Entretien avec Jean Baptiste Eyraud, Droit Au Logement

Je suis Jean Baptiste Eyraud, l’un des fondateurs de l’association Droit Au Logement qui a été créée en octobre 1990. Je suis président de cette association et suis porte-parole de la fédération Droit Au Logement.

Dans la vie, j’ai fait des métiers manuels. J’ai une formation de charpentier…ma vie a basculé dans les années 1980 quand j’ai commencé à m’occuper des problèmes des mal-logés.

C’est exact.

C’est un des aspects de l’exclusion. C’est un aspect important. Il faut d’abord se loger, c’est primordial, c’est-à-dire que sans logement, c’est un des besoins fondamentaux. C’est sûr que c’est un des droits primordiaux.

Nous, on intervient sur trois catégories de ménages, c’est-à-dire ceux qui sont sans logis, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas de logement fixe, ceux qui sont sans logés et hébergés de façon précaire à droite et à gauche par des structures d’hébergement, au foyer, les hôtels, chez les familles, les amis etc.…ce sont les hébergements provisoires. Ensuite, on prend en compte les mal logés, ce sont les locataires ou les propriétaires qui vivent dans les conditions de très mal logement…c’est-à-dire les logements qui sont dangereux pour la santé…et puis il y a les locataires qui sont menacés d’expulsion […] Les ménages modestes sont les principaux ménages préoccupés par les mesures d’expulsion.

Il s’agit de personnes à revenu modeste, à telle enseigne qu’ils n’ont pas la possibilité de se loger convenablement (…), ce sont pour beaucoup des familles d’immigrés, des familles monoparentales, des familles nombreuses, les célibataires ou les chômeurs. En général, ce sont les gens qui n’ont pas de boulot ou lorsqu’ils travaillent, ils sont mal payés : ce sont les salariés pauvres.

Concurrence, non pas vraiment parce qu’on n’est pas sur le même champ. Par contre la volonté d’avoir un discours plus ferme en direction des autorités. A l’époque l’uniopss et le réseau Alerte avaient des propositions très très modérées, timorées même on pourrait dire. Alerte fait des propositions qui sont de l’ordre de la charité si vous voulez. Or, nous, on a fait des propositions qu’ils n’ont pas acceptées.

Nous, on a décidé de créer ce collectif avec Médecins du monde parce qu’on ne se retrouvait pas dans le collectif Alerte ou à l’Uniopss avec d’autres associations… donc on avait besoin d’avoir une parole commune qui n’était pas la même que celle de l’Uniopss .

On a créé le regroupement pour faire entendre notre point de vue. Mais on savait qu’on arriverait à trouver des points de convergence.

Nous n’avons pas créé le collectif « CPE » pour concurrencer le collectif « Alerte ». Nous n’étions pas en concurrence contre le collectif Alerte parce que […] on n’est pas sur le même champ.

Oui, nous on est plus jeune. On n’a pas les mêmes exigences. On n’est pas lié à l’establishment. On n’a pas d’autres intérêts à défendre que ceux des mal logés et des sans logis…ça nous donne plus de liberté de parole.

On avait décortiqué le projet de loi du gouvernement d’Alain Juppé et l’Uniopss a rejoint notre analyse. C’est Anthonioz de Gaulle qui a estimé nécessaire de regrouper les deux collectifs et de parler d’une seule voix. C’est elle qui a obligé le réseau Alerte à hausser le ton. Il y a eu une conférence de presse assez acerbe pour commenter le projet de loi de Jacques Barrot.

On avait vu Besson. On avait beaucoup insisté sur le volet Logement. On avait obtenu quelques bricoles ….

Elles sont plus écoutées parce qu’elles ne sont pas exigeantes. Elles font des demandes qui sont autour du porte-monnaie….

Nous sommes des associations syndicales. Nous on a jamais pris des positions politiques…en dehors du Front national. Dire que nous avons des militans d’extrême gauche, ça se discute. Ce sont plutôt les associations institutionnelles dont les membres sont affiliées à des partis politiques. C’est nous faire un mauvais procès. Là, on n’est pas d’accord.

On privilégie les deux actions : coups de poing et négociation. S’il n’y a pas de conflit, il n’y a pas de négociation. Derrière une action, il y a une négociation. Nous, c’est un travail au quotidien. Attention, c’est des milliers et des milliers qu’il faut loger ou reloger.

Médecins du Monde ne voulait pas travailler avec les syndicats. C’était les conditions que le groupe de cause Médecins du Monde avait posé au départ [c’est-à-dire lors de la mise en place du collectif]. Son objectif était de faire alliance avec nous [les groupes de cause radicaux ] sans que les syndicats soient associés.