A/ L’élaboration du projet de loi comme réponse à la mobilisation des groupes de défense de la cause des chômeurs 

La mobilisation des organisations de défense de la cause des plus démunis naît à Marseille puis s’étend progressivement sur tout le territoire national 726 . Le mouvement revendicatif des chômeurs prend sa « source » dans le refus des pouvoirs publics d’accorder des primes de fin d’années de 3.000 francs aux chômeurs des Bouches du Rhône 727 , ainsi que le confirme Laurent Guilloteau, un des responsables de l’organisation de lutte contre le chômage « Agir ensemble contre le chômage ». Selon lui,

‘« La CGT a pris l’habitude de mobiliser des chômeurs pour l’obtention d’une prime de fin d’année. La suppression par l’Unedic des fonds sociaux des Assedic dans lesquels ces mouvements allaient rituellement puiser a eu pour effet d’étendre et de généraliser cette revendication » 728   ’

En fait, les responsables des groupes de cause de défense de la cause des chômeurs et leurs « alliés » 729 traditionnels, les syndicats CGT et SUD PTT, portent sur la place publique des revendications centrées sur les conditions de vie des chômeurs. Ils souhaitent que les Assedics donnent un « coup de pouce » au pouvoir d’achat des chômeurs à l’occasion de la fin d’année 1997. Le refus des Assedic les conduit progressivement à occuper l’espace public en prônant des actions qui se situent à la limite de la légalité.

Les groupes de cause radicaux  réussissent grâce à l’action des médias et à l’adhésion de l’opinion publique à faire passer la question de la prime de Noël et du treizième mois d’une simple demande sociale qui était circonscrite géographiquement au département des Bouches du Rhône à l’ensemble des autres régions. Par l’effet de contagion d’une région à une autre la prime du treizième mois devient un sujet de débat public et une problématique politique d’enjeu national 730 . Les leaders de groupes de défense de la cause des chômeurs interpellent alors les responsables politiques. Ces derniers sont invités à prendre des mesures financières pour permettre aux chômeurs de « vivre » normalement. Le comité des chômeurs CGT des Bouches du Rhône réussit à étendre « son » mouvement de contestation à l’échelle nationale : 

‘« C’est devenu une revendication nationale [ le 13ème mois ] et ça a fait un plus dans le débat public que la question de ces personnes en situation d’exclusion au sens où ils ne bénéficiaient pas de la croissance, de la reprise de l’emploi et donc ça a simplement non pas conduit à modifier le contenu de la loi proprement dit, peut être sur certains points notamment sur des modifications en matière de chômage et d’allocation spécifique de chômage et encore là c’était déjà des choses qui étaient prévues » 731 .’

Les manifestations orchestrées par les organisations des chômeurs ont fini par renforcer la solidarité à l’égard « des plus démunis ». Nous ne pouvons cependant affirmer que ces mobilisations ont changé réellement la donne, en termes d’émergence et de prise en compte de cette problématique sociale par les décideurs politiques, puisque le chômage fait partie des sujets de débat public dominant depuis l’élection présidentielle de 1995. De même, il paraît difficile d’affirmer que cette mobilisation des groupes radicaux  de défense de la cause des chômeurs a influencé véritablement le contenu du projet de la loi en préparation dans différents cabinets ministériels dont celui du ministère de l’Emploi et de la solidarité. En revanche, nous pouvons affirmer que les groupes de cause des chômeurs de l’hiver 1997-1998 ont réussi à affirmer leur identité de représentants légitimes et de défenseurs des chômeurs puisque les décideurs politiques les ont reçus en tant que tel 732 .

