3.2. Echelle mésoscopique

Afin d'analyser le savoir enseigné à l'échelle du temps didactique, l'échelle mésoscopique, nous menons une analyse thématique (Tiberghien et al., 2007c, 2007a) qui permet de le structurer par son contenu. En effet, les productions discursives d'une classe (Filletaz, 2001) peuvent être divisées en unités à des échelles de temps de l'ordre de quelque(s) dizaine(s) de minutes. Ces unités ont une structure, avec des frontières et une cohérence thématique. La plupart du temps, elles incluent une introduction et une conclusion, la majorité des énoncés est reliée au même thème. Nous appelons ces unités: "thèmes". La cohérence thématique est basée sur les concepts en jeu: un thème peut mettre en jeu un concept (ou un aspect d'un concept), par exemple le concept de force ou plusieurs concepts liés comme par exemple la relation entre force et mouvement. Un exemple d'un thème peut être une activité ou un exercice ou la présentation d'un modèle où les concepts sont liés par les questions (de l'activité ou de l'exercice) ou par le discours du professeur. En général l'ensemble des thèmes relatifs au savoir (il peut y avoir des thèmes relatifs uniquement à l’organisation de la classe) recouvrent presque la totalité de la séance mais il peut y avoir au début ou à la fin de la séance ou entre deux thèmes un temps consacré à l'organisation de la classe ou au traitement de questions qui ne sont pas en lien avec le contenu d'enseignement. Cependant, les thèmes peuvent être imbriqués, avec des frontières non juxtaposées ; nous les délimitons différemment selon les cas. Toutefois, dans nos analyses, nous sommes arrivés à déterminer les thèmes de manière relativement simple quelle que soit la classe ; ceci montre de manière empirique que le découpage thématique est un découpage relativement adapté à l’analyse des productions discursives d’une classe.

Dans certains cas les thèmes sont divisés en "sous-thèmes". Les sous-thèmes sont des sous-unités du thème qui recouvrent le thème, c'est à dire dont la juxtaposition reconstitue le thème. Ils peuvent être divisés selon les concepts (ou les aspect des concepts) mis en jeu, par exemple, dans le cas d'une activité ou d'un exercice qui comporte plusieurs questions, les questions peuvent constituer des sous-thèmes si elles sont bien délimités (et si elles ne le sont pas on ne découpe pas en sous-thèmes) dans la vie de la classe, c'est à dire si on voit bien le début et la fin de la question: un exercice constituant un thème nommé "bilan des forces et représentation des forces", peut par exemple être divisé en deux sous-thèmes, le 1er "bilan des forces" et le 2ème "représentation des forces" si on arrive à bien les délimiter dans l'activité de la classe. Un autre critère pour diviser un thème en sous-thèmes peut être la situation ou le champ d'application: si un thème portant sur la représentation des forces par exemple met en jeu deux situations différentes, une balle dans l'eau et un crayon posé sur une table par exemple, on peut le diviser en deux sous-thèmes selon ces deux situations, sûrement si elles sont aussi bien délimitées.

Donc comme nous venons de le dire, les sous-thèmes sont des sous-unités du thème qui recouvrent le thème. Dans le cas où un thème contient des sous-unités mais qui ne le recouvrent pas, c'est à dire dont la juxtaposition dans le temps ne reconstitue pas le thème, nous appelons ces sous-unités "imbrications".

Nous pouvons aussi retrouver dans un thème des productions discursives qui ne sont pas complètement reliées au thème ; ces productions constituent alors ce que nous appelons "inclusion" (Tiberghien & Buty, 2007). Par exemple, un professeur introduit une activité expérimentale avec une balle de ping-pong dans l'eau ; la plupart des élèves considère que quand la balle est dans l'eau, la Terre n'agit pas sur elle. Le professeur prend alors le temps de discuter cette question de l'attraction terrestre (inclusion) et retourne ensuite au thème initial.

Ces différentes divisions à l'intérieur d'un thème ont pour unique objectif de décrire de façon plus claire la dynamique du savoir enseigné dans les classes à l'échelle méso. Nous essayons, autant que possible, de donner au thème et à ses différentes subdivisions des noms qui puissent refléter les concepts mis en jeu et leur lien afin d'obtenir des noms qui soient comparables entre classes.

Nous délimitons les thèmes et les sous-thèmes à partir de la transcription et de l'observation des vidéos, surtout pour bien préciser leur début et leur fin. Après les avoir bien délimités dans le temps, nous codons les thèmes a posteriori à l'aide de Videograph afin de les croiser avec les tâches épistémiques (voir paragraphe sur les tâches dans ce qui suit).