommandations. Si le pays a ratifié les instruments en la matière, la Commission d'experts peut être saisie pour examiner la situation et le respect de la norme en question. Le Comité peut également choisir de proposer une procédure de contacts directs au gouvernement concerné de façon à traiter directement avec les responsables gouvernementaux et les partenaires sociaux par le biais du dialogue. Depuis sa création il y a plus de 50 ans, le Comité de la liberté syndicale a examiné plus de 2 300 cas. Plus de 60 pays sur les cinq continents ont pris des mesures à la suite des recommandations qu'il a formulées et l'ont informé d'une évolution positive de la situation en matière de liberté syndicale au cours des 25 dernières années.

Le Gouvernement cambodgien avait été accusé de n’avoir pas bien respecté le droit et la liberté syndicale. C’est la raison pour laquelle la Confédération Mondiale du Travail (CMT) a porté plainte en 1997 contre ce pays 319 . D’après les allégations du CMT, le Royaume du Cambodge aurait violé le droit de libre constitution des syndicats, le droit de grève et de la négociation collective, la protection des syndicalistes contre le licenciement, il a été accusé de pressions et menaces exercées à leur encontre.

Une autre plainte contre le Gouvernement cambodgien a été déposée le 2 août 2004 par l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) 320 , déposée au nom de son organisation affiliée au Cambodge, la Fédération cambodgienne des travailleurs du tourisme et des services (CTSWF). Encore une fois, la liberté syndicale au Royaume du Cambodge a été mise en cause en raison de la discrimination antisyndicale, de licenciements des travailleurs grévistes et des dirigeants syndicaux. Le Comité de la liberté syndicale de l’OIT, à la suite de cette affaire et en l’absence de réponse de la part du Gouvernement cambodgien, a demandé à ce dernier de fournir des explications sur les faits dont il était accusé avant de faire les recommandations nécessaires.

Notes
316.

Nicolas VALTICOS, op.cit., p. 614.

317.

Pour plus de détails, voir: Jean-Michel SERVAIS, Les normes de l’OIT sur la liberté syndicale et leur mise en œuvre, Revue internationale du travail, vol. 123 (6), nov-déc. 1984, p. 823-840.

318.

Jean-Michel SERVAIS, Normes internationale du travail, art.préc., p. 262.

319.

http://www.oit.org.pe/sindi/french/casos/cby/cby199701.html

320.

Conseil d’Administration du Bureau International du Travail, Rapports du Comité de la liberté syndicale, Genève, 2947è session, novembre 2005, n° 491 et s.