Les Squamish de Vancouver furent les premiers à entrer dans la danse. Ils commencèrent ces festivités en interprétant deux danses réservées à leurs membres tribaux : une première danse très conventionnelle, une deuxième plus hétéroclite, mélangeant des gestes et des pas provenant de leurs pratiques ancestrales et de différents mouvements culturels et artistiques et une troisième qui nécessita la participation de l’assemblée.
Les Nitinat occupèrent à leur tour la scène. Accompagnés par les Quileute, le temps d’une représentation, les hommes, tambours à la main, commencèrent à entonner une chanson appelée Lady Song tandis que les femmes se prêtèrent à l’exercice de la danse. Puis, ils revêtirent des pagnes des bâtons en forme de serpents ou de crocodiles à la main, et rejoignirent les femmes qui elles, portaient des pagaies.
Le lendemain, le groupe de danse suquamish 214 assura une partie des représentations de la journée. Vers onze heures, les quatorze danseurs et Ed enfilèrent leurs costumes traditionnels en cèdre (cf. photo XXXV) et vérifièrent si tous les cadeaux étaient prêts pour le petit potlatch qu’ils allaient donner. La mise en scène devait être parfaite car l’occasion était inespérée de représenter le plus dignement la tribu suquamish.
Photo : R. Merlet (1999).
Le groupe commença par chanter une Gathering Song. Puis chaque danseur et chanteur se présenta deux fois en annonçant en langue lushootseed son nom, celui de sa mère, de son père et de sa grand-mère et précisa son origine (cf. tableau IV). La répétition est aussi utilisée dans les chants et les mythes. Boas disait d’ailleurs que : « L’étude de la narration et de la poésie primitive prouvait que la répétition, et en particulier la répétition rythmique, était l’un de leurs traits esthétiques fondamentaux » (2003 : 15). Elle est également une manière d’interpeller et d’attirer l’attention de l’assemblée.
Tableau élaboré d’après The Suquamish Tribe, 1998, A collection of Suquamish Songs.
Ensuite, le groupe enchaîna pendant plus d’une heure, neuf chants 215 , accompagnés par des danses individuelles comme la Ewye Mosquito (cf. photo XXXVI) et la Moon Woman (cf. photo XXXVII) et des danses collectives comme la Canoe, la Spinning Water et la Beach Rock. Chaque danse était introduite et expliquée par Peg, comme la Ewye Mosquito qui fut très appréciée du public et en particulier des enfants. Ils adorèrent nourrir le Mosquito avec des billets de un dollar et ceci malgré la peur qu’ils pouvaient ressentir lorsque cet étrange animal faisait du bruit en agitant son bec. Quant à la Moon Woman, elle symbolise la femme lune, celle qui donne au peuple tout ce dont il a besoin. Elle fut interprétée à la fin de la représentation, lorsque le groupe fit, en signe de remerciements, des dons de cadeaux et d’argent, aux hôtes et aux spectateurs 216 .
Photo : R. Merlet (1999).
Photo : R. Merlet (1999).
Les représentations et les remerciements se succédèrent au fil de la journée. La tribu ucluelet remercia les membres ahousaht et plus particulièrement un jeune homme qui avait sauvé de la noyade deux filles de leur village. En signe de reconnaissance, les Ucluelet offrirent à sa famille des couvertures, des serviettes et de l’argent. La tribu mit également à l’honneur un de ses membres tribaux qui leur avait fait don d’une chanson de famille.
Quant aux jeunes songhee, c’était la première fois qu’ils prenaient part à un tel voyage et ce fut avec beaucoup d’émotion, de timidité, peu d’assurance et avec les encouragements du public, qu’ils exécutèrent deux danses appelées : « pride » et « paddle welcome ».
Enfin, les Quinault profitèrent de leur prestation, tout d’abord pour féliciter un jeune membre tribal de 16 ans, qui avait bien rempli son rôle de capitaine pendant tout le voyage. Puis, pour défier quiconque de prendre cette pagaie brandie par le représentant quinault, de la ramener et de l’offrir à la tribu en 2002, lors d’un grand rassemblement annuel. Les Ahousaht décidèrent de relever le défi et acceptèrent de prendre la pagaie, symbole de ce contrat tacite passé avec leurs invités quinault. Puis, une jeune fille d’origine quinault profita de cette effervescence pour annoncer et partager une nouvelle avec son groupe et les spectateurs. Elle devait recevoir son nom indien et elle voulait célébrer cet événement en offrant des petits cadeaux à ses partenaires de voyage. Tous ces dons sont en fait des requêtes exprimées par le donateur envers le donataire. Il lui demande d’être le témoin d’un moment particulier de sa vie.
The Suquamish Tribe, September 1999, « Suquamish Dances at the Ahousaht Potlatch Water », Suquamish Newsletter , The Suquamish Tribe, Seattle, Washington.
Neuf chants : Spinning Water, Ewye Flower Song, Sun Mask Song, Canoe Song, Eagle Song, Beach Rock Song, (Ewye) Mosquito Song, (Ewye) First Song, (Ewye) Moon Woman Song. Voir quelques extraits en annexe VII : A collection of Songs for Suquamish Tribal Members.
Un don à un spectateur est une manière de lui demander d’être un témoin de la fête, de se souvenir et de parler de ce moment aux futures générations.