Bachelard, tout comme Freud, envisage une transformation de cet inconscient cognitif. Il connaît le rôle thérapeutique précédemment attribué à la catharsis (décharge émotionnelle) puis au transfert (névrose artificielle). Il a conscience que la psychanalyse de la connaissance ne peut s’appuyer sur la seconde méthode freudienne (pas de place pour une interpsychologie). Pour contrôler le fantasme il doit fonder ses espoirs sur la première.
Cette catharsis s’effectuera selon une pédagogie dont on peut déterminer quatre moments 296 . Ce sont respectivement : la psychologie de l’aveu (des sottises), la rhétorique de la (contre) suggestion, le langage de l’intégration rationnelle (algébrique), la pédagogie de l’enseignement mutuel. La dernière dimension rappelle qu’il ne faut pas surestimer l’importance du processus magistral de « rectification discursive ». Bachelard critique en cela la relation maître / élève traditionnelle. Cette dernière, parce que portant trop à la passivité, ruine l’esprit critique. Or, le traitement de l’erreur requiert un fonctionnement social de la catharsis. La correction est alors plus fraternelle que paternelle. On y alterne l’empirisme de l’enseignement reçu (faits) et le rationalisme de l’enseignement donné (raisons).
La formation, selon Bachelard, se veut une trajectoire interactive et théoriquement surveillée. Elle se distingue à la fois de la « leçon de chose » et de l’enseignement dogmatique ou formaliste. La première est soucieuse de partir du vécu (ancrage psychologique fécond) mais finit par s’embourber dans le concret. Elle oublie que le scientifique ne se situe pas uniquement dans le prolongement d’une curiosité naturelle (présupposé de continuité épistémologique). Elle néglige donc que la science ne part pas des faits mais des problèmes. La seconde aspire à faire grandir intellectuellement (intention légitime) mais installe précipitamment dans l’abstraction. Elle feint de croire que la raison pédagogique peut se hisser directement au niveau de la raison scientifique constituée (parti pris d’une discontinuité épistémologique). Elle sacrifie à tort le monde des représentations, des commencements, et noie dans un savoir final, celui du fondement.
La position moyenne de Bachelard (rationaliste) peut se préciser sous forme d’un tableau comparatif en trois pans :
La pédagogie alors prônée ne se contente plus d’opposer le vrai à l’erreur (alternance d’une correction entre pairs et d’une rectification magistrale). Elle ne travaille pas ponctuellement à partir ou sur du « déjà-là » (prise en compte signifiante des représentations). Elle incite à développer toutes les implications de l’analogie du travail pédagogique et de la cure analytique.
Voir chez Bachelard la leçon d’astronomie en fin de La Formation de l’esprit scientifique. 1938.