1. L’influence du saint-simonisme

Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon, était un noble libéral, défenseur du progrès industriel et des entrepreneurs, mais son analyse du progrès économique et de ses conséquences sociales s’éloignait de celle des libéraux. En effet, l’organisation politique qu’il promouvait, écartant les nobles, les militaires, les rentiers et privilégiant les hommes d’affaires, assistés par les savants, devait permettre un développement industriel harmonieux au service du bonheur de l’ensemble de la société 1360 . A la mort de Saint-Simon, plusieurs disciples, qui compléteront sa doctrine, et des étudiants se rassemblèrent d’abord autour de Rodrigues, puis d’Enfantin 1361 qui fonda en 1824 avec des amis de Saint-Simon et grâce à des banquiers libéraux, le journal “Le Producteur”, auquel collaborèrent des futurs fondateurs de mouvements socialistes comme Blanqui, Cabet et Buchez. En 1829, les saint-simoniens se constituèrent en groupe religieux et désignèrent deux “pères”, Enfantin et Bazard. La propagande devint alors active et grâce à des appuis financiers, commença à se répandre en France 1362 . Des missions furent envoyées en province : le 19 avril 1831, le journal “Le Globe” acheté par les saint-simoniens, annonçait le départ d’une mission dirigée par Laurent 1363 , accompagné de Pierre Leroux 1364 et du lyonnais Jean Reynaud, ingénieur des mines et rédacteur en chef du “Globe”. La mission arriva à Lyon début mai et connut beaucoup de succès puisque la salle de la Loterie qui rassembla 1 500 personnes lors de la deuxième séance, se révéla insuffisante et il fallut utiliser par la suite le cirque des Brotteaux où furent rassemblées le 20 mai, 3 000 personnes 1365 . Jean Reynaud y parla de la propriété et souligna la misère permanente pour ceux qui enfantaient l’opulence.

La propagande saint-simonienne ne laissa pas indifférent “un jeune homme de dix-huit ans, Frédéric Ozanam 1366 ” qui avait pu assister, en avant-première, à une “prédication” de Jean Reynaud dans l’atelier d’un tisseur de la Grande-Côte 1367 . Le jeune lyonnais envoya au journal “Le Précurseur“ ses “Réflexions sur la doctrine de Saint-Simon par un catholique” et le libraire Périsse accepta d’en faire une brochure d’une centaine de pages qui parut à la fin du mois de juillet. Ozanam critiquait surtout la partie historique de la doctrine des saint-simoniens et reprochait à leur religion de se réduire à “une doctrine de philanthropie ayant pour base une conception panthéiste de l’Univers” 1368 . Aux saint-simoniens qui affirmaient que le christianisme avait condamné les sciences à l’oubli, il répondait en se lançant dans une longue énumération destinée à démontrer le contraire ; quant au système organique de Saint-Simon, le jeune lyonnais lui reprochait d’envisager une propriété devenant commune alors que, disait-il, la propriété était “un besoin pour l’homme” 1369 .

La propagande des disciples de Saint-Simon trouva un écho plus favorable auprès des chefs d’atelier de la Fabrique, et lorsque la mission repartit le 23 juin 1831, l’Eglise saint-simonienne de Lyon, à laquelle s’ajoutèrent les Eglises de Marseille, Toulouse, Montpellier et Brest, était fondée. Les chefs d’atelier approuvaient l’acte d’accusation contre l’ordre social existant, le dénigrement des oisifs de même que la critique du dogme de la liberté de l’industrie. Dès le deuxième numéro du 6 novembre 1831, l’“Echo de la Fabrique” avait reproduit des passages d’un ouvrage saint-simonien 1370 et le journal, sous l’influence du saint-simonien lyonnais Arlès-Dufour 1371 , qui collaborait à l’“Echo”, préconisait l’association universelle des travailleurs, en publiant le 27 mai 1832, une adresse “A nos frères d’Angleterre” rédigée par ce dernier et qui affirmait la solidarité des peuples 1372 .

Le saint-simonisme eut des adeptes à Lyon dans divers milieux sociaux, même si les convertis à la nouvelle religion le furent souvent de manière assez temporaire, comme le chef d’atelier royaliste Pierre Charnier, le poète Louis-Agathe Berthaud, le docteur Imbert ou la féministe lyonnaise Eugénie Niboyet 1373 . Toutefois, le saint-simonisme séduisait surtout une certaine élite, comme le montre la liste des personnes dignes de recevoir “Le Globe”, dressée en avril 1832, par Ribes, missionnaire envoyé à Lyon par Enfantin : on y trouve le préfet Gasparin, ce qui peut expliquer sa compréhension à l’égard des canuts lors des événements de l’automne 1831, les deux jeunes fabricants aux idées novatrices, Arlès-Dufour, ami d’Enfantin, et Derrion, cinq médecins dont l’adjoint au maire, Terme, mais aussi les fondateurs du mutuellisme, Bouvery et Charnier 1374 . La propagande saint-simonienne pénétra difficilement chez les ouvriers d’autant plus que ces derniers se tournaient de plus en plus vers les associations mutuellistes et républicaines.

