Nous présentons ci-dessous les procédures le plus souvent utilisées avec le récit retenu, celui adressé à un public enfants de J. Gaarder : Le petit frère tombé du ciel.
Tout d’abord, il convient de laisser découvrir ce support. Les élèves de CL.I.S. doivent pouvoir toucher l’objet, comprendre la couverture, reconnaître sa structure (texte, images, dessins), émettre des hypothèses sur le contenu.
Le maître lit le premier chapitre qui plante le décor (promesse, âge, qualité du souvenir, introduction de Mika, maternité, contexte d’attente, certitude d’avoir un petit frère, première envie d’accompagnement, comparaison avec un astronaute, départ des parents, atmosphère sombre, solitude). Il a recours ensuite à un retro projecteur et présente un visuel de la structure du texte à travers ses huit chapitres. Il rappelle d’emblée à l’aide de l’icône « enveloppe » que l’histoire repose sur une correspondance entre Joakim (adulte) et Camilla (enfant). L’habillage est encore celui de type parchemin (comme avec les énigmes). La partie qui va à nouveau mobiliser les esprits se voit entourée (figure 24).
Lors de la séance suivante, une lecture partagée est mise en œuvre avec les lecteurs (tous les élèves ont le livre en main). Les autres écoutent et ont pour consigne de pouvoir reformuler au fur et à mesure les principales idées. L’enseignant les inscrit au tableau en veillant à une bonne distribution de la parole. Les « petits lecteurs » doivent ensuite signaler la présence des « lapins bulles » et les compter.
Ils en font une description la plus exhaustive possible afin d’établir quelques passerelles avec la question associée. Le maître projette les dessins présentant un apport par le contexte, une première fois sans texte, une seconde fois avec (exemples figure 25). Il permet une nouvelle fois (objectifs d’apprentissage) de prendre conscience que l’écrit apporte toujours quelque chose de plus en limitant l’interprétation de l’image.
L’enseignant profite de ce renforcement pour inciter les élèves à pointer les particularités de cet ouvrage (deux natures différentes de graphisme : illustration et dessins bulles ; thème abordé : statut d’un nouveau né dans un monde déjà là ; interpellations régulières : texte, dessin bulle, attitude de Mika). Il se permet ensuite et seulement de formuler une question : « Mais dites -moi… c’est un livre, pour quoi faire ? » Une discussion s’engage et les premières propositions fusent du type : « C’est l’histoire d’un lapin qui parle… », « N’importe quoi, un lapin ça parle pas ! », « Non, c’est pas ça, euh… c’est pour aider… », « Ouais, c’est l’histoire d’une fille… », « Mais non, ça raconte sur un garçon … », « Non, y en a deux ! », « Ouais, ils se parlent sur le toit »…
Le maître doit régulièrement recentrer sur sa question mais aussi rappeler les règles pour dialoguer de manière constructive. Il insiste pour qu’on s’attache maintenant au but et non à la trame : « Tout ce que vous dites est très intéressant… mais je demandais à quoi pouvait servir cette histoire ? ». Cette nouvelle formulation suscite habituellement quelques réactions : « Ah ouais, d’accord… », « Ben moi, j’dirais que c’est pour nous faire peur ! », « Moi, j’dirais que c’est pour rencontrer quelqu’un de bizarre ! », « C’est pour qu’on lise mieux ! », « Moi, j’la connais l’histoire, j’l’ai lue chez moi ! », « N’importe quoi, on cause pas de l’histoire ! », « T’es vraiment un gogol », « Ben moi, j’dis que c’est les questions qui comptent ! ».
L’enseignant saisit la remarque qui rapproche de l’attendu : « Pas mal… mais pourquoi les questions pourraient avoir autant d’importance ? ». Habituellement, ce rebond ne débouche pas sur des propositions satisfaisantes (« Parce que c’est des pièges », « Parce que c’est plus difficile », « Parce que c’est dur de trouver », « Parce que ça fait peur »…). La question et les premiers éléments de réponse rejoignent la précédente trace sur les idées principales du premier chapitre. Elles serviront un résumé qui sera présenté une prochaine fois.
