3.2 Lutte contre l’oppression et l’exclusion

Au second fondement de l’inclusion: “ Lutter contre l’oppression et l’exclusion, sous toutes ses formes”, nous associons sept questions qui cherchent à capter le regard des acteurs éducatifs sur l’enfant à BES visant savoir s’il s’agit d’un regard en lien avec le mouvement inclusif. Les groupes 1 à 5 ont répondu à la question 2, les groupes 1 à 4 à la question 4, seuls les parents des enfants à BES ont répondu aux questions 17 et 18, les élèves à BES aux questions 19 et 20 et enfin, le groupe des élèves dits “non handicapés” ont répondu à la question 21. Nous pouvons ainsi analyser la question de l’exclusion à partir de différents points de vue.

Tous les groupes ont répondu à la question 2 (Que pensez-vous de l’accueil qui lui est réservé parmi les autres enfants? Quels sont, à votre avis, les bénéfices qu’il peut tirer d’une scolarisation dans une “école populaire”? Quels bénéfices peut-il apporter à l’école?). Nous avons obtenu les résultats suivants:

Tableau 29 – (1) Professeurs travaillant avec les enfants à BES
Question 2 : (Que pensez-vous que l’accueil qui lui est réservé parmi les autres enfants? Quels sont, à votre avis, les bénéfices qu’il peut tirer d’une scolarisation dans une “école populaire”? Quels bénéfices peut-il apporter à l’école?). Quant.
Défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres enfants  
- je trouve cela merveilleux 1
-je cherche à les mettre ensemble. Pour que les autres apprennent à les voir avec d’autres yeux. 1
- je trouve cela très important 1
- je pense que les élèves entendants vont mieux comprendre l’autre et mieux l’accepter 1
- j’ai toujours admiré le travail fait ici. Ils ont leur salle de classe et ils sont en interaction avec les entendants. 1
- si l’enfant à une DM légère, mais qu’il réussit à progresser parmi les autres, je ne vois pas pourquoi le mettre ailleurs 1
- c’est normal, il a besoin d’être avec les autres enfants 1
   
Sous-total des réponses 7
Ne défend pas l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
- Si je construisais une école, je construirais une école exclusivement pour les sourds. Tout le monde dit que si c’était le cas il n’y aurait pas de cohabitation avec les autres élèves mais je trouve que c’est mieux comme ça. 1
Sous-total des réponses 1
Total des réponses 8
Pas de réponses 1
TOTAL 9
Tableau 30 – (2) Professeurs travaillant exclusivement avec des classes régulières sans élèves à BES
question 2 : Que pensez-vous de l’accueil qui lui est réservé parmi les autres enfants? Quels sont, à votre avis, les bénéfices qu’il peut tirer d’une scolarisation dans une “école populaire”? Quels bénéfices peut-il apporter à l’école?) Quant.
Défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
-Je pense que ça doit être comme ça. On essaie de réserver des moments pendant lesquels ils vont être avec les autres pour faire une activité. 1
- Ils se rendent compte qu’il a une déficience mais qu’avec le groupe, qu’en compagnie des autres il arrive à la surmonter. 1
- La cohabitation serait clairement bénéfique pour tous. 1
Sous-total des réponses 3
Ne défend pas l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
-quand ils sont avec les enfants qui eux avancent, le travail n’avance pas (...) Ce n’est pas facile d’être avec celui qui sait, tout en sachant que toi tu ne sais rien. Ce qui savent ne comprennent pas toujours ce qui ne savent pas.
Ils finissent par se moquer d’eux, par les mettre à l’écart..
1
Sous-total des réponses 1
Total des réponses 4
Pas de réponses 1
TOTAL 5

10 des 12 professeurs ayant répondu à la question se sont montrés favorables à l’accueil des enfants à BES parmi les autres. Les arguments fournis démontrent que les professeurs travaillant directement avec les enfants à BES, perçoivent les bénéfices de cette interaction, aussi bien pour ces enfants que pour les autres élèves dits « normaux ».

