3. Conditions et Actions pour l’éducation aux valeurs dans le cadre d’un nouveau projet de société.

3.1. Conditions :

Dans le cadre d’un projet éthique de société et de la responsabilisation de ses membres, le nouveau système éducatif doit devenir un fait politique, c’est-à-dire que les autorités de l’Etat doivent prendre à cœur le secteur de l’enseignement et l’intégrer dans leur programme de budgétisation afin de permettre le fonctionnement de ce secteur dans le respect des principes et des objectifs définis avec tous les autres acteurs de l’éducation en partenariat avec l’Etat. Et, par rapport à l’éducation aux valeurs, l’article 17 de la nouvelle Loi-cadre de 1999 portant organisation du système éducatif en RDC nous propose d’intégrer les valeurs humaines, morales, spirituelles, éthiques, culturelles et civiques préconisées dans le nouveau projet de la société congolaise. Cela doit aussi reprendre le passé dans ce qu’il a de meilleur, surtout les valeurs de l’éducation traditionnelle que transmet « une pédagogie par transmission orale et gestuelle » dans l’initiation, et par l’exemple et l’action, dans l’apprentissage de l’art, de la technique et des métiers. Car cette éducation par l’initiation et l’imitation confère à l’enfant son statut d’adulte et lui permet d’acquérir les valeurs essentielles de la vie. Il conviendrait d’assurer aujourd’hui cette initiation dans la famille en tant que lieu d’éducation, et dans la communauté dont « les principaux acteurs appartiennent aux milieux éducatifs suivants : la famille, la rue, l’Eglise et l’Etat. » 645

En vue d’une action efficace, la communauté doit pouvoir recourir aux principes éducatifs chers à l’éducation traditionnelle dans l’initiation, à savoir : « l’exemple, la cohérence dans l’action, l’autorité des parents, des aînés, le contrôle du comportement des jeunes, la participation de l’initié, la participation de tout le monde, le pragmatisme, l’informel, le naturel, le conte, les énigmes, le silence (la culture du silence), la progressivité (respect des étapes développementales), le regard significatif, le cadeau, l’éloge, le conseil, (…). » 646 La communauté pourra ainsi jouer efficacement son rôle dans l’éducation de l’enfant avant de comprendre qu’elle doit faire de l’école son affaire. Par contre, elle ne devra pas écraser la jeunesse par sa suprématie qui pourrait se manifester dans le souci d’une « copie-conforme ou de l’éducation selon « l’école de la copie » 647 . Ce rôle social de la communauté par les bons exemples et par l’action peut aider la jeunesse à devenir adultes. « Cela n’est possible que par une authentique éducation de la jeunesse à la paix, à la justice, à l’entente, à la réconciliation, à l’honnêteté, à l’effort, au respect, au dialogue contradictoire (la palabre). » 648

Notes
645.

MPIANGU di nzau (Facultés catholiques de Kinshasa), Les aspects pédagogiques de l’initiation de la jeunesse congolaise dans la société traditionnelle : le rôle de la communauté, in SEMAINES THEOLOGIQUES DE KINSHASA, L’Education de la jeunesse dans l’Eglise-Famille en Afrique. Actes de la XXI è Semaine Théologique de Kinshasa du 22 au 28 novembre 1998, Facultés Catholiques de Kinshasa 2001 : Saint Paul-Limete-Kinshasa, 2001, p. 39.

646.

Idem.

647.

Dans son article « Approche psychologique des idiocosmognosies sociales en matière d’éducation de la jeunesse : L’émergence de l’école de la copie » (Cfr. L’éducation de la jeunesse dans l’Eglise-Famille en Afrique, p. 30), le Professeur NGUB’USIM Mpey-Nka (Université de Kinshasa), « l’école de la copie est celle qui forme l’individu à l’assimilation, à l’imitation et à la routine, et fait de lui un conformiste à l’esprit peu indépendant, peu compétitif, peu motivé à remettre en question son environnement, peu sensible aux problèmes et aux situations nouvelles, résistant au changement ».  Pour amenuiser ou supprimer les effets de l’école de la copie, il propose une révolution dans le système éducatif de la RDC. Cette révolution, souligne-t-il, est celle où l’éducation, tout en jouant son rôle de socialisation de l’enfant, forme en lui un changement et le développement de la communauté. C’est celle d’une éducation inspirée de la pédagogie de la créativité et de l’innovation, basée sur les principes du non conformisme, de la non-directivité, de la tolérance, de la réceptivité aux idées et aux courants neufs de pensée. Cette révolution n’est pas simplement possible, elle est un impératif  (p. 34).

648.

ETSOU, F., Lés défis et les enjeux pastoraux de l’éducation de la jeunesse dans l’Eglise-Famille en Afrique, in SEMAINES THEOLOGIQUES DE KINSHASA, L’Education de la jeunesse dans l’Eglise-Famille en Afrique. Actes de la XXI è Semaine Théologique de Kinshasa du 22 au 28 novembre 1998, Facultés Catholiques de Kinshasa 2001 : Saint Paul-Limete-Kinshasa, 2001, p. 10.