En recevant les groupes radicaux de lutte contre le chômage, les autorités gouvernementales reconnaissent que cette catégorie de groupes de défense de la cause des plus démunis dispose d’une expertise dont les pouvoirs publics ont besoin pour apporter des solutions à la problématique du chômage. Il semblerait que ces groupes de cause détiennent un savoir qui peut être utile aux décideurs politiques 733 . Cette reconnaissance est d’autant plus réelle que le premier ministre Lionel Jospin affirme que les groupes de défense de la cause des chômeurs jouent « un rôle considérable dans le pays « 734 . Il qualifie même le dialogue qu’il a eu avec les groupes de défense de la cause des plus démunis de « positif et concret » 735 .

Les manifestations organisées par les groupes de cause radicaux ont vraisemblablement eu un impact réel sur le processus d’élaboration du texte de loi. Car, ainsi que l’affirme François Landais 736 , la mobilisation des groupes de chômeurs «  (…) a eu un impact sur l’accélération du calendrier d’élaboration de la loi sans doute aussi par le fait que des dispositions spécifiques ont été introduites concernant les chômeurs et leurs droits de représentation dans les institutions chargées de l’assurance chômage ou du service public » 737 . Si la mobilisation « populaire » des groupes radicaux paraît avoir conduit à l’accélération du processus de construction de la loi dans les cabinets ministériels, nous ne pouvons en revanche pas affirmer que les revendications posées par cette catégorie de groupes de cause ont influencé considérablement le contenu même de la loi.

En effet, les manifestations « populaires » des groupes de cause radicaux ont eu pour effet de pousser le gouvernement de Lionel Jospin à accélérer l’élaboration du projet de loi de lutte contre l’exclusion 738 . Toutefois, la publication de ce projet de loi ne peut, à notre avis, être considérée comme un facteur déterminant quant à la prise de conscience par les décideurs politiques des difficultés de vie des chômeurs puisque les principaux candidats politiques avaient déjà pris l’engagement, lors de la campagne présidentielle de 1995, de lutter contre toutes les formes d’exclusions. En réalité, la ministre Martine Aubry a tenté de nuancer l’impact de cette mobilisation en affirmant qu’on « ne peut pas dire que ça [la mobilisation des organisations de défense de la cause des chômeurs] a provoqué une prise de conscience » 739 chez les décideurs politiques. La mobilisation des organisations de défense de la cause des chômeurs a toutefois au moins favorisé l’accélération de l’élaboration du projet de loi.

Pour tenter de freiner ou de contenir la pression chaque jour toujours plus forte que les groupes de défense de la cause des plus démunis exercent sur le gouvernement de Lionel Jospin, la ministre Martine Aubry prend deux décisions importantes. Celles-ci ont pour objet d’apporter des réponses concrètes aux demandes urgentes des chômeurs. Si la première mesure est d’ordre réglementaire 740 , la seconde par contre s’inscrit dans la dynamique du projet de loi relatif à la lutte contre les exclusions 741 . Les directives que Martine Aubry adresse aux Préfets témoignent de l’intérêt que celle-ci accorde aux revendications des chômeurs. Elle leur demande de prendre les dispositions nécessaires à la satisfaction des revendications des organisations de défense de la cause des chômeurs, car affirme-t-elle,

‘« Depuis plusieurs jours, vous [ les préfets ] êtes confrontés à des actions de comités de chômeurs ou d’organisations syndicales qui réclament l’attribution d’une allocation forfaitaire de fin d’année aux demandeurs d’emploi. [ ces actions se matérialisent ] par des occupations de locaux des Assedics ou des CAF [ … ]. Si vous le jugez nécessaire, vous pourrez réunir les organismes disposant de fond dédiés à l’aide sociale (CAF, ASSEDIC, Département, etc...,) afin de coordonner leurs interventions pour relever les réponses d’urgence les plus adaptées à chacun des cas. [En effet] l’Etat vient d’annoncer, pour ce qui concerne ses responsabilités propres, une revalorisation de l’Allocation Spécifique de Solidarité de 3% en 1998 dont 2% au 1er janvier prochain avec effet rétroactif à compter du 1er juillet 1997 [ Une telle mesure ] « permettra de verser dans les jours qui viennent un rappel de 300 francs pour les allocations de l’Allocation Spécifique de Solidarité » 742 .’

