Conclusion Chapitre I Partie I

L’exclusion en tant que problématique sociale et sujet de débat public interpelle tous les groupes de défense de la cause des plus démunis. Elle suscite une réelle prise de conscience d’où la constitution et l’intervention des groupes de cause des collectifs Alerte et CPE, afin que l’opinion publique soit informée des conséquences sociales qu’entraîne l’exclusion. Ces groupes de cause jouent donc un rôle déterminant dans la « publicisation » de cette question sociale et politique et se positionnent comme des groupes de pression vis-à-vis des décideurs politiques.

Les groupes de cause créent les collectifs Alerte et CPE respectivement en 1985 et 1995. Ces collectifs témoignent de la volonté des groupes de cause de constituer des espaces de dialogue et de construction des savoirs afin de bâtir des positions communes. Ceci pour peser plus efficacement lors de l’élaboration et surtout de l’adoption des politiques publiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Cette démarche de rassemblement constitue une stratégie de séduction de l’opinion publique et des pouvoirs publics, car elle rend compte de l’intérêt que les groupes de cause accordent à la lutte contre l’exclusion.

En créant et en animant les collectifs Alerte, CPE  puis GTI, les organisations de lutte contre les exclusions sociales affichent une identité collective d’acteurs sociaux qui luttent pour la défense de la cause des plus démunis. L’édification de ces « corps » de représentants traduit le choix du mode de mobilisation des groupes de cause qui les composent : celui de groupes de cause qui construisent collectivement les stratégies et les actions « intellectuelles » afin d’incarner une cause. Cette posture apparaît essentielle pour que les groupes de défense de la cause des plus démunis affirment leur double statut de médiateurs sociaux et de groupes de pression.

En réalité les collectifs Alerte et CPE ne jouent pas seulement le rôle de groupes de pression ou de groupes d’intérêt dont la fonction se résume à articuler les demandes des « exclus ». Ils incarnent aussi « l’espace » démocratique dans la mesure où chaque groupe de cause peut librement participer aux débats, à l’analyse et à la construction du discours du collectif auquel il appartient.

Lors du processus de construction de la loi contre les exclusions, les groupes de défense de la cause des plus démunis se positionnent en porte-parole des plus démunis. Ce rôle les conduit à exposer au gouvernement et au Parlement, la demande des « exclus ». Ils apportent une contribution originale et essentielle au contenu de la loi en prônant l’écoute, l’accueil des plus démunis et la mise en œuvre des mesures d’accompagnement social.

La « proximité sociale » des groupes de cause à l’égard des plus défavorisés ne peut être valablement remise en cause dans la mesure où ces acteurs sociaux revendiquent des actions réelles en faveur des plus démunis. En effet, certains groupes de cause disposent d’établissements d’accueil pour recevoir, prodiguer des conseils et pour assister les plus démunis dans leurs démarches administratives, ou même pour effectuer des prestations de solidarité et d’aide sociale. A côté de la première catégorie de groupes de cause qui réalisent des actes à caractère caritatif, il en existe d’autres. Ces derniers affichent leur posture de « lieux » de réflexion et d’élaboration des projets de loi en faveur des plus défavorisés. Cette deuxième catégorie de groupes de cause axe sa contribution sur l’approfondissement des questions liées à l’exclusion. Cette quête de savoir permet alors à ces groupes d’élargir le champ de connaissance de ce phénomène.

Cette démarche se traduit concrètement par un glissement de posture des groupes de cause : de constructeur de la cause des plus démunis à celui de groupe de pression. La conjugaison de ces deux fonctions autorise à penser que les groupes de cause réunis au sein des collectifs Alerte  et CPE jouissent d’une forte légitimité et de la représentativité à défendre la cause des plus démunis puisqu’ils portent une revendication identitaire qui est celle de la défense de la cause des plus démunis. Le processus de construction de la loi le révèle puisque les gouvernement d’Alain Juppé et de Lionel Jospin ainsi que les parlementaires associent ces groupes de cause et collectifs à l’œuvre d’édification du texte de loi.