L’enseignante PC2 cite le thème générateur comme un des bénéfices apporté par l’école populaire aux enfants à BES :  «  Pour moi, le meilleur aspect de cette initiative c’est que l’on part de la réalité de l’élève. Par exemple, on ne va pas parler de volcans si l’élève n’a pas de connaissances de son propre environnement (…) Les enfants dits « normaux » ont une difficulté de compréhension à niveau macro, micro… et je pense que pour un enfant à BES c’est encore plus compliqué si on ne commence pas par travailler le « je » qui l’entoure, la famille... »

Pour PC3, le bénéfice réside dans le système de progression de l’école populaire :

‘« Je vois l’école populaire comme une école qui se préoccupe réellement de l’inclusion de tous. Cette tentative de progression est un espace qui leur offre un temps supplémentaire pour s’approprier ce qu‘ils n’ont pas réussi à s’approprier lorsqu’ils étaient avec l’autre groupe.».’

D’autres professeurs, tels que PC3, y perçoivent des bénéfices non seulement pour les enfants à BES mais aussi pour les autres :

‘« Ça me semble important non seulement pour eux mais également pour les autres enfants, pour qu’ils prennent conscience du devoir de respecter l’autre même s’il est différent, de laisser une place à l’autre..» ’

L’entretien avec l’enseignante d’éducation physique, PES5, nous éclaire également sur les bénéfices apportés :

‘« En éducation physique, on s’intéressait auparavant plus à la sélection des meilleurs, on visait plus la compétition. Maintenant, on recherche la participation de tous (…). En donnant à tous des opportunités, sans rechercher uniquement la perfection (…) on cherche à favoriser les échanges et non l’individualisme.»’

Pour le professeur PES2, lui même sourd, un des bénéfices est le soutien qu’offre l’école populaire aux sourds :

‘« L’éducation populaire a soutenu l’éducation des sourds. Dans les autres écoles pour sourds, il manque beaucoup de choses, ici ils ont suffisamment d’informations, d’échanges et de contacts avec les autres. Auparavant, ils restaient très seuls chez eux. Ici ils arrivent à donner leur opinion.» ’

Observons les réponses des groupes 3, 4 et 5, qui s’apparentent à celles des groupes antérieurs :

Tableau 31 – (3) Directeurs d’écoles, coordinateur pédagogique et secrétaires d’education
Question 2 : Que pensez-vous de l’accueil qui lui est réservé parmi les autres enfants? Quels sont, à votre avis, les bénéfices qu’il peut tirer d’une scolarisation dans une “école populaire”? Quels bénéfices peut-il apporter à l’école? Quant.
Défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
- Les autres enfants vont apprendre que le monde se construit avec des différences, ils vont apprendre à aider la personne en fauteuil roulant, à communiquer en langue des signes avec les sourds, à aider l’aveugle. (...) Différents langages se mettront en place et l’être humain s’humanisera encore plus. Pas avec de la pitié mais avec l’authenticité qui s’établit lorsque l’on vit avec les différences 1
- l’accueil des enfants à BES parmi les autres constitue un droit pour chaque citoyen 1
- en plus de cette socialisation, il est en permanence entouré d’autres enfants qui interagissent avec lui de manière différente 1
- offrir aux élèves des moments avec d’autres groupes a été positif 1
-l’inclusion des personnes handicapés est un processus qui doit se concrétiser, cependant je pense que cet enfant à besoin d’un accueil différencié, de professionnels compétents ... 1
Je pense que l’enfant y gagne à cohabiter avec les autres enfants, ainsi il se sent partie intégrante du groupe 1
Sous-total des réponses 6
Ne défend pas l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
Sous-total des réponses 0
Total des réponses 6
Pas de réponses 0
TOTAL 6

Coordinateur, secrétaires et directeurs d’école sont en faveur de l’accueil des enfants à BES parmi les autres.