Apôtres de paix, les disciples lyonnais saint-simoniens n’ont pas pris part à la révolte de 1831 et après celle-ci, ils demandèrent un changement de stratégie aux pères de l’Eglise saint-simonienne de Paris qui se contentèrent de leur dire de continuer à être les médiateurs entre ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas 1375 . Mais l’insurrection ouvrière et le schisme du père Bazard, qui s ‘était brouillé avec Enfantin en 1832, avaient jeté le trouble dans l’Eglise saint-simonienne de Lyon où Enfantin envoya deux missionnaires, Ribes et Massol. Ces derniers firent distribuer, au début de 1832, une proclamation “aux Lyonnais”, faisant appel aux industriels, fabricants et ouvriers, aux artistes et aux femmes. Leur programme reposait sur “un système d’association, pouvant seul faire cesser la crise actuelle 1376 ”. L’exode des saint-simoniens parisiens en direction de Lyon s’accentua en 1832 car ces derniers subissaient une répression policière 1377 . A Paris, Michel Chevalier écrit la proclamation intitulée “A Lyon”, où il recommande l’exode vers le “plus grand foyer de production et d’économie dont s’enorgueillisse le continent européen”, vers ce “Lyon, travailleur infatigable, assis sur le Rhône et la Saône…”. A partir du 7 novembre 1832, plusieurs groupes de missionnaires arrivèrent à Lyon et le 25 novembre, toute la famille saint-simonienne de Lyon se portait à la rencontre de deux missionnaires revenus du midi et, en cortège, traversa les faubourgs, le pont de la Guillotière, les Brotteaux et se rendit à un banquet 1378 . La plupart des missionnaires venus de Paris voulurent connaître l’épreuve du travail manuel salarié et s’embauchèrent dans les ateliers et les chantiers lyonnais au début de l’année 1833. Un rapport de police signale que leur arrivée a été à l’origine de coalitions pour obtenir une augmentation, en particulier chez les ouvriers fondeurs 1379 .

L’année 1833, année extraordinaire, disait Enfantin, dix-huit siècles après la mort sur une croix du divin libérateur des esclaves, devait être celle de l’affranchissement des femmes, l’année où la Femme allait se ranger aux côtés de l’Homme pour établir la nouvelle religion 1380 . Enfantin avait une position assez ambiguë concernant la condition féminine puisqu’il réclamait l’émancipation et l’égalité des femmes en tant que genre et en même temps, il voulait une complète liberté des sexes et avait institué un “couple prêtre” à la vocation équivoque 1381 . Le 15 janvier 1833, un mois après l’emprisonnement d’Enfantin 1382 et le départ du saint-simonien Barrault de Paris en direction de Lyon, celui-ci déposa l’autorité qu’il avait prise au nom du Père et, considérant la société saint-simonienne comme dissoute, il décida d’instituer l’association des “Compagnons de la femme”. A la fin du mois de janvier 1833, Barrault prit la décision de partir pour l’Orient et déclara à ses amis : “je sais où est la Mère, en Orient … Orient ! Occident ! Femme ! Homme ! Voilà l’hymen de la terre et de l’humanité !” A la prison Sainte-Pélagie à Paris, le Père Enfantin avait eu la même pensée et écrivit le 26 janvier à Barrault : “J’entends, du fond de ma prison, l’Orient qui s’éveille … le temps est venu. Tu peux m’annoncer à l’Orient et y appeler la Mère” 1383 . Le 15 février 1833, Barrault apprenait au public lyonnais dans son opuscule “1833 ou l’année de la Mère” le voyage d’Orient et le 4 mars, il quittait Lyon avec onze compagnons. Le père Enfantin, gracié le 1er août 1833, se mit à son tour en route pour l’Orient et prépara son expédition d’Egypte 1384 . Le 1er septembre, il arrivait à Lyon et les femmes saint-simoniennes de Lyon, les vingt “femmes de la Mère” lui remirent, par la main de Clorinde Rogé, le signe de “célibat rompu”, qui devait mettre fin à cette période qui avait commencé en mars 1832 à Ménilmontant 1385 . L’“Echo de la Fabrique” du 15 septembre 1833 salua le passage des saint-simoniens partant pour l’Egypte, rappela que leur dévouement pour le peuple était apprécié, mais fit des réserves concernant leurs idées religieuses 1386 .

