Continuité d'un groupe de facettes

La continuité d'un groupe de facettes est le rapport entre la somme des réutilisations de toutes les facettes du groupe et le nombre de facettes introduites appartenant à ce groupe.

Tableau 7. Groupes de facettes les plus réutilisés en classe entière (CE) pour les trois classes et leur continuité. Nv correspond au nombre facettes introduites pour un groupe donné, Réut au total de réutilisations de toutes les facettes du groupe, Cont à la continuité du groupe et σ à l’écart type entre les valeurs de réutilisations des différentes facettes introduites dans un groupe pour chaque classe
Tableau 7. Groupes de facettes les plus réutilisés en classe entière (CE) pour les trois classes et leur continuité. Nv correspond au nombre facettes introduites pour un groupe donné, Réut au total de réutilisations de toutes les facettes du groupe, Cont à la continuité du groupe et σ à l’écart type entre les valeurs de réutilisations des différentes facettes introduites dans un groupe pour chaque classe

Le tableau 7 montre les groupes de facettes les plus utilisés dans les trois classes. Nous avons choisi, pour chaque classe, indépendamment des autres, les 4 ou 5 groupes les plus réutilisés et les avons présentés dans ce tableau. Les blocs conceptuels présents dans l’analyse macroscopique (figure 6) sont tous représentés. Ce tableau 7 montre une similarité au sens où des mêmes groupes sont les plus utilisés dans deux ou trois des classes mais avec des continuités différentes. Une première similarité entre les classes 1 et 3 concerne les groupes « force – interaction » et « vecteur force » mais avec des nombres de facettes et de leur réutilisations plus élevés pour la classe 3 surtout pour le groupe « force – interaction ». Il apparaît que la majorité des facettes de ce groupe « force – interaction » mises en jeu par la classe 3, concerne l’interaction gravitationnelle, ce qui est cohérent avec la structure conceptuelle et thématique de la séquence suivie par cette classe. Cependant, la continuité du groupe « force – interaction » est plus faible pour la classe 3 que pour la classe 1, ce qui traduit une certaine mise à l’écart de certaines facettes de ce groupe dans la classe 3, qui sont très rarement utilisées ou jamais après leur introduction dans cette classe ; alors que pour la classe 1, ces facettes sont utilisées avec une continuité élevée. Un deuxième recouvrement peut être observé entre les classes 2 et 3 pour les groupes « action – interaction » et « représentations et unités » qui sont les plus réutilisés dans la classe 2 et parmi les plus réutilisés dans la classe 3. Toutefois, la classe 2 reprend ces facettes avec une continuité plus élevée pour le groupe « action – interaction » et un peu moins élevée pour le groupe « représentations et unités ». Ceci s’explique pour la classe 2 par l’insistance de la séquence SESAMES sur les actions et les représentations symboliques. Un troisième recouvrement concerne les groupes « force – mouvement » et « force – variation de vitesse » qui sont réutilisés de manière quasi similaire par les classes 1 et 2, avec une continuité légèrement plus élevée pour la classe 2 et une exploitation plus importante du groupe « force – variation de vitesse » pour cette classe. Par contre pour la classe 3, la continuité du groupe « force – mouvement » est très faible (0,4) et celle du groupe « force – variation de vitesse » nulle (2 facettes seulement sont introduites et jamais réutilisées). Ces deux groupes sont en fait à la base du principe de l’inertie ; l’observation de leur utilisation dans les trois classes montre donc que ce principe est peu traité dans la classe 3 et beaucoup plus dans les classes 1 et 2, avec un surplus pour la classe 2 qui garde une continuité plus élevée et une exploitation des deux faces de ce principe, la relation force – mouvement et la relation force – variation de vitesse.

En revanche, deux différences sont observées entre les trois classes concernant le groupe « mouvement » qui est plus repris par la classe 1 (on ne parle pas de continuité pour ce groupe puisque ses facettes ont été introduites avant la séquence filmées et on ne connaît pas donc sa vraie continuité durent l’enseignement) et le groupe « réalisation d’une représentation symbolique », que ce soit la représentation du diagramme système – interactions ou celle de la force, qui est largement plus repris par la classe 2 et avec une continuité élevée.