Sec1 dit assister à une grande transformation des personnes grâce à l’école populaire :

‘« Hier, un homme de l’education des jeunes et adultes (EJA) disait : Il y a une personne dans notre classe qui a des difficultés. Elle n’arrive pas à écrire deux lignes, alors nous écrivons à sa place. Mais on s’est rendu compte qu’on le faisait à sa place, et on ne peut pas le faire à sa place. Il faut qu’elle sache le faire. Alors maintenant on s’assoit à côté d’elle, et c‘est à elle de le faire. – Alors dis-moi, quand est-ce que cela à de l’importance dans une école classique? Ce qui compte c’est qui recopie le plus vite, qui répond le plus vite, qui a appris par cœur. Mais quand la personne commence à faire attention à ce qui l’entoure…. Quand elle commence à surveiller sa maison mais aussi celle de son voisin. Ce sont des rêves, mais si tu regardes bien, tu vois les enfants qui deviennent plus responsables, qui font plus attention aux autres, qui partagent leur repas. Ils apprennent à faire plus attention à l’autre. Ce n’est pas l’équation mais plutôt son utilisation.»’

Dir1 considère la diminution des préjugés comme le principal bénéfice de cet accueil:

‘“Je crois que les enfants commencent à voir les autres enfants avec “d’autres yeux”, avec moins de préjugés. Les élèves à BES sont toujours avec les autres élèves pendant les récréations, et parfois ils font des activités avec les autres groupes du cycle, ce qui s’est avéré être une bonne expérience. Je pense que dans une autre école ils ne seraient pas ensemble... Parfois, des écoles publiques nous appellent en disant : - Cet élève n’a plus rien à faire dans cette école. – Nous recevons donc des élèves qui nous ont été “signalés” par les écoles publiques et ici nous avons travaillé avec eux, nous les avons mis dans les classe de progression et beaucoup ont réussi à progresser. Donc ici on accueille.... »’

Pour Sec2, il ne s’agit pas d’un simple bénéfice mais d’un droit citoyen :

‘« Je crois que tous en tireront des bénéfices, car aussi bien l‘enfant à BES que les autres apprennent. Les bénéfices que peut tirer un enfant qui a des besoins spécifiques dans une école populaire réside dans le fait que cette école lui garantira un travail tourné sur sa propre réalité, sur ses besoins, réalisant un travail qui le construit comme sujet de sa propre histoire, capable d’agir sur sa réalité, car l’éducation populaire a une intentionnalité politique tournée vers les plus défavorisés. Nous nous sommes rendus compte que cette année, près de 200 élèves voulaient entrer dans les écoles du réseau spécialisé. Nous savons que ces élèves ont toujours existé. Cependant, ils n’avaient pas le courage de venir à l’école... Ou nous savons que très souvent les parents cachaient ces enfants à la maison... »’

Les professionnels extérieurs à l’école se sont montrés plus réticents quant à l’accueil des enfants à BES parmi les autres. Les parents quant à eux, se sont montrés unanimes à cet accueil.

Tableau 32 – (4) Professionnels extérieurs à l’école
Question 2 : Que pensez-vous de l’accueil qui lui est réservé parmi les autres enfants? Quels sont, à votre avis, les bénéfices qu’il peut tirer d’une scolarisation dans une “école populaire”? Quels bénéfices peut-il apporter à l’école?) Quant.
Défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
- je pense que les enfants à BES ont le droit d’être accueillis parmi les autres 1
Sous-total des réponses 1
Ne défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
- Je pense que leur accueil parmi les autres enfants “inclut” parce qu’il donne l’opportunité du contact et “exclut “dans la mesure où les difficultés visibles rendent difficile et empêchent la scolarisation en faisant que cet enfant se sente encore plus dépassé.
1
Sous-total des réponses 1
Total des réponses 2
Pas de réponses 1
TOTAL 3
Tableau 33 – (5) Parents d’élèves à BES
Question 2 : Que pensez-vous de l’accueil qui lui est réservé parmi les autres enfants? Quels sont, à votre avis, les bénéfices qu’il peut tirer d’une scolarisation dans une “école populaire”? Quels bénéfices peut-il apporter à l’école?) Quant.
Défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
- je trouve ça excellent...les enfants sont comme ça, non?...certains acceptent.. 1
- je trouve que c’est bien parce qu’il apprend d’autres choses 1
- Je pense qu’il s’entend bien avec tout le monde ici. Je pense qu’il doit commencer à s’intégrer 1
- Je pense que c’est bien, d’une certaine manière, parce qu’ils ne peuvent pas avoir uniquement des rapports avec les sourds 1
Sous-total des réponses 4
Ne défend l’accueil des enfants à BES parmi les autres:  
Sous-total des réponses 0
Total des réponses 4
Pas de réponses 1
TOTAL 5

De manière générale, les mères voient de manière positive l’accueil de leurs enfants parmi les autres. Elles soulignent le bénéfice de cette cohabitation pour que leurs enfants ne soient pas isolés du monde, et apprennent avec les autres.

