Le deuxième élément susceptible d’expliquer le maintien d’une forte confessionnalisation au sein de la communauté réformée est peut-être la logique de repli dans un quartier isolé, adoptée par certains réformés annonéens, qui a sans doute également contribué à la préservation de la communauté pendant la période de persécution. La situation de forte concentration de certains protestants annonéens dans le quartier de la Récluzière n’a pas beaucoup évolué en 1750 703 . Les chiffres obtenus ici montrent même un renforcement de la concentration : 19,8 % en 1721 et 27, 5 % en 1750. Certes la faiblesse des effectifs analysés en 1750 est peut-être en cause. D’autre part, la définition des quartiers n’est pas exactement la même dans les deux documents et gêne la comparaison. Mais la coupure semble se maintenir. La comparaison avec la situation lyonnaise permet de mesurer les différences 704 . En effet dans le cas lyonnais il n’y a pas quartier à forte concentration protestante sauf pour des raisons professionnelles. Or nous avons tenté de montrer que les raisons professionnelles n’étaient pas suffisantes, tout au moins au XVIIe siècle, pour expliquer la forte concentration de population réformée dans le quartier de la Récluzière.
Quant à Privas, le lien avec les Boutières protestantes, semble constituer un facteur de conservation de la foi réformée. La rupture, observée entre Privas et sa région au début du XVIIIe siècle, est visiblement terminée. Mais il est surprenant de retrouver une communauté aussi nombreuse 705 . Le changement de comportement de la communauté réformée semble se faire après la Révocation. Après avoir longtemps tenté de s’aligner sur les catholiques au XVIIe siècle, les persécutions ont déclenché un sursaut : les départs pour le Refuge sont nombreux et le taux de conservation de cette population est élevé. En dépit d’une certaine réserve pendant les années de persécution, qui s’est traduite notamment par une faible fréquentation des assemblées du « Désert », une communauté réformée s’est maintenue.
Voir tableau 60.
Y. Krumenacker, Des protestants au siècle des Lumières, le modèle lyonnais, ouvrage cité, p. 202-205.
Voir tableau 53.