1-1-1- La négociation et la complétude

Pour mieux saisir le fonctionnement du discours, E. Roulet le conçoit comme une négociation, une recherche d’un accord, qui obéit à deux contraintes : la complétude interactionnelle (relative à l’échange) et la complétude interactive (relative à l’intervention).

La contrainte d’un double accord est nécessaire pour assurer la complétude interactionnelle. Si la réaction de l’interlocuteur est défavorable, le locuteur devra relancer son intervention jusqu’à l’obtention d’un avis favorable pour pouvoir clore l’échange. Mais pour arriver à ce niveau interactionnel, il faut déjà, au niveau de l’intervention, que celle-ci soit suffisamment claire et justifiée pour permettre à l’interlocuteur d’émettre son accord ou désaccord. Le seul juge de la complétude interactive reste l’interlocuteur, qui évalue l’intervention et décide si oui ou non elle contient les éléments nécessaires à la prise de position. Si l’intervention est perçue comme ne satisfaisant pas la complétude, une négociation secondaire, sur l’élément défaillant, sera ouverte pour réparer la défaillance et reprendre la négociation principale. La négociation secondaire peut porter sur une réaction défavorable inattendue pour, justement, la vérifier, elle peut aussi porter sur une conclusion non pertinente pour vérifier sa pertinence.

Pour éviter ce genre de négociation, gênant pour la négociation principale, l’interlocuteur peut prendre l’initiative d’ouvrir une négociation préalable pour présenter l’objet et la motivation de son acte principal, et donc assurer la complétude.

L’absence d’une complétude interactive ou interactionnelle et l’ouverture d’échanges subordonnés ou secondaires nous amène à parler :

  • D’intervention complexe, formée de plusieurs interventions subordonnées les unes aux autres ou encore d’échanges secondaires liés au premier par des relations interactives (comme dans le cas où l’interlocuteur s’assure à l’avance de l’accord de l’autre sur un fait avant d’amener l’acte principal).
  • D’échange complexe : c’est le cas par exemple quand les deux interventions, initiative et réactive, sont incomplètes et appellent une suite.

D’autres moyens permettent d’assurer la complétude qu’elle soit interactive ou interactionnelle comme la re-formulation, les connecteurs et la diaphonie.