Une mère (MC1) souligne également comme un bénéfice le fait que l’école soit à proximité et en contact avec son quartier. Dans son récit, elle raconte comment ses voisins l’ont aidé à localiser son fils lorsque celui-ci s’est perdu.

Son témoignage donne à voir, que au delà de la manifestation de solidarité de ses voisins, cette mère s’est sentie acceptée et partie intégrante de l’école.

‘« C’est déjà arrivé qu’il s’en aille. Il est parti à midi moins le quart de la maison. Le voisinage tout entier s’est mis à le chercher. Des gens que je ne connaissais pas mais qui me connaissaient pour m’avoir vu avec lui. On l’a retrouvé à deux heures de l’après-midi. Il était allé rendre visite à un ami, mais cet ami habitait dans un autre quartier, je ne sais pas comment il est arrivé jusque là-bas. » ’

Mise à part la réticence exprimée par le groupe 4, tous les groupes confirment le thème, ce qui veut dire qu’ils sont favorables à l’accueil des enfants à BES dans des écoles régulières.

La question 5 (Voyez-vous, au sein de la communauté locale, une quelconque modification de regard (attitudes, comportement) par rapport aux personnes à BES que vous estimez lié à l’action menée par cette école ?) a été posée aux groupes 1, 2, 3 et 4 et la grande majorité des réponses (19 sur 22) ont validé le thème comme l’illustrent les tableaux suivants :

Tableau 34 – (1) Professeurs travaillant avec les enfants à BES
Question 5. Avez-vous remarqué, au sein de la communauté locale, un quelconque changement de regard (attitudes, comportement) sur les personnes à BES que vous estimeriez lié à l’action de cette école? Quant.
Oui 5
Non 3
Total des réponses 8
Pas de réponses 1
TOTAL 9
Tableau 35 – (2) Professeurs travaillant exclusivement avec des classe régulière sans élèves à BES
Question 5. Avez-vous remarqué, au sein de la communauté locale, un quelconque changement de regard (attitudes, comportement) sur les personnes à BES que vous estimeriez lié à l’action de cette école? Quant.
Oui 5
Non  
Total des réponses 5
Pas de réponses  
TOTAL 5
Tableau 36 – (3) Directeurs d’école, Coordinateur pédagogique et Secrétaires d’Education
Question 5. Avez-vous remarqué, au sein de la communauté locale, un quelconque changement de regard (attitudes, comportement) sur les personnes à BES que vous estimeriez lié à l’action de cette école? Quant.
Oui 6
Non  
Total des réponses 6
Pas de réponses  
TOTAL 6
Tableau 37 – (4) Professionnels extérieurs à l’école
Question 5. Avez-vous remarqué, au sein de la communauté locale, un quelconque changement de regard (attitudes, comportement) sur les personnes à BES que vous estimeriez lié à l’action de cette école? Quant.
Oui 3
Non  
Total des réponses 3
Pas de réponses  
TOTAL 3

Les interviewés expliquent la transformation qui s’est opérée grâce aux actions de l ‘école. PC2 constate un changement chez les parents :

‘« Je le vois quand je parle avec certains parents qui nous rendent visite : ces derniers jours ils sont venus et ont assisté à une représentation du groupe de PEC1. Ils étaient ravis. Une mère a dit ‘Mon dieu, quelles capacités!’ Je pense que la communauté se rend compte qu’ils sont spéciaux, différents, mais qu’on doit les traiter comme tous les enfants. »’

A l’école SC, ce changement est perceptible à travers l’attitude des entreprises et des institutions locales , comme l’illustre le témoignage de PS1 :

