Méthodologie

Concernant le type de population étudié, nous axerons notre recherche sur l’étude des personnes âgées de plus de 60 ans atteintes de la maladie d’Alzheimer à un stade cliniquement invalidant, d’où l’emploi à leur propos du qualificatif « Démence Sénile de Type Alzheimer » (D.S.TA.), bien que la terminologie ait évolué et que désormais on parle indifféremment de maladie d’Alzheimer pour qualifier les déficits cognitifs invalidants séniles et préséniles, avec une réticence à employer le terme « démence ».

Afin d’appréhender notre sujet dans sa globalité et sa complexité, nous avons choisi de distinguer trois parties théoriques :

En premier lieu, la thématique de la DSTA, son approche psychodynamique et sa prise en charge thérapeutique a constitué l’élément fondateur de notre recherche. Cette partie permet de distinguer les enjeux qu’une prise en compte non verbal fait émerger.

Ensuite est proposée une étude traitant des émotions, reprenant les définitions, classifications, démarches scientifiques et littéraires majeures sur ce vaste sujet. Nous traitons là non seulement des émotions au sens large du terme, en prenant soin de distinguer les termes utilisés (affects / émotions / sentiments / humeurs / ressentis…) et leur aspect pathologique ou non. Une partie plus ciblée concernant les émotions ressenties par les personnes atteintes de DSTA pointera l’éventuelle spécificité de celles-ci.

Pour compléter cette partie, nous avons choisi de nous intéresser à la communication non verbale, celle-ci constituant l’unique support expressif des émotions lorsque la communication verbale est interrompue ou incohérente : qu’englobe t-elle ? Peut-on se servir de grilles de lecture standardisées ? Que constate t-on à son propos chez les personnes âgées démentes ?

Ces trois aspects, complémentaires pour notre étude, permettent de prendre en compte dans son ensemble le thème de la perception des affects à travers les indices non verbaux émis par les personnes âgées démentes.

Nous avons choisi de limiter notre recherche bibliographique à la littérature disponible en langue française, ce qui n’exclut pas la référence à des textes fondamentaux de langue anglaise ou autres.

L’émotion, qui implique l’ensemble des mouvements corporels, s’exprime principalement en situation d’interaction sociale. Notre objectif méthodologique concernant la partie expérimentale de cette thèse sera donc de prendre acte des manifestations non verbales du sujet dément à partir de ce qu’il donne à voir sur le plan émotionnel, lorsqu’il est en interaction avec un thérapeute.

Les réactions spontanées que va induire le visionnage d’un entretien entre une personne âgée démente et un clinicien permettront de prendre acte subjectivement des messages implicites, non verbaux, émis par le patient. Notre propos est d’étudier dans quelle mesure l’effet subjectif, voire projectif que produit ce visionnage de vidéos peut permettre de dégager des consensus caractérisables entre observateurs.

La plupart des recherches traitant de la communication non verbale des personnes âgées démentes se sont centrées sur l’étude des mimiques faciales, laissant souvent de côté les autres modes d’expression non verbale.

Du fait de notre matériel de recherche, constitué par des vidéos d’entretiens cliniques, nous traiterons ici uniquement des critères visuels et auditifs, laissant de côté les critères olfactifs et tactiles (qualité du toucher,..).

Nous souhaitons connaître quels sont les consensus spécifiques exprimés lorsque nous observons ces vidéos, en fonction de notre formation professionnelle ; trois formations professionnelles spécifiques ont été sélectionnées pour notre étude : les métiers de psychologue, aide-soignant et infirmier.

Nous sommes de plus attentifs à une autre nuance introduite dans notre méthodologie : la spécificité des réponses en fonction du degré de sévérité de la pathologie démentielle (personnes âgées témoins, atteintes de démence modérée ou sévère).

Pour compléter cette partie expérimentale, nous avons intégré deux études annexes complémentaires :

En s’intéressant à l’écart entre les descriptions effectuées par les personnes âgées sur leurs propres ressentis avec les définitions émises par les professionnels de soin, nous introduirons une limite à notre méthodologie ; en effet, les éventuels dissensus observés lors de ce travail comparatif apporterons un correctif d’ordre sémantique : s’entendre sur les mots comporte une marge d’erreur car ceux-ci seront interprétés avec d’inévitables nuances intersubjectives, qu’il s’agira alors de limiter au mieux en établissant des consensus sémiologiques les plus précis possibles.