Quelques activités décrochées sont envisageables. L’une consiste à faire la lecture d’un autre récit, plus court et faisant pendant à la question restée en suspens. Le maître peut retenir par exemple une fiction telle que Monsieur Toutgris, Le ramasseur de pensées 473 . Il a ainsi une occasion de valoriser le temps de lecture à la classe tout en apportant de quoi rebondir. Les élèves seront ensuite encouragés à distinguer les différentes sortes de pensées et à en exprimer quelques unes par écrit. À cet effet une fiche format A4 est distribuée individuellement (figure 26).
D’autres décrochements sont encore possibles. On pense notamment aux activités liées aux arts visuels. Le maître peut demander de dessiner (personnage et/ou situation) :
– Joakim – Mika – La maman de Joakim – Joakim après le départ de ses parents … |
– Le papa de Joakim – Tatie Hélene – Une question – La maison de Joakim … |
Il est également opportun de faire raconter voire jouer :
– La maman quand elle ne prend pas Joakim sur ses genoux (psychologie, attitudes) – Un souvenir vrai /faux ou un rêve … |
– Quelque chose de bizarre (sensations, mimiques…) – Un moment difficile (circonstances, lieu, actions, solution) … |
Ces procédures peuvent être reproduites avec chaque chapitre et enrichies d’activités annexes.
Nous allons privilégier ensuite un comportement surprenant de Mika, l’extraterrestre tombé dans le jardin de Joakim. Il s’agit de la révérence. Ce geste apparaît pour la première fois dans la partie deux. C’est là que les jeunes garçons se rencontrent, une nuit où une étoile filante traversait le ciel. Mika s’était retrouvé la tête en bas, suspendu au pommier devant la fenêtre. La prise de contact réserve quelques surprises. Un ensemble de conventions sépare Joakim et Mika (rêve /réalité ; accompagnement corporel des pensées et de leur verbalisation ; appellation stellaire).
Le maître a préparé sa carte conceptuelle et découpé le texte à lire en quatre ou cinq séquences (figure 27).
Après chacune de ces lectures (partagées et structurées comme précédemment) les élèves sont invités à énoncer une question à propos de l’histoire. Le maître les écrit au tableau puis effectue un premier groupement, particulièrement récurrent en CL.I.S. 1 : sans personnage de l’histoire, avec un ou plusieurs personnages). Il propose ensuite aux enfants une distinction en fonction des thèmes formulés dans les questions (par exemple : les sens ou le cerveau, les comportements, l’endroit). Il relit les différentes propositions (questions) suite à la nouvelle disposition. Il pointe enfin la similitude des catégories ajoutés à chaque groupement (personnages avec / sans) et suggère de rassembler les deux séries (trois critères ).
Une des questions est alors à choisir consensuellement en rappelant son dernier groupe d’appartenance (détachement progressif des critères de proximité). Elle sert à lancer le débat la fois suivante.
Une fiche est distribuée individuellement pour garder en mémoire sa question puis celle retenue par le groupe classe (figure 29). Elle reprend la situation visualisée dans le parchemin (chapitre lu) et les différents dessins-bulles rencontrés (lapin blanc interrogateur). Ce document rejoint celui exploité en activité décrochée 1 (écoute de l’ouvrage Monsieur Tougris). Ils sont intégrés au classeur individuel « Pourquoi ? / Comment ? organisé en quatre parties (Astronomie et Biologie, Chimie contre magie, Énigmes, Argumentation).
Ces divers travaux, nous l’avons annoncé, préparent à l’accueil d’une attitude quelque peu déconcertante.
M. Feth, Monsieur Toutgris, Le ramasseur de pensées, illustrations A. Boratinsky, Actes Sud Junior.