‘« Oui, je pense que la société dans son ensemble ne s’est jamais aperçue qu’il y avait tant de sourds à Chapecó et elle ne s’est jamais rendue compte que les sourds sont des gens comme nous, qu’ils possèdent les mêmes capacités ...Quand ils ont assisté à une représentation du groupe de danse, ça a été l’apogée. Mon dieu! Le groupe de danse a été appelé par d’innombrables entreprises pour faire des représentations car ils s’extasiaient de voir que les sourds savaient danser. Ils pensaient que les sourds étaient des incapables dans tous les domaines! Bien sûr il reste encore du chemin à faire...Mais c’est un début. »’

Le regard des enfants entendants s’est peu à peu modifié grâce aux actions de professeurs tels que PES5 :

‘« Oui, je me rends compte qu’au début c’était comme ça: “Regarde le petit fou, le petit fou sourd”. Maintenant non. Ils disaient aussi le petit muet, non? Maintenant ils disent le sourd. Même les entendants avaient peur des sourds, maintenant c’est fini tout ça. Aujourd’hui encore je racontais une histoire pour les entendants et les sourds et PES4 faisait circuler les petits livres, l’histoire passait sur le magnétophone et moi j’interprétais (en langue des signes). Les entendants regardaient l’histoire et me regardaient. Et ils disaient: “regarde ça c’est comme ça”. Au moment de faire des groupes, je mets un sourd dans chaque groupe et ils font attention à ce que le sourd comprenne. Je pense que pour les parents aussi ça a beaucoup changé parce qu’avant il y avait de nombreuses réclamations: “le sourd s’est bagarré avec mon fils” et maintenant il n’y en a plus. »’

Les autres groupes sont également du même avis et leurs témoignages vont dans le même sens que celui des professeurs.

Les actions menées par les écoles étudiées, semblent, selon les témoignages des interviewés, avoir provoqué un changement du regard posé sur les enfants à BES. Les personnes de l’école et extérieurs à cette dernière ont transformé leurs préjugés en acceptation et compréhension des différences.

Les parents ont répondu à deux autres questions qui se réfèrent à ce thème. Les résultats suivants correspondent à la question 17 (Qu’est-ce qui a changé, à votre avis, pour votre fils, depuis son entrée à l’école populaire ?) :

Les 3 mères ayant répondu à la question, disent avoir perçu des changements positifs pour leurs enfants :

Tableau 38 – (5) Parents d’élèves à BES
Question 17. Qu’est-ce qui a changé, à votre avis, pour votre enfant depuis son entrée à l’école populaire? Quant.
Ça s’est amélioré 4
Ça n’a rien changé ou ça s’est dégradé 0
Sous-total des réponses 0
Total des réponses 4
Pas de réponses 2
TOTAL 6

Pour MC1, la cohabitation avec les enfants dits “normaux” crée des limites positives pour les enfants à BES :

‘« Je vois des différences. Je dis toujours : quand c’est comme ça, quand l’enfant mord et tape, il apprend beaucoup. Je pense qu’il doit vivre avec des gens normaux pour apprendre des choses positives. »’

Selon MC2, les changements ont eu un grand impact sur sa conception de l’éducation de son fils:

‘« Il y a eu un changement car il a commencé à apprendre à écrire, à essayer d’apprendre les lettres. Ce qu’il ne faisait jamais avant. Je pensais qu’il allait rester là jusqu’à ce qu’on me dise. “Ramène-le à la maison, il n’y a pas de solution”. Ici il apprend. »’

Ce même changement a eu lieu pour MS3 avec son enfant sourd:

‘« Il adore y aller. Avant il n’était pas très motivé mais maintenant je vois qu’il adore. Aujourd’hui je me dis que ce n’est pas parce qu’il est sourd qu’il ne va pas faire d’études, etc. »’

La question 18, posée aux parents (Pensez-vous que l’école populaire puisse contribuer à faciliter son inclusion sociale?) fait référence aux possibles impacts de l’école populaire sur l’inclusion sociale des enfants à BES

La majorité d’entre eux (4 sur 6) estime qu ‘elle y contribue, comme l’illustrent les données ci-dessous:

Tableau 39 – (5) Parents d’élèves à BES
Question 18. Pensez-vous que l’école populaire puisse contribuer à faciliter son inclusion sociale? Quant.
oui 4
non 1
Total des réponses  
Pas de réponses 1
TOTAL 6

Les arguments varient. Pour MC1 dont le fils souffre d’une déficience intellectuelle, cette inclusion commence dès le moment où l’école amène l’enfant se promener, lorsque l’école insère, de fait, l’enfant dans le monde:

