4-2-4-2- De la didactique de l’écrit : entre écrit spécialisé et écrit en langue seconde

La méthode préconisée dans l’enseignement de l’écrit était et reste souvent encore basée sur le phénomène d’imprégnation qui se fait par la lecture et l’exposition intensive et massive à des textes « modèles ». Le passage de cette phase passive à celle active de production est laissée à « la propre initiative » de l’apprenant et « sa propre vocation » (Miled, 1998 : 27). L’apprentissage se fait sur le tas, à travers et grâce au contact avec l’activité scripturale et les différents problèmes qu’on peut rencontrer. Ce qui met la didactique de l’écrit dans une position inconfortable, d’un côté on reconnaît qu’écrire n’est pas une question de don (du moins pas seulement), et qu’il s’agit de compétences, d’habitudes scripturales, d’« un savoir-faire qui s’acquiert et se perfectionne », mais d’un autre côté on ne reconnaît pas la légitimité et la nécessité d’un enseignement spécifique et ciblé.

Nous pouvons nous demander si une telle méthode est applicable en français de spécialité : peut-on apprendre à écrire rien qu’au contact avec les textes scientifiques ? si les études récentes montrent qu’il ne suffit pas de multiplier les lectures pour maîtriser l’écriture, il en est de même de la rédaction spécialisée sachant, en plus, que les étudiants scientifiques sont très peu confrontés à des lectures de ce genre pendant le cursus scolaire et parfois même universitaire.

De plus, pour beaucoup, l’écriture est une question de « créativité » et en aucun cas une question d’intériorisation et de réinvestissement de compétences linguistiques suivant des schémas et des plans prédéfinis. Le développement des théories de référence, la possibilité de définir des objectifs, des stratégies d’apprentissage et des critères d’évaluation, ont permis de répondre à toutes ces objections formulées à l’encontre d’une didactique de l’écrit et aussi d’orienter cette didactique et d’en tracer les grandes lignes. Selon M. Miled, elle « tente de répondre à trois questions complémentaires :

Ces trois points nous poussent dans le cadre de notre recherche à nous poser les questions suivantes par rapport à l’enseignement de l’écrit à un public scientifique adulte:

Dans une situation particulière comme celle du français langue seconde, l’écrit a cette double particularité d’être une discipline enseignée et le moyen par lequel d’autres disciplines sont enseignées. En tant qu’indice du degré de maîtrise de ces disciplines, il occupe une place privilégiée dans la société.

Mais comme le précise M. Dabène (1987 : 48), il ne s’agit pas seulement de maîtriser de formes linguistiques mais de « connaître aussi, et maîtriser surtout, les situations dans lesquelles l’usage de l’écriture est socialement acceptable ». D’ailleurs, c’est cette légitimation sociale ou son absence qui pose problème dans le cadre scolaire ; l’élève ne comprend pas l’intérêt des activités de rédaction. « L’écrit est intimement lié à des enjeux pragmatiques et affectifs (…) alors que la classe demeure un cadre artificiel » (Miled, 1998 : 56). Ceci a poussé à la mise en place de situation de « déscolarisation » (journal scolaire, prise de notes à partir de conférences, compte rendu d’enquêtes menées par les étudiants…). Ces activités,  permettent de libérer l’écriture d’une utilisation « très codifiée » instaurée par le cadre scolaire, au sein duquel elle est pratiquée de manière presque exclusive. Ceci, selon M. Miled (1998 : 56-57), se traduit en didactique par le développement de capacités transversales prenant en compte les préalables suivants :