La continuité observée au niveau des groupes nous permet donc de tirer des conclusions sur la mise en œuvre des différents concepts dans les classes. Il apparaît par exemple, que la classe 1 mise sur la force en tant que vecteur et modélisation de l’interaction entre deux objets, sur le mouvement et sur la relation force – mouvement, avec une continuité uniquement élevée pour le groupe force – interaction (5,7) et moyenne à faible pour les autres (1,4 à 3). La classe 2 mise surtout sur les actions/interactions et les représentations symboliques avec des continuités élevées (2 à 12) pour passer ensuite à la force comme vecteur et modélisation de l’action et au principe de l’inertie dans ces deux faces reliant la force à la vitesse et au mouvement, avec une continuité moyenne à élevée (1,6 à 3,4). En fait ce résultat reflète l’objectif de la séquence SESAMES qui est de développer la notion de force à partir de celle d’action et des représentations symboliques. La classe 3 mise surtout sur la relation force – interaction, action – interaction et représentations et unités, en lien avec l’interaction gravitationnelle, ainsi que sur la force en tant que vecteur. Cependant la continuité est plutôt moyenne (1,4 à 3,5). Le principe de l’inertie est faiblement repris dans cette classe. Enfin, Il est intéressant de voir qu’il y a un rapprochement plus grand concernant l’utilisation des groupes de facettes entre la classe libanaise et chacune des classes françaises qu’entre les classes françaises mais cette similarité dans l’utilisation des groupes ne correspond pas nécessairement à la même utilisation des concepts : l’utilisation par exemple du groupe « force – interaction » dans la classe 1 correspond au bloc conceptuel « force » alors qu’elle correspond dans la classe 3 aux deux blocs « forces gravitationnelle » et «vecteur force » (voir figure 6) ; de même l’utilisation du groupe « action – interaction » dans la classe 2 correspond aux blocs conceptuel «action » et « interaction » alors qu’elle correspond aux blocs « effets de l’action » et « action : caractéristiques » dans la classe 3 (voir figure 6).

La continuité observée à ce niveau permet aussi de repérer certains groupes de facettes qui sont spécifiques de certaines classes, comme par exemple le groupe « phénomènes » et « force – accélération » pour la classe 3 et le groupe « fonctionnement du savoir » pour les classe 2 et 3, ce qui permet de montrer soit une différence dans la structure conceptuelle des séquences des différentes classes (relevée par le groupe « force – accélération ») soit une différence dans le fonctionnement du savoir (relevée par le groupe « fonctionnement du savoir ») ; la classe 3 par exemple réfléchit à la physique en tant que science qui peut expliquer certains phénomènes.

Une dernière conclusion concerne l’utilité de cette continuité au niveau des groupes pour l’explication de la continuité au niveau supérieur, celui de l’ensemble des facettes. L’étude de l’ensemble des facettes nous informe sur la quantité d’introductions, de répétitions et la continuité générale et nous donne donc la dynamique générale du savoir en classe mais ne peut prendre sens sans regarder les groupes et leur mise en œuvre qui permettent de mieux comparer les classes.

Cette notion de continuité d’un groupe a cependant un inconvénient ; elle ne prend pas en compte les différences de réutilisations entre chacune des différentes facettes introduites dans une classe et appartenant à ce groupe. En fait la continuité d’un groupe est une moyenne de la réutilisation des facettes du groupe ; cette moyenne peut être élevée soit parce que les nombres de réutilisations de toutes les facettes sont élevés et dans ce cas nous avons une homogénéité dans les réutilisations des facettes, soit parce que quelques facettes sont très réutilisées et compensent le fait que d’autres ne le sont pas et dans ce cas nous avons une hétérogénéité dans les réutilisations des facettes. Ces deux cas sont très différents et nous poussent à nous poser la question : une continuité élevée d’un groupe est-elle représentative de la continuité de l’ensemble des facettes de ce groupe ou est-elle due à une continuité très élevée de quelques facettes ? Pour répondre à cette question nous calculons l’écart type pour un groupe de facettes ; cet écart traduit l’écartement moyen de la moyenne de l’ensemble des facettes du groupe ; plus l’écart type est élevé, plus il y a une hétérogénéité entre les continuités des différentes facettes. Les groupes ayant les écarts type les plus élevés pour la classe 1 sont : mouvement (6), force-interaction (5,7), force-variation de vitesse (2,9) et vecteur force (2,5). Pour la classe 2, ces groupes sont : action-interaction (6,3), vecteur force (3,3) et mouvement (3). Pour la classe 3, ces groupes sont : vecteur force (4,7) et force-interaction (3). Ces écarts type élevés sont dus essentiellement à des facettes appartenant à ces groupes et qui sont parmi les plus réutilisées dans les trois classes (voir le tableau 8 qui suit). Ces facettes créent donc une certaine hétérogénéité dans la continuité de leur groupe d’appartenance : elles sont très réutilisées alors que d’autres le sont très peu ou pas du tout. Donc nous pouvons dire que la continuité de ces groupes ne reflète pas celle de certaines facettes de ces groupes.