‘« Oui, ça y contribue beaucoup car ils leur font découvrir de nombreux endroits. Des endroits, des lieux qu’on ne connaissait même pas, on y est allé avec eux. Avec des gens qu’on ne connaissait pas... Et les enseignantes de l’école sont merveilleuses! Elles sont toutes comme des mères! »’

Dans le cas des sourds, la mère de AS9 pense également que les actions de l’école ont un impact sur l’inclusion sociale car la population sourde est connue de tous:

‘« Oui, car les gens connaissent bien l’école. Avant qu’il y ait cette école, les gens ne savaient pas qu’il y avait des sourds. Les gens les connaissent. Ils se promènent beaucoup. »’

De manière générale, pour les parents des enfants à BES, l’école populaire dans laquelle leurs enfants sont inscrits a agi de manière inclusive, comme l’illustrent leurs réponses.

Les enfants à BES ont également été interrogés afin de savoir comment ils se sentaient dans leur école. La question 19 ( Qu’est-ce qui a changé pour toi depuis depuis ton arrivée ici? A ton avis, pourquoi?) a été posé. Les résultats sont les suivants :

Tableau 40 – (6) Elèves à BES
Question 19. Qu’est-ce qui a changé pour toi depuis que tu es ici? A ton avis, pourquoi? Quant.
Ça s’est amélioré 11
Ça n’a rien changé ou ça s’est dégradé 0
Total des réponses 11
Pas de réponses 6
TOTAL 17

Tous les élèves (11) ayant répondu aux questions ont parlé d’un changement positif. Les 6 questions sans réponses se rapportent aux enfants souffrant de déficience intellectuelle. Cependant AC2 et AC3 sont sans nul doute satisfaites de l’école:

‘“Je veux rester ici. Il y a des jeux, une salle informatique.” ’ ‘“Ce qui a changé? C’est qu’ici on apprend plus.“ ’

La majorité des arguments énoncés par les élèves sourds illustre leur satisfaction vis-à-vis de l’apprentissage :

‘“Avant c’était nul, mais maintenant à SC les professeurs enseignent et nous apprenons. Avec les entendants ils n’interprètent pas en langue des signes. Maintenant c’est facile. Les entendants ne faisaient que parler et moi je ne comprenais rien. Ici, ça me plaît.” ’

Aucun des témoignages ne laisse entrevoir l’existence d’une quelconque insatisfaction vis-à-vis de l’école ou de forts préjugés. Afin de vérifier s’il n’existe aucun type de mécontentement par rapport à l’école nous avons posé la question 20 (Qu’est-ce que tu aimerais changer dans ton école? Par rapport aux professeurs, aux camarades, Pourquoi?). Les résultats sont les suivants :

Tableau 41 – (6) Elèves à BES
Question 20. Qu’est-ce que tu voudrais changer de ton l’école? (en relation aux professeurs, à tes camarades...Pourquoi?) Quant.
Pas de changement voulu ou le changement désiré n’est pas relationné à un préjugé 15
Changement voulu car il ne se sent pas bien à l’école  0
Total des réponses  15
Pas de réponses 2
TOTAL 17

La totalité des réponses (15) traduit une totale satisfaction des enfants et les changements souhaités sont liés à des choses du quotidien, communes à toute école. La réponse de AC1 en est l’illustration:

‘“ Je sais pas, améliorer le déjeuner, la salle de classe. Je changerais la salle de classe de PEC1, je la mettrais là-bas, parce que quand il pleut, c’est pas bien. Avec mes camarades j’aimerais que ce soit comme ça. Une fois il m’est arrivé quelque chose : Les filles ont écrit une lettre, elles ont dit que c’était moi et le professeur m’a puni. Je suis allé chez le directeur. J’ai dit que ce n’était pas moi...c’était Clo... J’aimerais changer des choses en éducation physique, le gymnase, mettre un poste radio en plus, il y a un poste radio qui ne marche pas bien, les boutons sont cassés.” ’

AC8 décrit les changements qui ont déjà eu lieu et parle de la flexibilité de l’école, qui respecte les différents rythmes d’apprentissage des enfants:

