Partie I 
Une approche historique de la statistique : des premiers pas à la « géométrie du hasard » et aux « maîtres de l’erreur »

Aborder ce travail par une étude de l’histoire de la statistique peut apparaître au premier abord une approche banale et sans grand intérêt ; banale car le déploiement d’une question dans l’espace et dans le temps est une approche traditionnelle, et sans grand intérêt en raison des ouvrages que l’on peut citer pour circonscrire l’histoire de la statistique.

Nous nous inscrirons en faux avec ce liminaire car loin de nous laisser guider par cette première partie vers une chronogénèse des concepts statistiques nous marquerons les différences entre une approche que l’on peut lier à l’histoire de l’apparition des outils statistiques et une démarche plus proche d’une topogénèse des concepts statistiques.

Ainsi notre travail donnera une situation privilégiée à l’enquête comme lieu contribuant à la fois aux interrogations précédant la mise en place d’outils théoriques mais également comme sujet et occasion de justifier, comme a posteriori, la mise en place de théories novatrices en leurs temps.

Bien entendu étudier l’histoire de la statistique en tant que mode de connaissance du monde ne peut se faire sans approfondir les outils formels développés par le « calcul des probabilités » puis par la « statistique mathématique » qui en constituent à la fois la preuve devant la communauté scientifique mais aussi qui nourrissent un ensemble de techniques, de résultats et de théorèmes. Nous rencontrerons également dans cette étude les fondements matériels et institutionnels qui ont accompagné le développement de la statistique, justifiant son existence dans le cadre des états où elle assure une fonction à la fois utilitaire et symbolique.

Nous aurons donc à parcourir ce champ sous un triple éclairage : celui de l’évolution de la science, celui de l’organisation des États et celui relatif à la cité, à la chose publique, au gouvernement de l'état ou plus simplement à la politique.