Une remarque : Les réponses à cette question nous amèneront à reprendre certains thèmes déjà développés dans notre thèse.
- Causes structurelles, que décrit Le Mémorandum des évêques du Zaïre, réunis à Kinshasa du 7 mars 1990 au 9 582 . Les structures de l’Etat congolais vivent un système politique hybride, s’inspirant du libéralisme (jouir de la propriété privée – ce qui ne profite que très peu à la majorité des Congolais-), du totalitarisme (conquête et maintien du pouvoir par un homme ou un groupe– ce qui donne naissance à un pouvoir absolu, autocratique) et du recours à l’authenticité (ce qui donne naissance à un pouvoir monarchique et ignore la solidarité du chef de l’Etat avec tout son peuple et la participation de tous à la gestion de la chose publique).
Quelques raisons justifient et renforcent cette façon de faire :
L’Historien congolais Isidore Ndaywel au sujet de la crise des structures politiques, écrit : « Les structures politiques subirent une fois de plus des transformations dans l’espoir d’éviter des dérapages et d’assurer un contrôle strict de l’ensemble de la vie nationale. Le changement ne survint pas pour autant. Il fallait plus qu’une simple réforme et qu’une déclaration de bonnes intentions pour faire sortir le régime du carcan dont il s’était fait lui-même prisonnier. » 584
Toutes ses actions (société) seront de plus en plus éclairées par cette « philosophie », que nous avons souvent dénommée idéologie mobutiste.
Avec l’Authenticité, Mobutu a sûrement dépopularisé l’école, et donc désintellectualisé la société. La zaïrianisation en 1970 et la révolution contre l’école (moins d’écoles missionnaires, pour peu d’élites et peu de chrétiens, garants des valeurs) en disent long. Il le manifeste par l’étatisation des écoles, avec les conséquences graves des années 1971-1972 et 1973-1975 (Rivalité Etat-Eglise).
Ainsi, la société se donneses principes propres, en vue de dénoncer l’Etat. Concrètement, « cette morale populaire » vise la fin du règne d’un Etat fictif. Cependant, les moyens pour y arriver – et c’est là que la population elle-même se compromet – sont déloyaux et provoquent le désengagement total de l’homme dans la construction du pays. Du coup, la société congolaise se trouve démobilisée sur le plan moral et vit des anti-valeurs : l’oisiveté et l’irresponsabilité, le manque de conscience professionnelle, la complicité et la solidarité dans le mal, la paresse, l’individualisme, l’égoïsme. La nation congolaise contribue elle-même à conduire le pays au fond de l’abîme. De fait : « …Le fonctionnaire ne devait jamais trop s’adonner au travail car « le travail de l’Etat ne se terminait jamais » (Mosala ya leta esilaka te). Au don Quichotte qui aurait contredit ce propos, on rappelait que le relèvement du Zaïre était bien éloigné dans le temps ! « Celui qui doit redresser cette société n’est pas encore né » (Moto akobongisa mboka oyo, naino abotami te !) » 587 Ces phrases étaient chantées d’une manière ou d’une autre dans des écoles, par les parents, les jeunes, et elles maintenaient la société dans un minimalisme consenti depuis bien avant 1978, où l’on dénonce le « Mal zaïrois ».
Cfr. NGOMO-OKITEMBO, L., Op. cit., p. 306-310.
MINISTERE DE L’EDUCATION NATIONALE DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO, Plan-cadre national pour la reconstruction du Système éducatif de la République démocratique du Congo. 1 : Présentation du Plan-cadre, Kinshasa : Cabinet du Ministre, août 1999, p.iv.
NDAYWEL E NZIEM, I., Op. cit., p. 750.
Ibid., p. 749.
Idem.
NDAYWEL E NZIEM, I., Op. cit., p. 749.