‘“Rien. Il ne me reste plus qu’un an à passer ici. L’année prochaine je vais au Victor. Mais il y a des professeurs un petit peu casse-pieds (...) L’année dernière j’étais dans la classe de progression, mais je ne suis pas passé. Il y avait une professeure qui était nulle, nulle et c’est pour ça que je ne suis pas passé. C’était un monstre! Heureusement qu’elle est partie. Ses élèves devaient faire dix additions en cinq minutes. Même si tu n’avais pas terminé, elle effaçait tout. Maintenant j’y arrive parce qu’on a un peu plus de temps, comme ça on y arrive. Je n’arrivais pas à lire, j’avais honte, ici avec mes camarades je lis. A la maison, je lis aussi beaucoup avec ma mère.” ’

Les changements que les élèves sourds désirent, montrent que la cohabitation avec les enfants entendants est difficile:

‘“J’aime tout, étudier LIBRAS c’est bien, mais avec les entendants c’est difficile. “ ’

“Avec le groupe des sourds ça se passe bien mais avec les entendants c’est pas pareil. Parce que les sourds ont la langue des signes et les entendants ne font que parler et c’est difficile. On joue beaucoup.”

Malgré les difficultés de communication, les élèves sourds semblent satisfaits de l’école.

Au vu des réponses aux deux questions posées, ce groupe semble, de manière générale, se sentir bien et aimer l’école. Nous pouvons dire qu’il se sent effectivement partie intégrante de la communauté de l’école.

Afin de connaître le point de vue des élèves dits “non handicapés”, nous avons posé la question 21 ( Comment vis-tu le fait d’être avec des camarades qui ont des déficiences dans ton école? Raconte-moi un bon moment passé avec eux. Raconte-moi un moment désagréable ou n’a pas été bon en leur compagnie.)

Tableau 42 – (7) Elèves dits “normaux"
Question 21. Comment vis-tu le fait d’être avec des camarades à BES dans ton école? Raconte-moi un bon moment. Raconte un moment “désagréable” ou qui n’a pas été un bon moment en leur compagnie. Quant.
Je trouve ça “normal” et/ou la cohabitation se passe bien 5
Je n’aime pas ça et je trouve la cohabitation étrange 0
Total des réponses 5
Pas de réponses  
TOTAL 5

Les 5 élèves interviewés déclarent qu’il est “normal” d’étudier avec des élèves à BES. Tous racontent naturellement de bons et de mauvais moments et aucun des récits n’est empreint de préjugés ou d’hostilité. Les trois témoignages ci-dessous illustrent ce propos :

‘“Je trouve ça bien car on joue ensemble de temps en temps. (bon moment); On jouait au volley dans le gymnase, on a fait un groupe de 3 mais une fois qu’on est parti, plus personne n’a gagné. (moment désagréable) : Quand AC1 et AC2 se sont disputées à cause d’un garçon.“ ’ ‘“Ah.. c’est sympa... Au début j’ai trouvé ça bizarre. Je me demandais : comment est-ce que je vais communiquer. Mais après j’ai pris des cours de LIBRAS. Un moment sympa c’était en cours de sport, j’ai du m’asseoir et rester avec D. parce que la prof m’a demandé de le surveiller parce qu’il est un peu agité, alors je suis restée avec lui. Un moment un peu difficile: Ah, une fois ils étaient là. Lui m’a dit que j’étais jolie et un autre que j’étais moche et je ne savais pas pourquoi. Ils se sont bagarré et moi je suis restée sans rien dire.”’ ‘“Ah! C’est sympa parce que ce sont nos amis, ils se bagarrent pas avec nous... J’ai un peu appris le langage des signes. Ah! On joue à pleins de choses ensemble : au ballon, en dehors des récréations... un moment difficile : quand le sourd m’a frappé. Ah! Parce qu’on jouait au foot, et j’ai pas vu, je lui ai shooté dans le tibia, et il s’est approché et m’a frappé.”’

A travers l’analyse des 7 questions liées au deuxième fondement, nous avons obtenu un panorama des points de vue des différents acteurs éducatifs. Les réponses montrent que la lutte contre l’oppression et l’exclusion est menée au sien des deux écoles étudiées.