3. Configuration de la société.

Pour maintenir le caractère historique et la richesse des renseignements reçus, nous avons choisi de reprendre in extenso la hiérarchie sociale que présente Flavien Nkay 57 . Il indique que, avant la Première Guerre mondiale, on observait encore, dans la société des Ding orientaux, l’existence de plusieurs hiérarchies sociales aux statuts différents. Une noblesse était constituée de l’ensemble des membres du clan royal (clan Ntshuum), des fils et petits-fils associés au pouvoir royal, les dignitaires chefs de terre et porteurs d’une “ position name ”, auxquels il fallait ajouter tous ceux que Luc Heusch appelle “ monstres sacrés ” 58 (Jumeaux, albinos, nain devin, sorcier) . Cette catégorie était qualifiée de Nkm (Nkum, Kumu). La majorité de la population avait cependant un statut social normalisé. Elle constituait la classe des hommes libres Mayul, soumise à l’autorité du clan royal, à qui elle versait un tribut noble, constitué, aux dires du Père Janssens, «  d’une partie de la chasse, seulement de la viande d’un cochon, pas une autre viande » 59 .

Au sein de chaque communauté villageoise, les hommes libres se divisent en classes d’âges :

Jusque vers les années trente, les témoignages des Missionnaires parlent encore d’esclavage. L’Etat n’avait apparemment pas facilement vaincu le système. Voici ce qu’écrit le R. P. Struyf en 1923 : “ Chez toutes les peuplades de notre nouvelle mission, Bangoli, Ding, Balori, Banzari, etc., on rencontre des mœurs vraiment barbares. Enterrement des personnes vivantes. C’est l’habitude d’enterrer, encore vivants, plusieurs esclaves, à la mort d’un chef ou d’un notable de village, homme ou femme. Ces esclaves doivent descendre dans la fosse pour recevoir le cadavre, et il se passe alors des scènes lugubres 60 . C’étaient plutôt des scènes abominables. Il faudrait noter l’existence, chez les Ding orientaux, de deux sortes de conditions serviles : en premier lieu, les gages ou Ntwa ; ce sont les personnes que les familles ou les clans livraient à d’autres, en guise de paiement d’une dette. Elles vivaient presque comme des esclaves mais gardaient l’espoir de s’affranchir si la famille payait la dette auprès du créancier ; En second lieu se trouvaient les esclaves proprement dits, Mwa mfum. Ils sont souvent d’origine étrangère, n’appartiennent à aucun clan, sont entièrement dépendants de leur maître, sans lequel ils seraient seuls contre leurs adversaires. Ils sont acquis par achat, rapt ou du fait de la naissance. Au XIXème siècle, le commerce dans la « zone du fleuve », les bouleversements dus à l’expansion Cokwe dans la savane du Sud et les relations avec les ethnies voisines ont favorisé la présence de plusieurs esclaves chez les Ding orientaux. Jadis dénoncée par les missionnaires, la pratique d’enterrement des chefs avec leurs esclaves n’existe plus aujourd’hui.

Notes
57.

NKAY MALU, F., Les Missionnaires catholiques chez les Ding orientaux de la République Démocratique du Congo. 1885-1964, Mémoire de D.E.A., Université Lumière Lyon 2, Lyon, 2001.

58.

De HEUSCH, L., Les rois Kongo et les monstres sacrés, Paris : Gallimard, 2000, 424 p.

59.

JANSSENS, Op.cit., p.5.

60.

STRUYF Y., “Mœurs et coutumes” in Missions Belges de la Compagnie de Jésus, 1923, p. 252.