2-2- Les attentes

Le rôle de l’enseignant dans ce genre de situation et sa manière de réagir à ces situations et plus généralement sa manière d’interagir avec les apprenants jouent un rôle important. Se placer en stimulant, en cultivant l’interaction en classe est la méthode la plus préconisée par les didacticiens. Comme le souligne J-F. Halté « l’activité langagière et l’activité interactionnelle sont décisives : elles constituent la base (et non seulement le support) de l’activité cognitive de l’apprenant » (1995 : 67). L’erreur identifiée, l’enseignant tentera d’amener les apprenants à réfléchir de manière objective et à des fins d’analyse - et non de critique ou de moquerie - aux raisons de cette erreur, comment et pourquoi elle est commise. L’interaction avec le professeur et avec les autres étudiants permettra de mieux comprendre l’origine de l’erreur ou de la faute, et les corrections proposées. D’ailleurs, ces dernières peuvent être saisies par les étudiants eux-mêmes dans des conditions optimales d’apprentissage - ce qui n’est pas à exclure puisque nous avons affaire à un public d’initiés et non de débutants.

Pour A-C. Berthoud et B. Py il s’agit, en plus, de se mettre à l’écoute des demandes de l’apprenant : demandes de reformulations, demandes de clarifications etc. Selon ses recherches, l’enfant est plus sensible aux interventions qui répondent à ces propres demandes. Il « (…) n’est perméable aux efforts métalinguistiques de ses interlocuteurs que lorsque son système est apte à intégrer l’élément négocié. » (1993 : 72). A priori, ces résultats peuvent être généralisables à d’autres publics plus âgés. L’interaction est alors un moyen de répondre aux besoins et aux attentes de ces apprenants.

La question qui se pose, selon A-C. Berthoud et B. Py, est de savoir comment l’interaction peut déclencher le besoin d’acquisition et comment elle peut y répondre. Apprendre à communiquer dépasse le simple fait de véhiculer et de faire appel à certaines connaissances pour répondre à une situation donnée dans un certain modèle de communication connu ; mais plus encore, il s’agit de savoir reconnaître et analyser les situations afin de faire appel aux bons outils. Il ne s’agit pas seulement d’apprendre quoi dire dans telle ou telle autre situation de communication, comment poser des questions, comment y répondre etc. Il ne s’agit pas d’apprendre à réagir aux situations mais plutôt d’apprendre à les analyser, à les remettre en cause, à s’interroger sur leurs mécanismes, en prenant appui sur l’interaction. L’apprenant ne sera pas placé dans une attitude passive devant une situation problématique qu’il abordera de l’extérieur, l’action active étant assumée par l’enseignant ; bien au contraire, l’apprenant sera placé au centre d’une situation problématique qui l’interpelle, qui présente un intérêt pour lui et dont la résolution présente une motivation essentielle. Il partira alors en quête de l’information suscitant l’intervention de son enseignant. Cette interaction sera le lieu où se résolvent des problématiques relatives, par exemple, à certains types d’échanges comme les échanges explicatifs ou expositifs, aux éléments de coordinations, de justifications etc.

L’arbitraire des choix des problèmes et des situations d’apprentissages est souvent un obstacle dans l’acquisition. Et pour dépasser cet obstacle, A-C. Berthoud suggère vivement de faire des choix qui répondent aux besoins effectifs des apprenants, besoins « métalinguistiques » ou « métacommunicatifs ». Le rôle de l’enseignant, dans cette « conception cognitive et interactive » est celui d’un « subtil négociateur. Il doit à la fois proposer le matériel qui appelle le questionnement et assumer celui-ci, en articulant les hypothèses et représentations originales ou partielles des apprenants et ses propres références théoriques. Il effectue, ici, une intense activité de contrôle sur les mécanismes d’apprentissages » (Berthoud & Py, 1993: 78). Il n’est pas question de laisser l’apprenant seul face à toutes ces hypothèses et tous ces mécanismes au risque de le voir s’y perdre et se méprendre sur les objectifs à atteindre et les hypothèses à retenir.