La publication de ces mesures témoigne de l’intérêt que la ministre Martine Aubry et le gouvernement Jospin accordent aux revendications des groupes radicaux de défense de la cause des chômeurs. La ministre Martine Aubry propose alors aux préfets de mettre en place des coordinations avec les institutions sociales locales 743 . Elle suggère, par ailleurs, aux autorités préfectorales de prendre des mesures adéquates de manière à répondre favorablement aux attentes des chômeurs et des organisations de chômeurs 744 .

La mise en oeuvre de ces mesures administratives ne semble pas bénéficier du même effet médiatique que les manifestations des groupes de cause des chômeurs. Ces décisions qui traduisent la volonté de l’autorité gouvernementale de répondre favorablement aux organisations des chômeurs n’influent pas sur la sympathie que les Français éprouvent pour la lutte des chômeurs 745 . Le soutien « populaire » dont bénéficient les groupes de défense de défense de la cause des chômeurs met le gouvernement de Lionel Jospin dans une situation peu confortable, du moins vis-à-vis de l’opinion publique 746 . La ministre de l’Emploi et de la solidarité Martine Aubry, qui semble surprise par le soutien « populaire » de la mobilisation des groupes de défense de la cause des chômeurs, se résout alors à occuper aussi l’espace médiatique pour faire entendre la voix des autorités gouvernementales. Elle ne prend position ni contre les actions qui se situent à la limite de la légalité des organisations de chômeurs, ni même contre leurs demandes parfois excessives 747 .

La ministre Martine Aubry sollicite une sorte de « Pacte de solidarité « contre le chômage entre le gouvernement et les groupes de défense de la cause puisqu’elle demande à ce que « ce mouvement s’arrête, que chacun juge avec responsabilité que nous ferions mieux de nous réunir tous pour combattre le chômage » 748 . Elle qualifie même de « salutaire » 749 le soutien que les organisations de défense de la cause des chômeurs reçoivent de l’opinion publique. A l’évidence, la ministre n’est pas indifférente à la demande des organisations de défenses de la cause des chômeurs puisqu’elle affirme que,

‘« la priorité est de créer des emplois, beaucoup d’emplois. C’est la raison d’être de toute l’action gouvernementale (...). La solidarité doit s’exercer au bénéfice de tous, sauf exception » 750 . ’

La sensibilité de la ministre Martine Aubry à la cause des chômeurs prend tout son sens avec le déblocage d’un milliard de francs. Cette somme d’argent est destinée à venir en aide aux plus démunis ainsi que le reconnaît un des responsables d’AC !

‘« …  le gouvernement a répondu en mettant en place un fonds d’urgence social d’un milliard qui permet de distribuer des aides d’urgence pour le cas de « détresse sociale » et a annoncé de très faibles augmentations de l’allocation spécifique de solidarité » 751   ’

Ce montant symbolique a pour objet de satisfaire les demandes et les besoins vitaux immédiats des chômeurs et des précaires. Cette enveloppe s’accompagne de la création de « missions d’urgence sociale » dans chaque localité. Ces organismes locaux, véritables spécialistes de l’urgence, regroupent, outre, les Assedic, les organismes sociaux mais aussi les collectivités locales. En réalité, ce sont des cellules d’urgence qui ont pour mission de faciliter les versements de sommes d’argent en liquide à des chômeurs en difficulté 752 . « Les missions d’urgence sociales » connaissent un vif « succès » parce qu’elles sont rapidement débordées par les demandes d’aides sociales provenant des plus défavorisés. Par exemple, pour la seule ville d’Arras, plus de 250 dossiers de personnes démunies ont été accueillies 753 . Le milliard ainsi mis à disposition des plus démunis ne semble pas, selon les déclarations des leaders des groupes de défense de la cause des chômeurs, couvrir les besoins des plus nécessiteux. Ces derniers qualifient « d’effet d’annonce » les décisions prises par la ministre Martine Aubry 754 . Les quatre groupes de défense de la cause des chômeurs expriment alors toute leur déception 755 . Le radicalisme des groupes de défense de la cause des chômeurs pousse le premier ministre Lionel Jospin à intervenir lui aussi.

