III- Le Suquamish Museum

La reconnaissance d’une organisation gouvernementale tribale permit aux Suquamish d’engager un processus de réorganisation de leur identité tribale et notamment la reconstruction de leur histoire culturelle en utilisant quatre techniques qui sont pour Joane Nagel : la renaissance, la restauration, la révision et l’innovation. La première technique consiste à réintroduction des formes et des pratiques culturelles oubliées. La seconde procède à une réintroduction et restauration des formes et des pratiques désuètes. La troisième est une adaptation et un changement des formes et des pratiques culturelles afin d’en assurer leur conservation. Enfin, la dernière découle de la création de nouvelles formes et pratiques culturelles (Nagel, 1996 : 47).

La tribu voulait raviver, redonner du sens aux mémoires individuelles et à la mémoire collective malmenée par la politique assimilationniste américaine. Elle souhaitait retrouver une intégrité culturelle, une ascendance commune, une conscience de groupe et assurer sa propre auto-identification.

La découverte dans les années 1975 d’un certain nombre de vestiges sur le site archéologiqueOle man house fut l’occasion pour la tribu, comme l’avaient fait avant eux les Makahde Neah Bay 161 , d’envisager un projet culturel autour d’un musée. Certains membres tribaux ne voulaient pas que ces vestiges prennent le chemin des musées archéologiques et ethnographiques locaux et nationaux. Ils pensaient que la création d’un musée pouvait être bénéfique pour la communauté et pouvait permettre de légitimer et de valoriser la culture suquamish, de créer un sentiment de fierté communautaire et être une « vitrine valorisante et éducative auprès des non-Indiens » (Farchi, 2006 : 85-90).

La tribu s’attacha à cette idée et se documenta pendant plus de six ans sur l’héritage des Suquamish et des Indiens du Puget Sound de ces cent trente dernières années. Afin d’enrichir sa collection d’objets, elle emprunta un ensemble d’artefacts à des institutions comme le Thomas Burke Memorial Washington State Museum, le Seattle ’s Museum of History and Industry (MOHI), la Kitsap County Historical Society, la Bainbridge Island Historical Society. Les responsables du développement culturel tribal collectèrent des archives photographiques auprès d’organismes tels que la Historical Photography Collection of the University of Washington, le Burke Museum, la Kitsap County Historical Society, la Washington State Historical Society, la Bancroft Library, les National Archives, les National Anthropological Archives, la Smithsonian Institution, le Whatcom Museum of History and Art. Ils réalisèrent également des entretiens avec certains membres tribaux et firent appel à des consultants, professeurs d’universités tels que le Dr. Barbara Lane et le Dr. Bill Holm de l’ University of Washington et Rod Slemmons, conservateur du Museum of History and Industry de Seattle (The Suquamish Museum, 1985 : 5).

D’autres institutions, comme le National Endowment for the Humanities, l’ Administration for Native Americans et la fondation Norman Archibald Charitable apportèrent une aide financière. Quant à l’ American Association for State and Local History, elle reconnut en 1979 la viabilité du projet et autorisa la construction du musée (cf. photos XXIII et XXIV).

Photo XXIII. Entrée du
Photo XXIII. Entrée du Suquamish Museum. Centre tribal. Réserve de Port Madison.

Photo : R. Merlet (1998).

Photo XXIV. L’intérieur du
Photo XXIV. L’intérieur du Suquamish Museum. Centre tribal. Réserve de Port Madison.

Au centre, le canoe de guerre quileute prêté par la Kitsap County Historical Society . A gauche, le canoë de pêche emprunté à B. Riebe. Photo : The Suquamish Museum,1985, The Eyes of Chief Seattle.

Notes
161.

Le site archéologiqueOzette a été découvert en 1969 à Neah Bay et a permis aux Makah d’ouvrir en 1979 un Centre de Recherche et Culturel Makah.