On peut imaginer que les catholiques lyonnais, à l’image d’Ozanam, étaient plus que réservés au sujet de la religion saint-simonienne. Avant d’évoquer des liens qui ont pu s’établir entre saint-simoniens et catholiques, il nous faut d’abord préciser comment ces derniers, et globalement, les auteurs des divers socialismes, faisaient le lien entre l’évangile 1387 et l’avenir de l’humanité. Le discours socialiste sur le Christ sert alors à véhiculer l’espérance et veut situer le royaume de Dieu dans l’avenir de l’humanité. Les socialistes tentent de matérialiser le paradis spirituel et la vie future des chrétiens. Alors que les premiers font dépendre le progrès de l’organisation de la cité, le christianisme le subordonne à la régénération individuelle 1388 . Saint-Simon considérait la morale chrétienne comme négative et individualiste. Dans son “Nouveau christianisme”, il réduisait le “divin” du christianisme au principe de l’amour fraternel. Les disciples poursuivirent dans la même optique en soulignant dans “L’exposition de la doctrine” (1831), que le christianisme enseignait la fraternité universelle, mais qu’il en méconnaissait les conséquences sociales et politiques en disant que cette fraternité ne devait pas avoir de but sur la terre 1389 . A ce sujet, Enfantin adoptera la même position que les buchéziens, les fouriéristes et Lamennais, concernant la traduction de la phrase de l’évangile de Saint-Jean (XVIII, 36) : “Nunc autem regnum meum non est hinc”. Buchez, citant cette phrase dans son Histoire parlementaire de la Révolution française (1834-1838) précisait en note que le mot “nunc” n’était traduit dans aucune des versions françaises du Nouveau Testament 1390 , ce qui sous-entendait que le règne de Jésus-Christ n’était pas de ce monde ; or, pour lui, cette phrase signifiait : “Mon règne n’est pas maintenant d’ici”, ce qui impliquait un temps à venir où le règne de Jésus-Christ serait d’ici-bas. Enfantin, dans ses Lettres à un catholique (1847), prit parti, lui aussi pour le “maintenant”, démarche qu’on peut comprendre, de sa part, comme une tentative de rapprochement à l’égard de l’Eglise catholique, à condition que celle-ci, bien sûr, assume le but de l’établissement de la justice sur terre 1391 .

Si on a pu noter, pour certains, dans les années 1830 et 1840, un va-et-vient entre socialisme et catholicisme comme pour Alphonse Dory qui a été, tour à tour, voltairien, catholique, saint-simonien et à nouveau catholique 1392 , pour les théologiens et les évêques, il n’était pas question de faire une quelconque concession aux doctrines socialistes ou communistes que Mgr de Bonald considérait comme “une des plus monstrueuses erreurs qui aient souillé la terre” 1393 . Enfantin engagea pour sa part une polémique, en 1858, avec le Père Félix, prédicateur à Notre-Dame de Paris. Au chef de l’Eglise saint-simonienne qui lui reprochait de prêcher pour une cause froide, triste et désolante, le prédicateur répliquait en accusant les saint-simoniens de nier le péché originel et de brandir le drapeau infâme de la réhabilitation de la chair 1394 . Trois autres théoriciens socialistes, Cabet, Proudhon et Flora Tristan, qui ont séjourné à Lyon au début des années 1840, ont été, eux aussi, comme nous allons le voir, hostiles à l’Eglise catholique.

Notes
1360.

Serge BERSTEIN et Pierre MILZA (dir.), Histoire du XIX e siècle, Hatier, 1996, 538 p. (pp. 97-98). Saint-Simon publia “le Catéchisme des industriels” (1822-1824) et surtout le “Nouveau Christianisme” (1825), ouvrage dans lequel il prévoit un autre système, une autre religion que le christianisme pour la nouvelle société, et qui aura comme objectif, grâce aux producteurs, d’améliorer l’existence morale et physique de la classe la plus nombreuse.

1361.

