Supports pour le concept de monde

Contrairement au phénomène de digestion, les modèles concernant notre planète et son ciel ont fait l’objet d’un recensement (figure 3). Ils permettent de comprendre que le nombre de propositions historiques se ramène à cinq (Nussbaum, 1990). Le passage à un modèle scientifique (type 5) exige la modification de trois composantes. Le concept de forme doit tendre vers la boule (le monde plan s’incurve et se ramasse sur lui-même). Cela influe sur la nature de l’espace (plus de socle ni de ciel horizontal) et sur les comportements de « chute » (au final trajectoires radiales et verticales).

Figure 4-3. Typologie des conceptions « monde »
Figure 4-3. Typologie des conceptions « monde »

Un parallèle entre l’histoire des sciences et les transformations conceptuelles des apprenants amène à utiliser des fiches spécifiques. Celles-ci s’inspirent d’études [Almany, Sarate (1986 ; Baxter (1989) ; Nussbaum (1991)], mais aussi d’outils concrets [Estalella (1986) ; Vosniadou, Brewer (1992) ; Peyronnet (1993)]. Elles répondent également aux exigences particulières de ce public (troubles cognitifs, adualisme, comportements de croyance immédiate) [Dumas (2003)]. Ces fiches sont ici au nombre de six et obéissent à un ordre de passation.

La première, dite d’expression libre, s’intitule « Pour que l’on comprenne comment vous voyez notre planète et l’espace » (figure 4). Il s’agit pour le maître de séparer les conceptions de type 1-2 (horizontalité absolue du sol) des autres (rotondité terrestre). Une question résume l’interrogation, une consigne donne la marche à suivre, un cadre borne le dessin (2/3 page A4).

Figure 4-4. Fiche d’expression libre
Figure 4-4. Fiche d’expression libre

La deuxième est destinée à lever l’illusion possible du cercle (figure 5). Tracer un « rond » n’est pas nécessairement un indicateur de conception sphérique (type 2) ou de modèle-boule (type 3 à 5). L’image socialement valorisée (circulaire) prime souvent sur le fonctionnement cognitif (vision en plan). Un paramètre perturbateur est donc introduit (fusée).

Figure 4-5. Fiche confirmation
Figure 4-5. Fiche confirmation

Les quatre fiches suivantes cherchent à savoir jusqu’où la notion de centre gravitationnel est maîtrisée (fiches 6, 7, 8, 9). Leurs titres annoncent les situations à réfléchir. Elles commencent toutes par : « Pour que l’on comprenne… » et focalisent ensuite un comportement d’objet : « […] un objet lourd passant à l’intérieur d’une planète », « […] un objet que l’on lancerait en l’air », « […] une grosse pierre lâchée à l’entrée de deux tunnels dans la planète », « […] une bouteille pleine mais ouverte est posée sur une planète ».

Fiche 4-6. Fiche un seul tunnel
Fiche 4-6. Fiche un seul tunnel

Dans la majorité des cas, il s’agit pour l’enfant de tracer le chemin suivi par l’objet pesant. Toutefois, pour la fiche n° 4, il faut aussi colorier le ciel.

Fiche 4-7. Fiche trajectoire balles
Fiche 4-7. Fiche trajectoire balles

Le cinquième support, pour dépasser le facteur « chance », est en deux feuillets (neuf situations - voir résumé en infra).

Figure 4-8. Fiche deux tunnels
Figure 4-8. Fiche deux tunnels

La dernière fiche, comme d’ailleurs les n° 3 et 4, s’efforce de réduire les effets de cadre. Ici, l’induction de « chute » doit rester limitée.

Figure 4-9. Fiche trajet du liquide
Figure 4-9. Fiche trajet du liquide

Résumons avec les images les diverses suggestions.

Figure 4-10. Fiche synthèse des situations
Figure 4-10. Fiche synthèse des situations

Là, les enseignants ont été particulièrement vigilants à la forme de planète exprimée et aux comportements des objets. Leurs efforts permettent de repérer trois grandes conceptions (plane, sphérique, boule). La première recense des apprenants qui considèrent la Terre comme un plateau tout en intégrant partiellement la circularité (vie entre deux couches). La suivante rassemble ceux qui se représentent la Terre en deux hémisphères, l’un solide, l’autre gazeux-stellaire (vie intra-globe). La dernière regroupe ceux qui conçoivent un volume plein mais non gravitationnel (vie en surface). Dans chaque catégorie, le bas et le haut restent des directions absolues (verticalité).

Figure 4-11. Modèles co-présents et réponses caractéristiques
Figure 4-11. Modèles co-présents et réponses caractéristiques

La règle d’interprétation, en l’absence de renseignements supplémentaires est la suivante : c’est l’indice du modèle le plus faible qui l’emporte. Deux « juges » procèdent au dépouillement.

Il convient maintenant que chacun, enseignant comme élève, tire profit du prélèvement et du repérage des dominantes (préoccupation n° 2 de cette initiative).