b) La diffusion inégale des confréries associées à la Réforme catholique et le maintien des confréries plus anciennes

La diffusion des confréries peut également servir de marqueur à la progression de la Réforme catholique. M. Venard rappelle les trois types de confréries habituellement repérés 198 . Les confréries médiévales, ou confréries de dévotion, sont souvent organisées comme une association amicale et joyeuse pour célébrer les fêtes, ainsi la confrérie des Sabbatiers d’Aubenas réunit ses membres à l’occasion de Pentecôte. Quelques exercices de piété pour le culte d'un saint s’ajoutent à ces festivités. Les confrères organisent également des charivaris, des fêtes destinées à tourner en dérision les époux marqués par une grande différence d’âge au moins jusqu'au XVIe siècle. Les confréries « nouvelles » se sont développées aux XVIe et XVIIe siècles, en lien avec la Réforme catholique. On distingue les pénitents, apparus fin XVIe siècle, sous l’influence des confréries d'Avignon et Lyon. Ce sont des noyaux de résistance à la Réforme. L’organisation de processions permet de marquer l’espace sacré. Deux modèles coexistent. D’une part, le modèle provençal ou lyonnais. Dans ce cas, la confrérie possède sa propre chapelle, ce qui lui laisse plus d'autonomie face au clergé local. D'autres pénitents sans chapelle se réunissent dans la tribune de l'église, et donc sont assujettis au clergé local, leurs exercices de dévotion sont largement consacrés au culte du Saint Sacrement. Enfin les confréries du Saint Sacrement, les trois villes étudiées en possèdent une, sont les plus nombreuses car l’influence des évêques va dans ce sens. L’objectif est de centrer la piété des fidèles sur le Saint Sacrement, puisque c’est le point de rupture avec les protestants. Les exercices de dévotion sont donc importants. La confession, la communion, l’oraison, tiennent une grande place dans la vie du confrère. Dans ce cas, le véritable supérieur de la congrégation est le curé.

Or l'implantation des confréries nouvelles est tardive en Vivarais compte-tenu de l'importance de la Réforme, des guerres de la première moitié du XVIIe siècle et d’un relatif isolement. Ainsi les confréries médiévales subsistent à Annonay jusqu’en 1683 et ne sont remplacées que progressivement. Chomel le béat 199 rappelle qu'en 1534 des confréries anciennes, de type médiéval, existaient à Annonay : celles du Saint Esprit et de la Sainte Trinité. Elles distribuaient du pain pour les fêtes de Pentecôte et soulageaient les pauvres de la paroisse. La confrérie du Saint Esprit s'appelle ainsi car ses trois jours de fête étaient à Pentecôte. Cette confrérie a cessé d'exister sans doute vers le milieu du XVIIe siècle et ses biens ont été rattachés à ceux de l'hôpital général. Toutefois en 1683, les revenus de la confrérie ne sont pas encore attribués à l'Hôpital. Les consuls distribuent le pain aux pauvres avec l'argent de la confrérie. Privas apparaît comme le parent pauvre sur la carte de répartition des confréries. Les rares essais datent du XVIIe siècle et ne sont guère concluants. La mise en place tardive des confréries est le signe du retard du Vivarais par rapport aux diocèses voisins. Mais certaines villes comme Annonay, font parfois exceptions. Les visites pastorales, étudiées précédemment, donnent une image en contradiction avec ce constat. Toutefois, les visites qui nous sont parvenues ne concernent que le sud du diocèse, et non les trois villes étudiées. D’autre part, la contradiction n’est qu’apparente : les deux types de confréries cohabitent et les visites pastorales relèvent parfois uniquement l’existence de celles qui sont en conformité avec la Réforme catholique, ce qui donne l’impression que les confréries du Saint Sacrement sont les plus seules présentes.

Notes
198.

Venard M., « Les confréries dans l'ancien Vivarais », Revue du Vivarais, 1985, tome LXXXIX, p. 236.

199.

Chomel le béat, Annales de la ville d'Annonay, 1767, ouvrage cité, p. 347.