Barthélemy Prosper Enfantin (1796-1864), polytechnicien, fut mis en contact par Rodrigues avec Saint-Simon, quelques semaines avant la mort de ce dernier. Dans le journal le “Producteur”, il apporta à la nouvelle doctrine saint-simonienne ses principaux éléments économiques. A partir du régime de Juillet qui désigna un des leurs, Lafitte, comme ministre, les saint-simoniens reçurent de nombreuses adhésions. Mais le conflit entre Bazard et Enfantin, la prédication assez étrange d’Enfantin concernant sa morale sexuelle et les rumeurs concernant les soirées qui avaient lieu chez les saint-simoniens, à l’ancien hôtel de Gesvres, rue Monsigny, à Paris, provoquèrent des défections. [J.P. CALLOT,“ Les polytechniciens et l’aventure saint-simonienne” (page consultée le 14 mars 2005). Adresse : http://www.annales.org/archives/x/saint-simonisme.htlm . L’article a été publié dans “Le jaune et le rouge” en septembre et octobre 1864, 15 p. (pp. 4-5-6)].

1362.

Gérard CHOLVY, Frédéric Ozanam …, p. 133.

1363.

Laurent sera en 1844 l’initiateur à Saint-Etienne d’une Société générale pour la fabrique de rubans, qui inquiéta, on l’a vu, le sous-préfet.

1364.

Pierre Leroux (1797-1871), un des fondateurs du “Globe”, resta peu de temps dans mouvance saint-simonienne qu’il quitta en novembre 1831 pour fonder “La Revue encyclopédique” où les questions religieuses tenaient une grande place, et, en 1836, il fonda avec Jean Reynaud “l’Encyclopédie nouvelle” (Pierre PIERRARD, L’Eglise et les ouvriers en France (1840-1940) …p. 136).

1365.

Fernand RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, pp. 23-24. Le costume des saint-simoniens pouvait attirer l’attention de tous les lyonnais : pantalon rouge, tunique bleue qu’une ceinture en cuir serrait à la taille, béret rouge, gilet boutonnant par derrière, sur lequel le nom de l’apôtre était inscrit. (Ibid., p. 81)

1366.

Idem, p. 25. Nous verrons, par la suite, la place importante occupée par Frédéric Ozanam (1813-1853) parmi les premiers catholiques sociaux.

1367.

Marcel VINCENT, Ozanam. Une jeunesse romantique …, p. 159. L’auteur fait remarquer avec raison qu’on ne peut rester indifférent au fait que Fernand Rude faisait mention du futur écrivain catholique dans un ouvrage consacré aux “Révoltes des canuts” (p. 165). Rude, pour sa part, justifie son allusion en affirmant que les missionnaires saint-simoniens “provoquaient un éveil de la réflexion” (p. 25).

1368.

Cité par Marcel VINCENT, Ozanam. Une jeunesse romantique …, p. 161.

1369.

Gerard CHOLVY, Frédéric Ozanam …, pp. 134 et 137. La doctrine saint-simonienne, exposée en 1830 par ses disciples dans un manifeste, admettait le droit de propriété mais demandait que la production soit constamment gérée par les plus capables. (Serge BERSTEIN et Pierre MILZA (dir.), Histoire du XIX e siècle …, p.98).

1370.

L’“Echo de la Fabrique” et l’“Echo des travailleurs” diffusaient les idées saint-simoniennes car les canuts, redoutant la concurrence entre fabricants, appréciaient sa condamnation par Saint-Simon qui affirmait que si la concurrence faisait quelques heureux, elle “laissait sur le carreau d’innombrables victimes” : cité par J. ALAZARD, “le mouvement politique et social à Lyon entre les deux insurrections de novembre 1831 et d’avril 1834 …”, p. 33.

1371.

Pour des précisions concernant cette personnalité lyonnaise, voir la note 1237 de ce chapitre.

1372.

Fernand RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, pp. 24-25, 107-108.

1373.

Ibid., pp. 25, 79, 80 et Laura STRUMINGHER, Women and the making of the working class : Lyon 1830-1870 …, pp. 37-38. Il y avait aussi à Lyon une saint-simonienne poétesse, Sophie Grangé, qui portait des costumes masculins et fut un moment la muse de Berthaud (Fernand RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, p. 80).

1374.

Ibid., pp. 78-79. Ribes constate aussi quelque progrès dans la classe ouvrière.

1375.

Fernand RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, pp. 74 et 78.

1376.

Ibid., p. 78 et J. ALAZARD, “le mouvement politique et social à Lyon entre les deux insurrections de novembre 1831 et d’avril 1834 …”, p. 28.

1377.

La police a interdit leurs réunions, saisit les papiers de la communauté et le gouvernement traduira leurs chefs devant la Cour d’assises en août 1832 (J. ALAZARD, “le mouvement politique et social …“, p. 28).

1378.