Les actions d’occupation de l’espace médiatique et de « séduction » de la ministre Martine Aubry et du premier ministre Lionel Jospin ont, de notre point de vue, pour objet de rassurer l’opinion publique et les organisations de chômeurs en « grève ». Les interventions de ces différentes personnalités s’inscrivent dans la dynamique des actions publiques visant à trouver des solutions durables aux revendications des groupes de cause. Elles indiquent clairement que les autorités gouvernementales ne sont pas insensibles à la mobilisation des groupes de défense de la cause des chômeurs, voire même aux revendications dont ces organisations de chômeurs sont porteuses.

L’attention que le gouvernement accorde aux revendications des groupes de cause est d’autant plus importante que le gouvernement de Lionel Jospin se trouve affaibli par les prises de position de certains ministres dont Marie Georges Buffet et Dominique Voynet qui ministres ne manquent pas de soutenir publiquement les groupes de défense de la cause des chômeurs.

Notes
726.

Jérôme Fénoglio, « L’Assemblée nationale souhaite modifier le projet de loi contre l’exclusion »,Le Monde, 15 avril 1997, p. 7.

727.

Le Monde, «  Dans sept villes, les chômeurs continuent à harceler le gouvernement », 31 décembre 1997, p. 5.

728.

Entretien de Laurent Guilloteau réalisé par Yann Moulier-Boutang, Futur Antérieur, numéro 43, printemps 1998.

729.

La CGT et la minorité CFDT : Laurent Mauduit, « Des mesures immédiates contre l’exclusion en attendant une loi »,Le Monde, 26 décembre 1997, p. 5.

730.

Bruno Causse et Carole Monnot, « Samedi, à Marseille, où le mouvement avait commencé le 11 décembre »,Le Monde, 12 janvier 1998, p. 5.

731.

Entretien n° 3 avec François Landais.

732.

Les groupes radicaux de défense de la cause des chômeurs ont été reçus pour la première fois par un premier ministre, Lionel Jospin. Il s’agit des groupes de cause : AC !, APEIS, du MNCP et de Partage. Source : Le Monde, « Premier victoire pour les chômeurs », 12 janvier 1998, p. 11.

733.

Jérôme Fénoglio, « Une course de vitesse est engagée pour boucler la loi contre l’exclusion »,Le Monde, 13 janvier 1998, p. 8.

734.

Michel Bezat et Olivier Biffaud, « Le gouvernement débloque un milliard de Francs pour un fonds d’urgence », Le Monde, 10 janvier 1998, p. 6.

735.

Ibid p. 6.

736.

L’un des conseillers de la ministre Martine Aubry.

737.

Entretien n° 3 avec M. François Landais.

738.

Laurent Mauduit, « Des mesures immédiates contre l’exclusion en attendant une loi », Le Monde, 26 décembre 1997, p. 5.

739.

Aujourd’hui, 5 mars 1998. Archives de Philippe Costes, ancien conseiller de Martine Aubry

740.

Concernant la première circulaire, la ministre Martine Aubry s’adresse aux préfets dont les départements sont touchés à un degré relativement important par des actions des comités de chômeurs. Circulaire du 24 décembre 1997 de la ministre de l’Emploi et de la solidarité Martine Aubry adressé aux préfets de région et de département. Archives de Philippe Coste, ancien conseiller de Martine Aubry.

741.

Les 24 et 26 décembre 1997, la ministre de l’Emploi et de la solidarité Martine Aubry a pris trois circulaires.

