2-2-5- Conclusion

Le tableau suivant résume le rapport des différents groupes aux différents actes selon le type de production en cours (rapports que nous avons détaillés plus haut).

Tableau des actions en co-énonciation et en négociation
Tableau des actions en co-énonciation et en négociation Les signes de - à +++ désignent un recours pas important à très important au type d’échange en question.

La co-énonciation régit la collaboration chez les différents groupes alors que la négociation est presque inexistante sauf pour le traitement scientifique ou, de manière plus modérée, pour la sélection des informations. Les échanges co-énonciatifs de sélection du contenu, de traitement scientifique de la matière, de planification ou de re-formulation/ inscription, ne se construisent pas toujours par une acceptation manifestée et explicite. Elle est souvent sous-entendue. De même, les négociations ne sont pas toujours abordées directement. Elles présentent des moments de tension surtout qu’elles touchent la matière scientifique de manière directe, lors des explications, ou manière indirecte, lors de la sélection et de la reformulation. Différentes stratégies sont utilisées. Cette reconstruction ne se passe pas toujours sans heurts comme nous l’avons vu, il y a différentes stratégies pour faire accepter et inscrire les éléments, et différentes autres pour, au contraire, les rejeter. « L’inscription n’est pas simplement un acte individuel, relevant de l’inscripteur mais ne fonctionne dans l’économie globale de l’activité que quand elle est action collective, effectuée par M en coordination avec P. Ceci montre bien que la « réciprocité des perspectives » (Schütz 1967) n’est pas donnée par une communauté de « vues », un partage d’ « idées » ou de « mémoire » mais se constituent à travers l’organisation interactionnelle de l’expérience, qui ne va pas de soi, n’est pas garantie par la co-présence, ni par le fait de s’entendre réciproquement parler, mais qui est un travail d’élaboration mutuelle des perspectives. » (Mondada, 2005 : 152).

Les actes subordonnés sont très importants pour les participants et, même s’ils se passent majoritairement en co-énonciation, ils présentent des coûts plus ou moins importants d’un groupe à un autre. La sélection ainsi que l’explication de la matière scientifique se font de manière quasi-linéaire, les éléments étant alors abordés dans l’ordre de leur apparition dans le cours, au fur et à mesure de la re-lecture de ce dernier. Le travail sur la planification en devient alors quasi inexistant. La concentration sur les deux premiers actes fait que les prises de notes de G1 et de G3 soient relativement plus coûteuses que celles des autres groupes notamment à cause des difficultés qui y sont liées, du type de notes qu’elles mettent en place (trop détaillée ou insuffisante) et de l’importance des négociations qui les accompagnent. D’un autre côté, ces difficultés sont accentuées par une difficulté d’effectuer des reformulations au moment de ces négociations et même des co-énonciations. Cette difficulté s’étend aussi aux moments de la réalisation de l’acte principal de (re)-formulation/ inscription et devient plus nette lors de la phase de rédaction. Nous assistons alors à deux réactions : G1, conscient du poids informationnel et scientifique du texte et par peur de l’erreur et de l’incomplétude, reproduit avec une grande fidélité le texte de départ. G3, conscient de l’enjeu de la tâche et de la situation d’énonciation, prend des risques et se lance dans la reformulation, encouragé par une compréhension quelque peu fragile.

La reformulation ainsi que la re-structuration des données sont fortement liées à l’explication et l’aisance ressentie face la matière scientifique et à l’importance accordée/ à la manière d’aborder le travail d’explication et de sélection. Ainsi, G2 peu confiant, ne se hasarde pas sur ce chemin (malgré qu’il ne semble pas avoir de problèmes de langue comme ceux de G3). Alors que G4 et G7, confiants et sûrs, se lancent dans un travail reformulatif plus ou moins important selon les données. Mais malgré une bonne compréhension des informations scientifiques traitées, malgré des échanges explicatifs pertinents et la résolution des difficultés liées à la matière (quand elles se présentent), les textes de ces groupes présentent des altérations importantes des relations entres les segments : la raison en est directement liée à la mauvaise gestion des opérateurs de la paraphrase et surtout la mauvaise gestion de la sélection et mais surtout à l’incapacité de penser le texte dans sa totalité et en tant que discours. G4, par exemple, écarte à plusieurs reprises des informations essentielles parce qu’elles sont « supposées connues ». Il ne prend pas en considération la cohérence globale de son texte et c’est globalement le cas pour les autres participants. Ce sont les niveaux de structuration du texte, de portée pragmatique du discours et de sa perception par un lecteur X qui ne sont pas présents chez nos participants et dont l’absence affecte la qualité de leurs productions tout autant que des compétences ponctuelles et de bas niveau. Le travail d’explication effectué est important, le travail de sélection aussi mais les deux ne tiennent pas compte de la dimension discursive du texte lors de sa re-écriture et sa recréation. Ce sont ces compétences transversales qu’il faut développer.

L’étape de prise de notes joue aussi un rôle important dans cette aisance reformulative : plus les groupes font un réel travail sur les données du cours lors de la PDN comme c’est le cas pour G7 et G2 et plus ils arrivent à de meilleurs résultats. Mais il peut arriver que trop de confiance fasse perdre pied comme pour G4.

Il arrive aussi que des éléments reformulés en co-énonciation reflètent une maîtrise floue des connaissances scientifiques et qu’ils ont des répercussions sur l’exactitude des données. Il devient difficile de déterminer si c’est la reformulation qui est à l’origine de l’erreur ou si c’est l’incompréhension qui amène la mauvaise reformulation. La seule certitude reste les conséquences de l’un sur l’autre : plus on comprend, mieux on reformule, certes, mais aussi, rétroactivement nous sommes tentés de dire que plus on reformule mieux on comprend et mieux on manifeste cette compréhension.

Notes
52.

Les signes de - à +++ désignent un recours pas important à très important au type d’échange en question.