Ibid., p. 29. Comme à Paris, la police surveille de près les saint-simoniens lyonnais : le préfet interdit leurs réunions de la rue Saint-Dominique et la famille fut obligée de se transporter à la place Sathonay où elle possédait un logement (Idem, p. 28).

1379.

Fernand RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, pp. 82-84.

1380.

Ibid., pp. 82-83.

1381.

PHILIPPE REGNIER, article sue Saint-Simon, in Michèle RIOT-SARCEY…, Dictionnaire des utopies …, p. 195.

1382.

En janvier 1832, l’hôtel de Gesvres, rue Monsigny, où se réunissaient les saint-simoniens, fut investi par les soldats et Enfantin, de même que ses principaux lieutenants, furent inculpés de délit d’association, d’escroquerie et d’outrages aux bonnes mœurs. Enfantin se retira alors dans une propriété qu’il possédait à Ménilmontant, à l’est de Paris, où il organisa de façon rigoureuse la vie communautaire. Mais les activités saint-simoniennes furent à nouveau interrompues par la police en juillet 1832 et Enfantin, de même que ses disciples, Chevalier et Duveyrier, furent condamnés, un mois plus tard à un an de prison. Deux autres saint-simoniens inculpés, Rodrigues et Barrault, ne furent pas condamnés. (J.P. CALLOT, “ Les polytechniciens et l’aventure saint-simonienne”…, pp. 7-8-9)

1383.

Fernand RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, p. 83. Dans la communauté de Ménilmontant, le culte saint-simonien utilisait un nouveau calendrier où le samedi était le jour du Père et le dimanche, celui de la Mère. A son procès, Enfantin s’était comparé à Jésus, en invoquant le Femme-Messie : “Moi, je suis envoyé par mon Dieu, Père et Mère de tous et de toutes, pour faire désirer au monde sa tendresse de Mère”. Pour Enfantin, chercher la Femme-Messie associée à Marie et aussi à Cybèle, c’était continuer l’œuvre de Jésus. [Frank Paul BOWMAN, Le Christ des Barricades (1789-1848), Le Cerf, 1987, 361 p. (pp. 176-178)].

1384.

Dès son arrivée en Egypte, Enfantin essaya de réaliser son grand dessein du percement de l’isthme de Suez.

1385.

FERNAND RUDE, Les révoltes des canuts – 1831-1834 …, pp. 83-85. L’auteur précise que Clorinde Rogé n’a pas seulement brisé de manière symbolique la chaîne du célibat que le Père s’était forgée dans l’attente de la Mère.

1386.

Ibid., p. 85.

1387.

Les évêques étaient agacés par les références fréquentes que faisaient les socialistes à l’évangile. Ainsi, Mgr de Bonald disait que lorsque ces derniers voulaient humilier l’autorité, attaquer le droit de propriété et renverser la société telle que Dieu l’avait créée, ils invoquaient à chaque fois l’évangile (lettre pastorale du 25 janvier 1850, à l’occasion du Carême, Contre quelques erreurs de notre époque, A.A.L., p. 15).

1388.

Frank Paul BOWMAN, Le Christ des Barricades (1789-1848) …, pp. 28, 31 et 356.

1389.

Ibid., pp. 168-170-172

1390.

François-André ISAMBERT, Buchez ou l’âge théologique de la sociologie, Cujas, 1967, 339 p. (pp. 160-161). A vrai dire, il y avait des traductions protestantes qui tenaient compte du “nunc” et traduisaient ainsi le verset 36 : “mais maintenant, mon règne n’est pas d’ici-bas” (Ibid., p. 161). Aujourd’hui encore, on trouve une version différente du verset dans la “Bible de Jérusalem” (Le Cerf, 1994) : “Mais mon royaume n’est pas d’ici” et dans la “Traduction œcuménique de la bible” (Le Cerf, 1995) : “ Mais ma royauté, maintenant, n’est pas d’ici”.

1391.

François-André ISAMBERT, Buchez ou l’âge théologique de la sociologie … p. 161.

1392.

Alphonse Dory, dans Retour au christianisme de la part d’un saint-simonien (1834), explique son itinéraire qui l’a conduit à prêcher le saint-simonisme à Marseille puis à chercher des réponses à la question de la douleur dans la lecture de Ballanche. ( Frank Paul BOWMAN, Le Christ des Barricades …, p. 328).

1393.

Lettre pastorale du 25 janvier 1850, Contre quelques erreurs de notre époque, p. 8.

1394.

Pierre PIERRARD, L’Eglise et les ouvriers en France (1840-1940) …, p. 174.