742.

Archives mise à notre disposition par le conseiller Philippe Coste : correspondance que la ministre Martine Aubry adresse à M. le Préfet de Département du Pas-de-Calais, 24 décembre 1997. Lire aussi Le Monde, « Des cas de détresse sociale », 26 décembre 1997.

743.

Dans la seconde circulaire, elle informe les préfets des départements les moins affectés par la « colère » des chômeurs de la nécessité de prendre aussi des initiatives avec les organismes en charge des aides sociales : circulaire du 26 décembre 1997 de la ministre de l’Emploi et de la solidarité adressée aux préfets de région et de département. Archives de Philippe Coste, ancien conseiller de Martine Aubry

744.

Dans la circulaire du 26, Martine Aubry indique clairement qu’elle souhaiterait «  d’ici le 2 janvier au soir qu’un état précis de l’action des comités de chômeurs dans votre [les préfets] département. Vous établirez, le cas échéant, un bilan détaillé des actions menées pour traiter les dossiers particulièrement difficiles.. » :circulaire du 30 décembre 1997 de la ministre de l’Emploi et de la solidarité adressée aux préfets de région et de département. Archives de Philippe Coste, ancien conseiller de Martine Aubry

745.

En effet, selon un sondage CSA du 29 décembre, 63 % des Français disent « être favorables au mouvement des chômeurs ». Près de deux Français sur trois « soutiennent » ou « ont de la sympathie » à l’égard des revendications des chômeurs. Archives de Philippe Coste.

746.

La ministre Martine Aubry tient une conférence de presse le samedi 3 janvier 1998, et ce, après avoir été reçue à l’hôtel Matignon. Vus l’urgence et le soutien de l’opinion publique aux groupes de cause des chômeurs, la conférence de presse, initialement prévue pour le mardi 6 janvier, a été avancée au samedi 3 janvier 1998. Source : Olivier Biffaud et Jérôme Fénoglio, « L’Etat débloque 500 millions de Francs pour aider les chômeurs de longue durée »,Le Monde, 4-5 janvier, 1998.

747.

Entretien avec François Landais.

748.

Alain Beuve-Méry, « Le mouvement des chômeurs continue à défier le gouvernement »,Le Monde, 15 janvier 1998, p. 6.

749.

Ibid.

750.

La ministre Martine Aubry informe les chômeurs que l’emploi est la priorité du gouvernement et leur rappelle que le Premier ministre Lionel Jospin a, lors de sa déclaration de politique générale, pris l’engagement que l’emploi serait la priorité de son gouvernement : document de la conférence de presse de la ministre de l’Emploi et de la solidarité, le 2 janvier 1998 ; archives de Philippe Coste.

751.

Entretien de Laurent Guilloteau réalisé par Yann Moulier-Boutang, Futur Antérieur, numéro 43, printemps 1998.

752.

Alain Beuve-Méry, « Le mouvement des chômeurs continue à défier le gouvernement »,Le Monde, 15 janvier 1998, p. 6.

753.

Ibid. p. 6.

754.

Il s’agit des groupes de cause : AC, MNCP, APEIS et de Droits devant !!!

755.

Pour le Mouvement national des chômeurs et précaires « ces déclarations ne répondent pas à l’urgence sociale et aux revendications ». Quant au groupe de cause Droit devant, il considère que « le discours d’Aubry stigmatise les chômeurs en lutte qui refusent l’inacceptable». Pour l’Association pour l’emploi, l’information et la solidarité, « Martine Aubry n’a pas apporté de réponses aux occupants des Assedics ». Enfin, Agir ensemble contre le chômage considère que « sur l’allocation exceptionnelle de 3 000 francs réclamée par les chômeurs, la ministre répond par un fin de non–recevoir ». Source : Alain Beuve-Méry, « Le mouvement des chômeurs continue à défier le gouvernement »,Le Monde, 15 janvier 1998, p. 6.